« Si je ne suis pas respecté en France, je retournerai au Mali ! » – .

« Si je ne suis pas respecté en France, je retournerai au Mali ! » – .
« Si je ne suis pas respecté en France, je retournerai au Mali ! » – .

Dramane est malheureux. Sans titre de séjour ni emploi, il survit ici et là en région parisienne depuis 2019, année de son arrivée du Mali. Il loge dans un hôtel social « où il y a toujours du bruit ». Le 24 mai, à Claye-Souilly (Seine-et-Marne), l’homme tombe en panne et s’en prend à deux enfants. Puis, armé d’un couteau, il a « repoussé la foule ».

Intérieur du TJ de Meaux ©I. Horlans

L’interprète appuie son épaule droite contre la vitre du box des prévenus en salle 3e chambre criminelle du tribunal judiciaire de Meaux. Il traduit à Dramane le récit des faits qui lui sont reprochés : violences sur mineurs de 11 et 13 ans ; violence contre les adultes qui sont intervenus. Le tout sans incapacité de travail, même si un homme a été blessé à une main et à un orteil. L’accusé comparaît devant la police car il n’a pas respecté le contrôle judiciaire lui interdisant de revenir sur les lieux de l’altercation. Le 27 mai, trois jours après son arrestation, le Malien de 21 ans a regagné la chambre d’hôtel où il était hébergé gratuitement par une association d’aide aux immigrés. C’est aussi l’objet de sa première objection : « C’est l’endroit où j’habite ! » Comment un juge peut-il m’empêcher de dormir à la maison ? »

La patience des magistrats sera mise à rude épreuve tout au long du procès en raison de l’incompréhension de Dramane sur les droits et devoirs de chacun. Par exemple, « saisir par le col » une jeune fille de 11 ans qui « a ressenti une sensation d’étranglement », « tirer par les cheveux » le frère de 13 ans qui la défendait, « les menacer avec un couteau de cuisine ». comme indiqué dans le rapport, ne signifie pas, à ses yeux, qu’il a « violé des enfants ».

« J’avais peur de la foule. Mais je n’ai piqué personne ! »

Il nie donc, sans avocat, avoir commis des actes répréhensibles : « Il y a toujours du bruit dans cet hôtel. Les enfants crient et me cherchent. Il était plus de 21 heures ! À quelle heure dorment-ils ? » Le président reconnaît volontiers que « la situation est difficile » dans ce type d’établissement, mais « il existe d’autres moyens de la résoudre. En parlant, notamment. Dramane : « Oui, c’est la meilleure méthode mais ils ne m’entendent pas. Je suis allé leur demander d’arrêter de crier, ils m’ont dit de sortir, ils se sont moqués de moi !

– Avez-vous, oui ou non, attrapé la fille et tiré le garçon par les cheveux ?

– Oui.

– Ce sont donc des éléments constitutifs de la violence.

– J’ai été l’objet de moqueries…

– Les adultes intervenus disent que vous étiez agité. Un employé de l’hôtel a dû vous retenir parce que vous étiez très virulent.

– C’est un résident, pas un employé ! Il m’a provoqué.

– Qu’en est-il de l’autre personne qui a été blessée lorsque votre couteau s’est cassé ?

– Il s’est blessé en tombant.

– Eh bien, je ne sais pas si on va y arriver, dit Stéphane Léger.

Le juge-assesseur Guillaume Servant, le suivant : « Pourquoi portiez-vous un couteau ?

– Je l’avais comme ça.

– En garde à vue, vous avez indiqué que vous deviez vous défendre. Contre qui ?

– J’avais peur de la foule. Je l’ai repoussée. Mais je n’ai piqué personne !

– Nous ne sommes pas aux USA. Nous ne nous promenons pas armés.

– C’était un couteau de cuisine… »

« Et si les enfants n’écoutent pas ? »

Zoé Debuse, procureure adjointe, tente à son tour de faire comprendre à Dramane « qu’on n’a pas le droit de frapper les enfants. Même si nous sommes les parents.

– Que faire alors si les enfants n’écoutent pas ? »

Interrogé sur sa vision globale de « la situation », il répond sèchement : « Je n’ai rien à dire. » Le psychiatre qui l’a examiné n’a « détecté aucun trouble altérant son jugement » et n’a pas « recommandé de traitement ». Reste donc à étudier son chemin de vie, vite résumé : la misère, et encore la misère. Même si Dramane n’a pas de casier judiciaire, il est néanmoins en situation irrégulière depuis 2019.

« Avez-vous fait une demande de régularisation ?

– Oui.

– Quel est votre statut? Avez-vous un titre de séjour ?

– Non, j’ai juste un reçu.

– De quoi vis-tu ?

– L’État me donne une allocation, l’association me loge dans un hôtel. Parfois, je fais un travail.

– Jusqu’à quand serez-vous accompagné ?

– Ce n’est pas précisé.

– Si tu es libéré ce soir, où iras-tu ?

– Je ne sais pas. »

Et ainsi de suite.

« Vous quittez le département ce soir, c’est compris ? »

A l’issue du dialogue des sourds, le procureur a réclamé “la moins pire solution” : six mois de prison sous le régime de semi-liberté, 100 euros d’amende, interdiction de réapparaître à Claye-Souilly. Elle prend en compte « sa perception de la réalité qui est différente » de la scène filmée, et sa méconnaissance des obligations de citoyen.

Dramane est en colère : « Si je ne suis pas respecté en France, je retournerai au Mali ! J’accepte de retourner dans mon pays. »

Il a finalement été condamné à six mois de prison avec sursis simple, 100 euros d’amende et interdiction, pendant trois ans, de contacter les victimes et de séjourner en Seine-et-Marne. « Avec exécution provisoire », lui a dit le président. Cela signifie que vous quittez le département ce soir. C’est compris ? »

Il dit oui. Et part avec la police. Il n’a pas d’avocat pour lui expliquer qu’il a toujours le droit de récupérer son petit colis à l’hôtel où vivent des résidents dans la même situation que lui.

 
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