«J’aime toujours faire des pas de côté»

«J’aime toujours faire des pas de côté»
«J’aime toujours faire des pas de côté»

UNRécompensé d’un disque d’or pour son brillant dernier album (« Tirer la nuit sur les étoiles »), le musicien et chanteur Étienne Daho montera sur la grande scène du festival Sœurs Twins, le samedi 29 juin. L’occasion de se confier sur les rapports entre image et la musique dans son univers artistique.

Après avoir visité le Zénith et l’Arena cet hiver, vous partez en tournée en festivals…

Cela a déjà commencé, avec carte blanche au festival Art Rock de Saint-Brieuc, où j’ai pu inviter des musiciens mais aussi les photographes Richard Dumas et Antoine Giacomoni, le cinéaste Gaël Morel, le comédien Antoine Carlier, etc.

Le concert du festival est une nouvelle version plus courte du « Daho Show ». La scène a été simplifiée pour être plus transportable et faciliter les changements de décors. Mais nous avons conservé la proposition spectaculaire et le maximum d’éléments visuels : projections, lumières, images… J’ai toujours été préoccupé par l’environnement scénique et visuel, que je souhaite pouvoir contrôler et ressentir en phase avec la proposition musicale. J’ai travaillé avec le collectif Mathématiques qui a beaucoup apporté au spectacle.

« La pochette d’un disque est fondamentale : le lien est très étroit entre l’image proposée et le contenu musical »

Le festival Twin Sisters qui vous attend à Rochefort est dédié à la relation entre le son et l’image. Quelle place le visuel a-t-il dans votre univers musical ?

J’y ai toujours attaché une grande importance. La pochette d’un disque est fondamentale : le lien est très étroit entre l’image proposée et le contenu musical. Lorsque l’on travaille avec un photographe pour la « vitrine » de l’album, une véritable collaboration artistique s’installe. Et j’ai eu la chance de faire de belles rencontres et des reprises durables. Je pense à Inez van Lamsweerde pour « Corps & Armes », Pierre & Gilles pour « La notte, la notte », Nick Knight pour « Paris ailleurs »…

Il en va de même pour les clips, même si l’exercice s’avère plus aléatoire : entre le discours d’un réalisateur sur ses intentions et le résultat final, il peut y avoir des désillusions. J’essaie de contrôler les choses au maximum mais, sur un tournage, on ne peut pas tout contrôler.

Mais là aussi, j’ai eu beaucoup de chance : quand j’ai commencé, j’ai tout de suite travaillé avec des réalisateurs comme Jean-Pierre Jeunet, Philippe Gauthier… A cette époque, les réalisateurs étaient très heureux de faire des clips. Ce n’était pas un pis-aller dans l’espoir que cela leur permettrait ensuite de réaliser un long métrage ou des publicités. Certains s’y sont entièrement consacrés et se sont révélés excellents. Comme aujourd’hui les deux brillantes filles du collectif L’Étiquette.

« Composer pour le cinéma m’intéresserait car j’aime toujours prendre des marges, entreprendre des choses que je ne connais pas »

Nous savons que vous êtes un cinéphile. Avec quelle musique de film avez-vous grandi ?

Je pense à « Petit-déjeuner chez Tiffany’s » [« Diamants sur canapé » de Blake Edwards, avec la chanson « Moon River », reprise par Daho, NDLR]des compositeurs comme John Barry, Henry Mancini, François de Roubaix bien sûr…

Vous avez cité le film « Love is the Devil » parmi vos films et sources d’inspiration préférés…

Oui, c’est un travail absolument fantastique. Ce film de John Maybury raconte la relation entre le peintre Francis Bacon et sa muse George Dyer. J’ai trouvé ce DVD à Brighton dont le titre a retenu mon attention.

Francis Bacon était devenu un de mes maîtres absolus depuis que Serge Gainsbourg m’avait offert un livre de reproductions de ses œuvres. Nous nous en sommes également inspirés pour le clip « Horse Hindus ».

J’ai adoré « Love is the Devil », qui a été le point de départ de l’album « Songs of Innocence Recovered » et a inspiré deux chansons. L’un d’eux s’appelle « Bleu Gitanes » et est nouveau. Elle figurera sur la version augmentée de cet album qui sortira en septembre prochain.

Avez-vous déjà composé pour le cinéma ?

Mes chansons ont souvent été utilisées dans des films, mais j’ai rarement composé directement pour le cinéma. Un petit bout pour « Une histoire d’amour » d’Hélène Fillières avec Lætitia Casta et Benoît Poelvoorde [sorti en 2013, NDLR].

En fait, cela ne m’a jamais vraiment été proposé. Ou alors c’était par moments où j’étais trop occupé : en écrivant un album pour moi ou pour les autres, par une tournée… Mais dans l’absolu, ça m’intéresserait parce que j’aime toujours prendre des marges, entreprendre des choses que je ne connais pas. Cela enrichit également mon travail.

Idem, on vous a rarement vu en comédien, depuis « Désordre » d’Olivier Assayas…

Non, c’est vrai (rires). J’ai joué dans “Jeux d’artifice”, un film très arty de Virginie Thévenet [en 1987]. Je me souviens avoir été déguisée en Mona Lisa. Je n’en avais pas rêvé, mais c’était amusant car beaucoup de gens que je connaissais participaient à ce film inspiré des « Enfants terribles » de Jean Cocteau.

Depuis, on m’a proposé plusieurs fois des films, voire un premier rôle avec Christophe Honoré. Mais cela ne me tente pas. La musique permet une liberté totale : vous vous mettez en scène et vous restez le maître des horloges. Pas au cinéma. J’adore ça, mais surtout en tant que spectateur.


Étienne Daho : « La musique permet une liberté totale : vous vous mettez en scène et vous restez le maître des horloges. »

Peter Angelo Carlotti

Quels sont vos projets pour les prochains mois ?

A la fin de l’année, nous allons diffuser en live le concert de Bercy. Accepter de jouer dans cette immense salle a été une étape pour moi. Et je trouve intéressant de conserver des documents sur les choses que nous faisons. Les disques de concert présentent des arrangements musicaux et une énergie différente de celle des enregistrements en studio.

Mais je suis déjà en train d’écrire et de produire un album pour quelqu’un d’autre que moi. Avec la préparation de la version augmentée de « Songs of Innocence Recovered », le mastering du disque live et la tournée du festival, c’est beaucoup de choses à la fois.

A Rochefort du 25 au 30 juin

Imaginé et animé par la comédienne et productrice Julie Gayet, le festival des Sœurs Jumelles de Rochefort célèbre la rencontre de l’image et du son. Au programme, des concerts avec MC Solaar, Olivia Ruiz, Clara Ysé, Imany, un hommage à la chanteuse Dani avec Keren Ann, Jil Caplan et Émilie Marsh, des avant-premières, mais aussi des rencontres avec des créateurs, comme les cinéastes Jacques Audiard ou Dany. Boon, la chanteuse Camille et le compositeur Clément Ducol, etc. Les figures tutélaires (Jacques Demy et Michel Legrand) seront présentes à travers de nouveaux documentaires et un concert dédié au compositeur des « Demoiselles de Rochefort ».
www.soeursjumelles.com

 
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