Petite enfance, gros problèmes | La presse

Petite enfance, gros problèmes | La presse
Petite enfance, gros problèmes | La presse

J’ai évoqué samedi le manque de promotion du métier d’éducateur qui pousse un grand nombre d’entre eux à quitter le navire de la petite enfance pour se tourner vers un métier plus rémunérateur et offrant de meilleures conditions de travail.1.

Les données du ministère de la Famille rendues publiques par Radio-Canada cette semaine sont frappantes : au cours des trois dernières années, quelque 10 000 éducateurs ont quitté leur profession au Québec pour travailler ailleurs. Rien que l’année dernière, il y a eu près de 4 000 départs permanents.

Cela signifie que chaque jour, en moyenne au Québec, une dizaine de personnes quittent leur emploi en services de garde éducatifs à l’enfance.2.

Pourquoi abandonnent-ils ? D’autant que le gouvernement lui-même semble les avoir abandonnés en dévalorisant un métier aussi important et en mettant à mal le réseau des centres de la petite enfance.

Le premier symptôme de ce manque de considération est la faiblesse des salaires, qui rend l’éducation de la petite enfance peu attractive.

Comment pouvons-nous attirer des éducateurs qualifiés s’ils peuvent gagner plus d’argent pour un travail beaucoup moins exigeant chez Costco ou comme serveuse ? Comment les retenir s’ils peuvent bénéficier de meilleures conditions de travail et de congés tout l’été en travaillant en milieu scolaire ?

Contrairement aux idées reçues à ce sujet, le travail d’un éducateur n’est pas moins complexe que celui d’un enseignant.

Il est faux de croire que quiconque ou son voisin qui aime un peu les enfants puisse devenir du jour au lendemain un éducateur professionnel. Il ne s’agit pas seulement de surveiller les petits pendant que leurs parents travaillent. Les études scientifiques le prouvent : pour que l’impact sur le développement de l’enfant soit positif, il faut de la formation, de la pédagogie et des compétences spécifiques.

type="image/webp"> type="image/jpeg">>>

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE ARCHIVES

Lise Lemay, professeure et chercheuse au département de didactique de l’UQAM et directrice scientifique de l’équipe de recherche Qualité des contextes éducatifs de la petite enfance

« Nous parlons de la petite enfance, en particulier des trois premières années de la vie, comme d’années charnières car le cerveau se développe à un rythme très rapide. Il est donc important de stimuler l’enfant, de lui offrir des expériences variées à cet âge », explique Lise Lemay, directrice scientifique de l’équipe de recherche Qualité des contextes éducatifs de la petite enfance.

Non, les éducatrices ne sont pas que des baby-sitters, rappelle la professeure et chercheuse au département de didactique de l’Université du Québec à Montréal (UQAM).

Ce sont des professionnels qui savent ce qu’ils font. Ils sont capables d’observer l’enfant, d’améliorer le matériel pédagogique proposé, de planifier des activités pour accompagner l’enfant et l’emmener plus loin, réfléchir à ce qui fonctionne ou non, de la même manière qu’un enseignant peut le faire en classe.

Lise Lemay, professeure et chercheuse au département de didactique de l’UQAM

En fait, le travail est si complexe que certains pays exigent une formation universitaire encore plus avancée pour les éducateurs de la petite enfance.

C’est particulièrement le cas en Islande, qui nécessite cinq années d’études universitaires spécialisées, l’équivalent d’un master en éducation de la petite enfance.

L’Australie, de son côté, a commencé à mettre en place des programmes universitaires de troisième cycle pour compenser les insuffisances de la formation initiale de premier cycle requise.

Au Québec, le cheminement classique menant à la qualification est un programme collégial de trois ans en techniques d’éducation de l’enfance. Mais la pénurie de main-d’œuvre signifie que le gouvernement tolère une diminution dangereuse du ratio de personnel éducatif qualifié, comme l’a souligné le vérificateur général en mai dernier.3. Ce qui alimente un cercle vicieux.

On parle de places en garderie comme on parle de places de stationnement. On se soucie peu de la qualité de ces lieux qui sont en chute libre.

À l’heure où 21 % des crèches et près de 60 % des crèches (subventionnées et non subventionnées) échouent au test de qualité du ministère de la Famille, cela devrait pourtant être fondamental.

En fin de compte, tout se passe comme si on avait oublié que l’éducation de la petite enfance était avant tout… l’éducation. Pas une entreprise ou un dépanneur, mais un service public. Ce n’est pas un luxe, mais un droit : le droit à l’éducation des plus petits, qui n’est pas moins important que celui des enfants plus âgés.

Pour être honnête, je n’ai jamais vraiment compris pourquoi les services éducatifs à la petite enfance ne faisaient pas partie du système éducatif.

Ne serait-il pas souhaitable qu’il en soit ainsi ? Ce serait une solution à considérer, à condition de s’assurer que la pédagogie propre à la petite enfance, les ressources et la voix des tout-petits ne soient pas engloutis par tout ce qui concerne les enfants d’âge scolaire, estime Lise Lemay.

« Faire partie du ministère de l’Éducation permettrait, entre autres, de pérenniser le financement des services, de bénéficier de la valorisation sociale qui accompagne l’éducation, de promouvoir l’universalisme, peut-être même d’avoir plus de ressources pour soutenir les enfants ayant des difficultés particulières. besoins…”

La Commission européenne vient de publier un rapport sur la qualité éducative, cosigné par un chercheur québécois, qui formule une recommandation en ce sens : abandonner le type de système qui sépare l’éducation des tout-petits et celle des élèves du primaire. l’âge scolaire pour promouvoir un âge où la petite enfance, l’enfance et l’adolescence sont intégrées sous l’égide d’un même ministère, tout en conservant leurs propres couleurs et leur voix distincte4.

Cela ne résoudrait pas tous les grands problèmes de la petite enfance d’un coup de baguette magique. Mais peut-être que cela permettrait de cesser de considérer l’éducation des tout-petits comme une sous-catégorie négligeable qui peut facilement s’appuyer sur une « main-d’œuvre bon marché » et des services privés de qualité médiocre.

1. Lire la chronique « Si la petite enfance était une priorité »

2. Lire l’article de Radio-Canada « Du CPE à Costco : 4 000 éducateurs ont quitté leur profession l’an dernier »

3. Lire l’article « CPE et garderies : des services éducatifs déficients, moins d’éducatrices qualifiées »

4. Consultez le rapport

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV sept individus arrêtés et incarcérés à Toulouse
NEXT Cressensac-Sarrazac. Le projet de rénovation de l’épicerie dans les délais