L’Observatoire départemental de protection de l’enfance de Haute-Vienne, qui regroupe l’ensemble des acteurs et programmes de prévention et de protection, fête son dixième anniversaire. Une décennie qui a vu les chiffres exploser et la situation devenir plus qu’alarmante.
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L’aide sociale à l’enfance est une responsabilité qui relève des ministères. En 2007, une loi leur a ordonné de créer, en la matière, des Observatoires départementaux de protection de l’enfance (ODPE), faisant référence à un Observatoire national (ONPE).
L’ODPE de Haute-Vienne a été créée en 2014. Elle a fêté son dixième anniversaire ce jeudi 28 novembre 2024, lors d’un grand colloque à l’Espace Noriac de Limoges. Conférence qui est revenue, avec tous les acteurs concernés, sur cette décennie d’expérience.
Et le constat qu’il dresse actuellement en Haute-Vienne est plus qu’alarmant. Les chiffres n’ont jamais été aussi élevés. Les évolutions n’ont jamais semblé aussi inquiétantes. Les besoins n’ont jamais été aussi grands, alors que de fortes coupes dans les budgets des Conseils départementaux se profilent…
Sous la présidence du Conseil Départemental, et ses services dédiés, l’ODPE 87 rassemble tous les acteurs du sujet, du monde de la santé, de l’éducation, de la justice et du tissu associatif. Dès le début, selon Gulsen Yildirim, vice-président (PS) chargé de l’enfance, des familles et de la démocratie sanitaire« C’était un choix politique en Haute-Vienne d’avoir un comité de pilotage le plus large possible, plus encore que ce que prévoit la loi, afin d’avoir un état des lieux le plus précis possible, et un meilleur travail collaboratif. “
Les missions de ces ODPE sont multiples, entre autres :
- Recueillir, examiner et analyser les données relatives aux enfants à risque dans le département.
- Renseignez-vous sur toute évaluation des établissements et services intervenant dans le domaine de la protection de l’enfance.
- Suivre la mise en œuvre du plan départemental et formuler des avis.
- Formuler des propositions et des avis sur la mise en œuvre de la politique de prévention et de protection de l’enfance dans le département.
- Élaborer un programme départemental pluriannuel des besoins de formation en prévention et protection de l’enfance.
Le dernier plan départemental de protection de l’enfance, élaboré par ses soins, vient d’être voté par le Conseil départemental de la Haute-Vienne en octobre 2024. Il est valable pour la période 2025-2029.
Toujours selon Gulsen Yildirim, «tout a changé et ce n’est vraiment plus la même situation qu’il y a cinq ans. Le COVID et le confinement ont été de véritables catalyseurs, à tel point qu’on a assisté à une véritable vague de sorties. Alors peut-être sommes-nous meilleurs qu’avant pour repérer les violences conjugales, notamment les violences conjugales, mais les chiffres ont explosé !“
En 2023, il y a eu, toutes décisions confondues, 2 437 mesures d’aide sociale à l’enfance en Haute-Vienne, soit une augmentation de 39 % par rapport à 2014 (augmentation encore plus importante sur la période 2019-2024 !).
Parmi ces mesures, 1 180 étaient des mesures de placement.
“A la sortie du confinement, nous avons été confrontés pour la première fois à la non-application des mesures, c’est-à-dire que nous ne pouvions plus fournir de place ! Aujourd’hui, ça va mieux, il n’y a qu’une dizaine de mesures de placement en cours. Mais dans certains départements, c’est plus d’une centaine !“
Avec l’aide de l’unité de recherche du laboratoire FrED de l’Université de Limoges, l’ODPE constate des problèmes de plus en plus multiples chez les enfants pris en charge : éducatifs, comportementaux, violences, souffrances, handicap, santé mentale ou psychologique également. Sur ces derniers points, Charlotte Loiseau, directrice générale adjointe du service Solidarité humaine du Conseil départemental, réutilise le terme «d’explosion« . “Alors que le secteur souffre, nous devons plus que jamais pouvoir travailler avec lui.“
Enfin, si la grande majorité des mesures prises concernent les enfants âgés de 12 à 17 ans (47 %), un chiffre encore plus élevé concerne les mesures de placement (56 %, dont 39 % des 15-17 ans), on assiste à une augmentation significative des des mesures concernant les plus jeunes, et même les tout-petits.
Selon Nathalie Duroussaud, directrice de la solidarité, centre enfance du Conseil départemental, «nous disposons d’une structure d’accueil pour les bébés, appelée la Pépinière. Nous sommes passés de 6-7 bébés maximum autrefois, à près d’une vingtaine aujourd’hui !“
Si l’on ne prend pas en compte tous les acteurs concernés (voir ci-dessus), 376 professionnels, des médecins aux assistants socio-éducatifs, des psychologues aux attachés territoriaux, travaillent au Conseil départemental d’aide à l’enfance.
Le budget alloué à la prévention et à la protection de l’enfance, tous secteurs confondus, a considérablement augmenté.
Il s’agissait de près de 37 millions d’euros lors de la création de l’ODPE. Aujourd’hui, ils sont 53,5 millions (+45%). 11 millions d’euros supplémentaires ont même été votés en 2023, pour permettre la création de davantage de lieux d’accueil. Environ 64 millions, c’est ce qui est actuellement prévu pour l’année prochaine.
Les mesures de placement, quelles qu’elles soient, représentent à elles seules un coût de près de 45 millions d’euros.
A ce titre, la Haute-Vienne dispose de 1 022 places d’accueil, réparties comme suit :
- 493 places en placement familial (dont 363 places auprès d’assistants familiaux, nouvelle appellation des familles d’accueil, au nombre de 186 en Haute-Vienne)
- 188 places dans des structures dédiées
- 145 places dans des foyers sociaux pour enfants à Limoges, Chaptelat, Dournazac et Magnac-Laval
- 71 places en espaces de vie et d’accueil
- 65 places dans les structures d’urgence
- 60 places en placement en foyer éducatif
Au total, 189 places ont été créées depuis 2019. Et un appel d’offres pour la création d’une « structure de répit », dispositif qui permettra d’éviter les perturbations dans certains placements, vient d’être lancé.
Mais face à l’explosion dont tout le monde parle, et au nombre de professionnels, et aux budgets, et aux lieux d’accueil, tout devrait augmenter dans les années à venir. Normalement, car comme le demande Gulsen Yildirim, «qu’en sera-t-il demain avec les coupes drastiques de nos budgets qui s’annoncent ? Mais la protection de l’enfance est, et doit rester, une priorité absolue !“
Comme nous l’avons dit, le prochain plan départemental de protection de l’enfance, pour la période 2025-2025, vient d’être voté.
Outre la poursuite et l’amélioration des missions, quelques axes ont également été identifiés : une meilleure protection de la santé physique et mentale, une meilleure ouverture sur l’extérieur, une meilleure prise en compte de la connaissance de soi.
Trois axes, déclinés en vingt et une actions, avec la volonté de mettre en avant une participation active et accrue des parents et des enfants à la protection de l’enfance, une intensification de l’offre, notamment en termes d’accueil, et une réelle volonté d’ouverture sur la culture.