Située au cœur historique de la capitale anglaise, la circonscription des villes de Londres et Westminster n’a pas vraiment l’air d’un bastion de gauche : boutiques de luxe, bastions financiers, attractions touristiques et nombreux appartements cossus… La circonscription, résolument ancrée à droite, vote conservateur depuis 1950. Elle pourrait toutefois pour la première fois tomber aux mains du Parti travailliste. La candidate travailliste Rachel Blake devance d’une courte tête son homologue conservateur, Tim Barnes.
Londres refuse d’ouvrir une brèche dans le Brexit pour la mobilité des jeunes
« Le bilan des conservateurs à la tête du pays est absolument catastrophique, dit, au pied des tours de verre, une électrice en tailleur, perchée sur ses talons. Boris Johnson a été le pire Premier ministre que j’ai jamais connu et le Brexit est un désastre pour le pays. L’économie va mal, les services publics sont en lambeaux… Il est grand temps qu’ils quittent le pouvoir. » Travaillant dans un cabinet de conseil, elle se définit comme indépendante et affirme avoir déjà voté pour les conservateurs et les libéraux-démocrates (parti centriste) dans le passé, mais elle souhaite désormais donner sa chance aux travaillistes.
Un désenchantement croissant
Les conservateurs bientôt chassés de Londres ? Un sondage Ipsos ne donne à la droite que 4 sièges après le scrutin, contre 20 actuellement. Traditionnellement plutôt à gauche, la capitale connaît un désenchantement croissant à l’égard des conservateurs suite au Brexit, contre lequel les Londoniens ont voté à 60% (contre 48% des Britanniques).
« Le parti travailliste n’est pas parfait, mais c’est le parti qui me semble incarner le mieux les idéaux de justice, de liberté et d’égalité dont nous avons tant besoin en ce moment. » confie une femme portant un pin’s aux couleurs de la Palestine croisée non loin de l’abbaye de Westminster.
Un vote de démission
Les électeurs disposés à voter conservateur semblent le faire davantage par calcul ou par résignation que par conviction. “Je ne suis pas convaincu par le bilan des conservateurs, mais comme les travaillistes sont en passe d’avoir une forte majorité, je voterai quand même pour eux afin que nous maintenions un certain équilibre”, » dit un homme en costume-cravate qui travaille pour une banque d’investissement. Je n’aime pas quand les choses vont trop loin dans une direction.
Avec ses jolies maisons colorées, devant lesquelles s’alignent des voitures de luxe, ses rues propres et ses adolescents aux uniformes impeccables qui reviennent de leur école privée, on imagine mal que Chelsea vote à gauche. Les revenus des résidents y sont trois fois supérieurs à la moyenne nationale et il faut débourser plus de 2 millions de livres sterling (2,3 millions d’euros) pour y acquérir un logement. Mais ce quartier résidentiel pour familles aisées situé à l’ouest de Londres (circonscription électorale de Chelsea et Fulham) pourrait aussi connaître un basculement historique en faveur du Labour. L’élu conservateur Greg Hands est contraint de mener une campagne acharnée pour sa réélection face à son adversaire travailliste, Ben Coleman.
Conscients du désarroi que connaît le Parti conservateur auprès de l’opinion publique, les partisans de Greg Hands donnent l’impression de mener une campagne locale plutôt que nationale : « Greg Hands vit dans le quartier et a une conscience très claire des problèmes auxquels sont confrontés les résidents ; il se battra pour la communauté et les entreprises locales », nous raconte une jeune femme dynamique qui dirige un groupe de militants soutenant le candidat conservateur.
Un autre habitant du district qui vote traditionnellement pour les libéraux-démocrates affirme qu’il choisira les travaillistes pour des raisons tactiques : « Seul Coleman a une réelle chance de battre les conservateurs. C’est tout ce qui m’importe. »
