« Il y a de la poésie parmi les prophètes et de la prophétie parmi les poètes » – .

« Il y a de la poésie parmi les prophètes et de la prophétie parmi les poètes » – .
« Il y a de la poésie parmi les prophètes et de la prophétie parmi les poètes » – .

La Croix : Comment est née l’idée de ce festival ?

Brigitte Fossey : Je travaille depuis une douzaine d’années avec Serge Sarkissian (auteur et metteur en scène des quatre spectacles présentés, ndlr) qui est habitué à ce genre de spectacles littéraires et spirituels, incluant aussi de la musique. Depuis quelques années, nous donnons des lectures à Avignon. L’année dernière notamment, Serge a donné Job ou l’errance du juste au Quartier Luna, où il rencontre Stéphane Bacquet, et de leur rencontre naît l’impulsion de ce festival. Il existe en effet une véritable complicité entre le Quartier Luna, la direction du « off » et le diocèse d’Avignon qui en assure le parrainage.

Une fête spirituelle dans la fête : y a-t-il eu des précédents ?

BF : Oui, c’est ce que souhaitait Jean Vilar depuis 1953, en harmonie avec le père Robert Chave, prêtre responsable de la radio chrétienne. Cette fois, le festival a été créé en partenariat avec RCF Vaucluse, la radio chrétienne locale.

Est-ce une fête littéraire, spirituelle, chrétienne ?

BF : La programmation répond d’elle-même. Par exemple, dans Lecture sacrée, le seul sur scène interprété par Catherine Salviat, sociétaire honoraire de la Comédie-Française, on y retrouve des textes de Bernanos, Péguy, Claudel, qui sont des géants de la littérature et de la foi. On entendra également le Cantique des Cantiques – interprété par Céline Samie et Bernard Lanneau dans Cantique des Cantiques, naissance du désir –, qui est de la pure poésie et un immense texte spirituel. Je trouve qu’il y a de la poésie dans les prophètes, et de la prophétie dans les poètes. Une inspiration en tout cas.

Le livre de Job est l’un de ces grands textes. Job ou l’errance du justele rôle de Dieu a été initialement joué par Michael Lonsdale (décédé en 2020, NDLR). Ici, il est représenté par une voix, la voix enregistrée de Michael, sa mémoire en quelque sorte. Michael Lonsdale est un peu le parrain de ce festival.

Parlez-nous du spectacle dans lequel vous jouez, La passion de la parole ?

BF : C’est un spectacle inspiré d’un livre que nous avons écrit avec la comédienne Catherine Salviat et la pasteure Marie Cénec, édité par Serge Sarkissian. Je le joue depuis très longtemps, avec des textes variés. On en rajoute, on en enlève. Cette fois, je lirai des poèmes de Baudelaire, Vigny, Hugo, Prévert, Desnos, Apollinaire, un très beau texte de Gabriel Celaya sur la guerre d’Espagne… Il y aura aussi des poèmes plus amusants. C’est comme une anthologie poétique et spirituelle qui traverse de nombreux aspects de la vie, dont le thème de l’exil. Serge, qui est d’origine arménienne, y est particulièrement sensible.

D’où vient cette passion ?

BP : Le texte qui a suscité ma passion pour la Parole est le prologue de l’Évangile de saint Jean, entendu à l’âge de 2 ans et demi ou 3 ans en allant à la messe avec mes parents, quand nous vivions dans le Nord. J’avais soif de comprendre, j’ai demandé à mon père de me l’expliquer. J’ai toujours aimé aller à la messe, surtout pour lire les grands textes, qui sont porteurs d’une grande part de vérité. Ils témoignent de l’histoire et des aspirations de tout un peuple, mais pour moi ce sont aussi les saisons du cœur. C’est pourquoi, dans mon spectacle, je lis chaque jour un Évangile différent, en commençant par le Prologue de Jean. J’aime beaucoup les Évangiles, écrits par les amis de Jésus. À chaque fois qu’on les écoute, c’est comme regarder la mer, ce n’est jamais la même chose.

La poésie occupait-elle une place importante dans votre famille ?

BP : Mon père a demandé la main de ma mère à son futur beau-père en alexandrins, et il m’a répondu en alexandrins. Donc oui. D’ailleurs, je suis né en 1946, à la fin de la guerre. Mes parents étaient joyeux de la vie : une naissance, c’était volcanique, cosmique ! Et ils m’ont transmis cet enthousiasme pour la vie, pour la beauté. Il arrive un moment où je dois transmettre cet enthousiasme. Je crois que l’infini est à portée de main, mais on ne voit bien le ciel que si on est enraciné dans la terre. En ce sens, l’arbre est l’image de ce que devrait être l’homme. C’est cela que je voudrais transmettre.

Pourquoi est-ce important d’avoir ce genre de lieu à Avignon ?

BP : Avignon est la racine du théâtre. Pour moi, Jean Vilar est un maître absolu, il vivait dans une petite chambre de bonne mais il croyait au théâtre, un théâtre qui va aux gens. Il a mis la barre très haut ! Nous sommes tous un peu dans le sillage de Jean Vilar, avec cette envie de décentralisation, de rencontres, de partage. Et là, il y a une place pour le théâtre spirituel.

A qui s’adresse la fête ?

BP : Aux mélomanes, à ceux qui aiment les beaux textes, aux enfants comme aux adultes. C’est un festival très éclectique, véritablement ouvert à tous. A travers ce festival, nous souhaitons inviter les gens à se ressourcer, à méditer, à sourire, à rire aussi.

 
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