Ce premier tour marque « la fin du macronisme car le bloc central est écrasé »

Emmanuel Macron a échoué dans son pari. Trois semaines après la claque des élections européennes et l’annonce d’une dissolution surprise, le premier tour des législatives est une nouvelle défaite pour le camp présidentiel. Le Rassemblement national est arrivé en tête (33,5% des voix) ce dimanche devant le Nouveau Front populaire (28,5%) et le bloc centriste (22,1%). Le RN aura-t-il la majorité absolue dimanche prochain ? On en parle avec Benjamin Morel, docteur en sciences politiques de l’ENS Paris-Saclay et maître de conférences à Paris-Panthéon-Assas.

Quelle est la première leçon du premier tour ?

Ce premier tour est une nette victoire du RN qui est en tête et bat son record en termes de voix pour un premier tour. Mais ce n’est pas une victoire « chaotique » comme aux européennes, car la gauche n’est pas si loin. Ce qui est assez frappant, ce ne sont pas tant les résultats globaux, mais le caractère écrasant dans certaines circonscriptions, avec de nombreux élus RN au premier tour (au moins 37). Certaines personnalités politiques nationales se retrouvent également en difficulté, comme François Hollande, Olivier Marleix, François Ruffin, ou encore Fabien Roussel qui est déjà éliminé.

Ceci est d’autant plus notable que normalement, lors des élections législatives, il y a une démobilisation des électeurs défaits à la présidentielle, ce qui profite au camp vainqueur. Mais cette fois, la vague RN a lieu alors que la participation est très forte. Cela montre qu’il y a une véritable poussée du RN dans le pays. Et même s’ils n’obtiennent pas la majorité absolue dimanche prochain, ils disposeront d’une forte légitimité avec plus de 12 millions de voix.

L’appel au « retrait républicain » pour battre le RN peut-il changer la donne ?

La gauche s’en sort très bien dans les grandes villes, mais à première vue pas aussi bien dans les zones rurales, périurbaines, où la majorité ne s’en sort pas si mal. On peut penser que le transfert des voix de gauche vers la majorité sera meilleur que l’inverse. Car l’électorat centriste peut avoir peur de Jean-Luc Mélenchon, il peut y avoir un effet repoussoir de certaines personnalités LFI et donc du NFP à droite et au centre. D’autant que Jordan Bardella a tenté de leur parler pendant la campagne en abandonnant ses mesures trop coûteuses comme la réforme des retraites. Si repli il y a, il n’est pas sûr que les consignes de vote soient vraiment respectées. En revanche, de l’autre côté, l’électorat de gauche devrait s’unir pour battre le RN.

Cette élection marque-t-elle la fin du macronisme ?

Il y a un double échec d’Emmanuel Macron. D’abord, on ne peut plus vraiment parler de macronisme, car l’ancienne majorité ne répond plus à Emmanuel Macron depuis la dissolution. Il y a ceux qui suivent Attal, d’autres Edouard Philippe… Certains ont largué les amarres et en cas de cohabitation, Emmanuel Macron n’aura plus beaucoup de troupes avec lui, il apparaît déjà très isolé.

Par ailleurs, l’arrivée du macronisme avait conduit à la fin de la bipolarisation : le bloc central, qui n’avait pas assez de poids démographique, avait réussi à gagner du terrain à gauche et à droite dans la dynamique de la présidentielle de 2017 pour devenir majoritaire. Mais désormais, il se trouve trop faible. C’est la fin du macronisme car le bloc central est écrasé, une nouvelle fois pris en étau entre le bloc droite-extrême droite et la gauche unie. Emmanuel Macron aura lui-même refermé la parenthèse qu’il avait ouverte.

 
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