Par
Ludivine Laniepce
Publié le
24 novembre 2024 à 16h50
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« Nelly, 50 ans ; Nadège, 48 ans ; Isabelle, 36 ans ; Sandra, 36 ans ; une femme de 22 ans ; une femme de 95 ans ; Aline, 39 ans ; Zohra, 38 ans… »
La liste est longue, 136 prénoms (quand ils sont connus) au total. Une liste douloureuse répertoriée sur samedi 23 novembre 2024 sous les fenêtres de tribunal judiciaire de Cherbourg-en-Cotentin (Manche) : celles des prénoms de 136 femmes mortes en 2023 dans France.
Et déjà 122 au 20 novembre 2024. En France, depuis l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron, qui a fait de la lutte contre les violences basées sur le genre la priorité de son mandat, plus de 1 000 femmes ont été assassinées par un homme, souvent leur conjoint. Et rappelons aussi qu’en France, toutes les 3 minutes, un enfant est victime d’inceste, de viol ou d’agression sexuelle.
Des foulards blancs sont attachés à la balustrade qui longe le palais de justice du rue des Tribunals. Chacune porte le prénom d’une de ces femmes disparues sous les coups et les violences.
Relance du plan Angela
Un peu plus tôt, dans la matinée, le rendez-vous a été pris au salle de fête de Cherbourg à l’invitation de l’Association des Femmes, du Planning Familial Manche et de l’antenne cherbourgeoise du Centre LGBTI Normandie.
« Cette journée est dédiée à la lutte contre les violences faites aux femmes et contre toutes les formes de discriminationrappelle Anne Ambrois, adjointe chargée des centres sociaux à Cherbourg-en-Cotentin. Il s’agit de sensibiliser le public les violences sexistes et sexuelles, libérer la voix des victimes et témoins et faire connaître toutes les ressources qui existent. »
Dans la chambre, un objet dans un panier attire l’attention d’une travailleuse dans un service public. Il s’agit d’un sifflet plat appelé « Repousse relou », développé par le Calvadosien Quentin Duteil.
Sur la table sont également prévus des fiches, des autocollants, des numéros utiles… Devant un « violenmeter », un baromètre de la violence qui s’étend du vert au rouge selon les comportements, cette fonctionnaire glisse qu’elle déposera certaines de ces informations au travail. « Nous entendons circuler des histoires de femmes maltraitées… »
La Ville est mobilisée tout au long de l’année sur ces questions. Cette année, nous relançons Angèle, opération que nous soutenons, nous relançons les établissements. Nous communiquons avec le grand public et les commerçants, nous essayons de faire en sorte que le plus grand nombre connaisse Angela.
Le plan Angela permet aux victimes de harcèlement de ruesentiment suivi ou menacétrouver refuge chez un commerçant et demandez « Angela ». Le commerçant ou son personnel comprend de quoi il s’agit réellement et vient alors en aide à la personne en difficulté.
Pour l’élu, il s’agitun combat quotidien : « Il faut en parler, le mettre en mots, inciter les gens à parler, à comprendre ce qu’ils vivent au quotidien. Chaque femme connaîtra une violence différente. La parole se libère mais les chiffres restent effrayants. »
The turning point Gisèle Pélicot
Près de 200 personnes ont ensuite quitté la salle pour défiler en cortège à travers la ville jusqu’à la rue des Tribunaux. Plusieurs syndicatsétaient également présents : CGT, FSU, CFTC et Sud-Solidaires.
Des actions sont organisées chaque 25 novembre mais c’est la première fois que nous parvenons à avoir un collectif composé de jeunes femmes, d’associations, du planning familial, du Centre LGBTI, de cette intersyndicale… C’est très satisfaisant. Nous avons organisé cet événement ensemble. Je crois que ce qui nous mobilise aussi, c’est le procès Mazan et le courage de Gisèle Pélicot. Je suis confiant, je crois que cela devrait changer les choses. Le monde entier s’est emparé de cette histoire. Maintenant, cela doit aussi pousser les politiciens.
Depuis sa création il y a plus de 40 ans à Cherbourg, l’Association des Femmes n’a jamais connu un taux de remplissage de ses places d’accueil inférieur à 100 %. « Aujourd’hui, nous disposons de 40 places d’insertion et 18 d’urgence. Ça a toujours été comme ça», ajoute le militant.
« On a estimé qu’il serait nécessaire 2,6 milliards d’eurossoit 0,5% du budget de l’État lutter efficacement contre le meurtrede tous ceux qui ont été tués à cause de leur identité sexuelle», poursuit Martine Côté-Colisson.
Arrivée devant le tribunal judiciaire, une manifestante tient dans ses mains une pancarte violette sur laquelle il est écrit : « 65 % des victimes avaient saisi la justice. »
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