Devoir de mémoire. Une centaine de lycéens normands se préparent à l’indicible à Auschwitz

Depuis 2014, la Région Normandie organise, en partenariat avec le Mémorial de la Shoah, un voyage d’études à Auschwitz (Pologne) pour des lycéens. Depuis, chaque année, l’opération est renouvelée dans le cadre du devoir de mémoire. Jusqu’en 2021, ce voyage s’effectuait en une journée. Depuis, cela a duré deux jours. Avec une première journée de préparation à la visite des camps d’extermination d’Auschwitz I et d’Auschwitz II-Birkenau.

Il fallait, ce 20 novembre 2024, en complément des travaux entrepris dans les différents établissements de cette centaine de jeunes depuis la rentrée, absorber en partie le choc de la découverte de ces lieux d’horreur, de l’indicible. , où près d’un million de Juifs ont été assassinés par les nazis.

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Arrivés à Cracovie en toute fin de matinée, ils se séparèrent en cinq groupes, comme autant de classes et lycées de tous les départements normands, menés chacun par un guide conférencier à travers les rues de cette grande ville où vivaient 250 000 habitants à l’entrée de l’armée allemande le 6 septembre 1939. Parmi eux, 68 000 Juifs. Un quart de la population. Presque entièrement décimé par la barbarie. Seulement 3 000 survivants.

Des lycéens normands, lors de leur journée préparatoire au voyage à Auschwitz dans le cadre d’un voyage d’études organisé par la Région et le Mémorial de la Shoah, devant ce qui reste du mur du ghetto de Cracovie. Sa forme rappelle celle des pierres tombales des cimetières juifs. Forme prémonitoire souhaitée par le gouverneur général allemand de Pologne, basé à Cracovie. | OUEST-FRANCE
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Des lycéens normands, lors de leur journée préparatoire au voyage à Auschwitz dans le cadre d’un voyage d’étude organisé par la Région et le Mémorial de la Shoah, devant ce qui reste du mur du ghetto de Cracovie. Sa forme rappelle celle des pierres tombales des cimetières juifs. Forme prémonitoire souhaitée par le gouverneur général allemand de Pologne, basé à Cracovie. | OUEST-FRANCE

Histoire d’une civilisation

Ancienne synagogue (construite au XVe siècle, ce qui en fait la plus ancienne de Pologne, aujourd’hui transformée en musée) dans le quartier de Kazimierz, où vécut la future industrielle des cosmétiques Helena Rubinstein, ghetto d’où le petit Roman Polanski réussit à s’exfiltrer, les jeunes Normands ont pu mesurer l’ampleur du séisme que représentait l’occupation nazie pour cette communauté martyre.

« Nous commençons ici par bien comprendre à quoi ressemblait le monde juif avant la Seconde Guerre mondiale et l’objectif des nazis d’éradiquer les Juifs de la surface de la terre avec la Shoah. résume Olivier Lalieu, historien au Mémorial de la Shoah. Leur présence est très ancienne, en Pologne, au cœur du continent européen, les Juifs étaient au nombre de près de 3,5 millions, c’est le pays d’Europe où ils étaient le plus nombreux. »

Le spécialiste parle aux lycéens de l’importance de cette culture, de cette civilisation, de cette philosophie de la plus ancienne religion monothéiste « qui a irrigué tout le reste et dont dérivent à bien des égards le catholicisme et l’islam », de sa diversité aussi : « Les Juifs ne représentaient pas un groupe uniforme. » Les jeunes s’abreuvent de ses paroles, ouvrent grand les yeux, arpentent ces rues où la terreur se déchaîne.

“Ils vont être contrariés”

« Je les ai trouvés curieux, malgré une approche pas si simple du judaïsme » apprécie Valérie Maray. Elle enseigne l’histoire au campus horticole de Coutances (Manche), raconte avoir mené ce projet avec ses étudiants pour « Le devoir de mémoire est tellement important pour leur montrer ce que c’est. Avant de venir, nous avons organisé une vidéo avec Ginette Kolinka (un des derniers survivants de Birkenau), c’était extraordinaire. Elle les a beaucoup touchés par ses paroles, la force de son témoignage. »

Lycéens normands, cinq classes invitées par la Région en voyage d’études à Auschwitz, dans le bureau d’Oskar Schindler, Juste parmi les Nations qui sauva 1 200 juifs des camps de la mort. | OUEST-FRANCE
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Lycéens normands, cinq classes invitées par la Région en voyage d’études à Auschwitz, dans le bureau d’Oskar Schindler, Juste parmi les Nations qui sauva 1 200 juifs des camps de la mort. | OUEST-FRANCE

Cette première journée spéciale s’est terminée par une visite du musée historique de la ville, situé dans ce qui fut l’usine d’Oskar Schindler, l’homme du film La Liste de Schindler de Steven Spielberg, qui sauva de la mort 1 200 Juifs. «Je n’ai pas vu ce film, avoue Justine Leroux, du lycée horticole de Coutances, mais j’ai vu Un sac de billes et Le pyjama rayé. Je le regarderai dès mon retour à la maison. » La lycéenne qui pensait « je sais bien le sujet avant ce voyage », se dit « choqué » de ce qu’elle a vu. Savant.

La jeune fille a «J’ai regardé mardi un documentaire sur la libération des camps», s’attend au pire ce jeudi : « Là, je vais être là, me retrouver là où ces horreurs se sont produites et je n’arrive pas à me le mettre en tête, je n’y crois pas encore. » Son professeur d’histoire a un peu peur. «J’ai déjà suivi un cours à Dachau. Je sais qu’ils seront contrariés. »

Le couloir de l’horreur, au sein du musée d’histoire de Cracovie, ville polonaise où seuls 3 000 Juifs ont survécu à l’holocauste. Sur 68 000 il y en avait avant l’arrivée des nazis en septembre 1939. | OUEST-FRANCE
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Le couloir de l’horreur, au sein du musée d’histoire de Cracovie, ville polonaise où seuls 3 000 Juifs ont survécu à l’holocauste. Sur 68 000 il y en avait avant l’arrivée des nazis en septembre 1939. | OUEST-FRANCE

Les classes concernées cette année : 1er baccalauréat professionnel Agora au lycée Mézeray-Gabriel d’Argentan, Terminal gestion des techniciens conseils en production horticole et vente alimentaire au lycée Métiers nature de Coutances, 2e – 1concernant – Dernière année au lycée Léopold Sédar Senghor d’Évreux, dernière année d’histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques au lycée Jeanne-d’Arc de Rouen, 1er baccalauréat professionnel cuisine au lycée Jean-Jooris de Dives -sur-Mer.

 
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