Visé par une plainte rejetée

Le débat houleux sur les nouvelles cartes des zones inondables empoisonne les relations entre élus de la banlieue nord de Montréal. Visé par une plainte à la police déposée par un maire, mais finalement rejetée, le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, dénonce une « manœuvre politique […] complètement inacceptable. »

Son départ fait suite au dépôt d’une plainte à la police début novembre par Sonia Fontaine, mairesse de Pointe-Calumet, en lien avec des propos tenus par la ministre qu’elle considérait comme menaçants.

C’est « indigne du rôle d’élu », répond M. Charette par courriel.

« Nous réfléchissons aux moyens qui peuvent être pris dans ce dossier. Ce genre de diffamation doit cesser », ajoute le ministre.

La dénonciation du ministre par l’élu municipal révèle le climat délétère qui règne dans cette région où la nouvelle réglementation québécoise toucherait un grand nombre de propriétés.

Avec plusieurs de ses conseillers, Sonia Fontaine est partie cet automne recueillir les signatures de ses citoyens, dont une majorité serait touchée par la modification des zones inondables. Elle voulait notamment que Québec tienne compte du fait que la municipalité qu’elle représente est protégée par une digue, ce qui n’est pas pris en compte, selon elle.

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PHOTO PRISE DU SITE DE POINTE-CALUMET

La mairesse de Pointe-Calumet, Sonia Fontaine

Un geste qui aurait déplu au ministre Benoit Charette, qui mène le dossier tout en représentant la circonscription de Deux-Montagnes, voisine de celle de Mirabel, où se situe Pointe-Calumet.

Lors d’une réunion en septembre avec plusieurs élus locaux, mais où Sonia Fontaine n’était pas présente, il aurait évoqué qu’elle devait arrêter sa démarche sous peine de « payer cher ». C’est du moins ce que dit la plainte de Sonia Fontaine, à qui les propos ont été rapportés, selon une Source proche du dossier.

Mis au courant des propos du ministre, le maire n’a rien fait et a déposé une plainte au Service de police du Lac des Deux-Montagnes au début du mois de novembre.

Dossier fermé

Par l’intermédiaire de son cabinet, Benoit Charette « réfute » avoir tenu ces propos et affirme que, selon lui, la plainte a été jugée « irrecevable » par la police. «Les personnes présentes à cette rencontre pourront confirmer que le ministre Charette n’a proféré aucune menace ni intimidation envers qui que ce soit», ajoute-t-on.

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PHOTO JACQUES BOISSINOT, CANADIAN PRESS ARCHIVES

Le ministre de l’Environnement, Benoit Charette

En fait, la police n’a pas jugé opportun de poursuivre l’affaire, la maire elle-même ayant indiqué dans sa plainte qu’elle ne souhaitait pas qu’une enquête soit menée sur le ministre, selon une autre Source qui connaît le contenu de la plainte.

« Il y a des événements qui ont été signalés à la police de Deux-Montagnes. À la volonté du plaignant et suite à l’analyse des faits, le dossier a été fermé sans suite », a confirmé l’inspecteur et porte-parole de la Régie, Jean-Philippe Labbé.

Rejoint par La presseSonia Fontaine n’a pas souhaité commenter le dépôt de sa plainte.

Le « devoir des élus »

Outre Benoit Charette, la réunion au cours de laquelle les propos litigieux auraient été tenus a également réuni le maire de Sainte-Marthe-sur-le-Lac, François Robillard, et la députée de la circonscription de Mirabel, Sylvie D’Amours.

Promu vice-président de l’Assemblée nationale depuis, Mmoi D’Amours a dû fermer son bureau de circonscription fin octobre pour une durée indéterminée. Le bâtiment avait été visé par des tirs de carabines à air comprimé.

Elle a ensuite évoqué des « problèmes de sécurité », liés notamment au débat autour des nouvelles cartes des zones inondables proposées par son gouvernement. «Depuis plusieurs semaines, des informations trompeuses circulent, semant la panique chez les citoyens des Basses-Laurentides et partout au Québec», avait-elle alors déclaré.

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PHOTO JACQUES BOISSINOT, CANADIAN PRESS ARCHIVES

The CAQ MP for Mirabel, Sylvie D’Amours

Déjà, à la mi-septembre, les tensions autour de ce dossier étaient vives, selon le ministre Benoit Charette. Le « devoir des élus de fournir une information juste à la population et fondée sur des faits » a notamment été évoqué lors de la rencontre avec le maire de Sainte-Marthe-sur-le-Lac, indique-t-il.

A cette époque, lui et la députée Sylvie d’Amours allaient publier une lettre ouverte dans un média local pour répondre aux « inquiétudes des citoyens » liées à cette réforme.

« Installer la peur »

Le texte visait également à répondre à une autre lettre publiée quelques mois plus tôt dans le même média, celle-ci de la mairesse Sonia Fontaine et de son équipe de conseillers municipaux. Le Québec a été accusé de « susciter la peur et l’inquiétude financière » avec sa réforme.

En vertu de cette nouvelle réglementation, rendue nécessaire par les inondations majeures de 2017 et 2019, quelque 15 500 bâtiments se retrouvent désormais dans des secteurs à risque dans la grande région de Montréal, soit deux fois plus qu’avant.

Au total, 77 000 logements pourraient être touchés par la nouvelle réglementation, soit trois fois plus qu’actuellement, a annoncé Québec en juin. Les maisons de certains propriétaires ne vaudront plus rien, s’inquiétaient récemment les élus municipaux1.

La situation touche particulièrement les municipalités de la banlieue nord de Montréal, comme Pointe-Calumet, où 97 % du territoire est identifié comme zone inondable.

« Il va y avoir de terribles tragédies financières. Le gouvernement devra justifier ses décisions, même s’il est censé être un gouvernement responsable », a déclaré Sonia Fontaine en octobre dernier.

Avec Daniel Renaud, La presse

1. Lire le dossier « Nouvelles zones inondables : « leurs maisons ne vaudront plus rien » »

 
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