L’axe Paris-Rabat mis à l’épreuve aux législatives françaises

L’axe Paris-Rabat mis à l’épreuve aux législatives françaises
L’axe Paris-Rabat mis à l’épreuve aux législatives françaises

” CONTRE“C’est un tremblement de terre, un choc électrique”, déclare un journaliste marocain sur une radio nationale en commentant les résultats des élections européennes. Et de poursuivre : « Jamais auparavant nous n’avions assisté à une montée aussi importante des populistes dans l’Union européenne. » Preuve s’il en était que les effets du séisme politique qui secoue l’Europe, et la France en particulier, se font sentir bien au-delà des frontières du Vieux Continent. La poussée nationaliste lors des élections européennes continue de susciter de nombreuses réactions sur la rive sud de la Méditerranée.

Vivre au Maroc et voter RN : contradictoire ?

Notamment au Maroc où l’annonce surprise du président français Emmanuel Macron de dissoudre l’Assemblée nationale, après la proclamation des résultats donnant l’extrême droite en tête, continue d’agiter le débat.

Et pour cause : si les Français résidant dans le royaume chérifien placent largement le parti de La France insoumise (LFI) en tête du scrutin avec 3 350 voix, soit 38 % sur plus de 41 274 inscrits sur les listes électorales, les partis L’extrême droite a connu de nets progrès. “Même si le taux de participation a été disparate selon les villes, les élections ont donné des résultats intrigants, illustrant des tendances variées et des dynamiques politiques disparates”, observe le quotidien francophone. Inspirations écolo.

Si le LFI a dominé dans plusieurs villes marocaines, comme Fès, Casablanca, Rabat et Tanger, le RN, quant à lui, a affiché une présence significative à Agadir et Marrakech, où il a obtenu des scores plus élevés. Mais c’est surtout le choix électoral des Français d’Agadir qui surprend, où 23% des électeurs ont voté RN.

Ces résultats en ont surpris plus d’un dans le royaume chérifien, dont l’écrivain Fouad Laroui, qui a intitulé sa tribune publiée sur le site d’information Le360 : « Pourquoi Agadir vote-t-elle RN ? » Le célèbre auteur marocain ne cache pas son étonnement : « … tout cela ne nous concerne pas, pour peu que cela s’exprime à Trécon dans la Marne ou à Saligos dans les Hautes-Pyrénées. Mais à Agadir ? Agadir! Je suis presque né là-bas, à Agadir. »

Toutefois, si l’on prend en considération le taux d’abstention très élevé, ces chiffres ne sont pas représentatifs, selon Mehdi Alioua, sociologue, spécialiste des migrations à Sciences Po Rabat de l’Université internationale de Rabat (UIR). Interrogé par le média électronique Yabiladi, le sociologue apporte une explication liée au fait qu’« une partie des Français installés là-bas sont des retraités ou des entrepreneurs ». Autrement dit : « Les Français qui viennent là-bas pour le soleil, pour faire des affaires et finalement la question marocaine les intéresse peu. En fin de compte, ce qu’ils aiment au Maroc, ce sont les hiérarchies sociales assez fortes puisque nous avons des inégalités sociales importantes et le fait que nous ne sommes pas une démocratie libérale. Cela va donc bien avec leur idéologie. Vivre au Maroc et voter pour le Rassemblement national n’est pas du tout contradictoire”, a-t-il ajouté.

L’onde de choc de la dissolution retentit jusqu’à Rabat

L’onde de choc de la dissolution continue de secouer même au-delà de l’espace européen. “La France se trouve à un carrefour critique, et le monde entier observe avec une attention soutenue la suite des événements qui pourrait nous surprendre encore plus que la roulette russe que Macron donne l’impression d’apprécier”, lit-on dans un éditorial de l’information diplomatique marocaine. site, où l’auteur qualifie la décision du président français de « pari à haut risque ».

Cette décision présidentielle, aux conséquences multiples, bouscule déjà l’agenda politique. Prévue en juillet, la visite à Rabat du chef du gouvernement, Gabriel Attal, a en effet été annulée, comme le rapporte le site d’information atlasinfo.fr. Le responsable français, qui devait participer à la haute commission mixte entre les deux pays et préparer la visite du chef de l’Etat au Maroc, doit désormais mener la campagne pour des élections législatives anticipées.

Et si la montée de l’extrême droite n’était pas forcément une mauvaise nouvelle pour Rabat ? Le quotidien francophone Avis souligne que la LFI ne doit pas être réduite à son leader et considérée comme un allié du Royaume. « L’attitude des députés européens de LFI, dont sa tête de liste, Manon Aubry, montre le contraire. Elle qui a voté pour toutes les résolutions anti-marocaines au Parlement européen», rappelle l’auteur de cet article, Anass Machloukh. Alors que le RN a déjà exprimé « des propositions en faveur de l’intégrité territoriale du Royaume », explique-t-il.

Ce tournant majeur de la politique française, il faut le dire, concerne de près le Maroc, qui attend la reconnaissance de son intégrité territoriale. C’est dans ce sillage que le directeur de la publication du site Panorapost, Aziz Boucetta, rappelle les propos de Marine Le Pen en 2022, sur sa politique étrangère : « Je souhaite entretenir et enrichir les relations avec les trois pays du Maghreb… avec le Le Maroc qui nous est cher. »

Toutefois, le Maroc ne peut pas être sélectif dans le choix des orientations idéologiques de ses alliés. Pour lui, « si le RN accède au gouvernement et le dirige, et s’il décide de reconnaître le Sahara occidental pour ce qu’il est, c’est-à-dire marocain, ce sera la France d’extrême droite qui l’aura fait. Mais dans la France d’extrême droite, il y a la « France », et c’est l’essentiel.»

Quel avenir pour l’axe Rabat-Paris ?

Les élections législatives, comme tout autre type d’élection, soulèvent des enjeux variés et complexes, notamment sur le plan géopolitique. Qu’en est-il de la relation France-Maroc, qui vient de commencer à connaître une période de réchauffement ces derniers mois ?

Interrogé par Point Afrique, le politologue marocain Zakaria Aboudahab estime que l’avenir des relations Maroc-France dépend de deux forces structurantes, en premier lieu l’ancrage européen de la France. « Les relations bilatérales ont une extension européenne et la France est un pays très important de ce point de vue. De ce fait, la nouvelle situation politique de ce pays aura forcément des répercussions sur l’axe Rabat-Bruxelles», observe-t-il.

Le professeur Aboudahab cite ensuite les différents écosystèmes qui pèsent dans la balance de la politique étrangère. “Au-delà de la répartition des couleurs politiques, il faut prendre en considération le poids de l’appareil sécuritaire, de l’appareil diplomatique, etc. Je pourrais même élargir le spectre en incluant le rôle de la société civile française, mais aussi celui de la diaspora marocaine”, il ajoute. Et de poursuivre : « Quel que soit le gouvernement installé, il existe une tradition des relations Maroc-France, et ce fondement, essentiel à mes yeux, régira l’avenir de cette relation », souligne-t-il. , rappelant l’annonce de financements publics de projets privés au Sahara.

S’il est difficile jusqu’à présent de dresser un tableau précis des alliances potentielles qui seront créées et de déterminer leur impact sur l’axe Rabat-Paris, une chose est sûre : « Que ce soit avec la gauche ou la droite, le Maroc adaptera son fonctionnement mode et saura dialoguer avec le gouvernement français. Il faut cependant attendre les résultats des élections pour, à mon avis, pouvoir mieux apprécier la position du Maroc par rapport à la nouvelle donne politique française», conclut notre interlocuteur.

 
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