Diane Chaperon-Lor, L’Ontario français à l’âge d’or

Farceuse contagieuse et franche, telle est Diane Chaperon-Lor qui, au cours de sa carrière prolifique, s’est illustrée dans les médias et la culture. Communicatrice dans les arts, amie des artistes et membre à part entière de la communauté franco-ontarienne, pour qui elle voue une admiration « sans limite », elle retrace son riche parcours jusqu’à l’époque effervescente d’un Ontario français en plein essor.

Vous avez grandi à Chicoutimi avant de vous établir à Toronto pour la majeure partie de votre vie. Vous sentez-vous franco-ontarien ?

Oui en effet. Je suis resté à Chicoutimi jusqu’à l’âge de 19 ans. Je me sens Québécois, bien sûr, mais je suis fondamentalement franco-ontarien. La majeure partie de ma vie et de mes expériences professionnelles se sont déroulées en Ontario, ce qui m’a permis de m’ouvrir sur le monde et de m’épanouir dans tous les environnements internationaux.

Photo de Diane Chaperon-Lor, prise à l’été 1968, guide touristique au Fort Wellington à Prescott, Ontario, pour apprendre l’anglais et financer ses études universitaires en sciences politiques à l’Université d’Ottawa. Photo : avec l’aimable autorisation

À votre entrée dans la vie active, à quoi ressemblaient l’Ontario français et les grandes institutions ?

Quand je suis arrivé du Québec, j’ai trouvé tellement étrange qu’on doive se battre pour avoir des écoles francophones, par exemple. Les Franco-Ontariens se sont toujours battus pour établir des institutions et c’est pourquoi j’ai développé un respect sans limites pour l’Ontario français et sa ténacité.

C’était une période extraordinaire avec un environnement en ébullition car tout était permis. Les ressources sont nombreuses, pas de compressions budgétaires ni de coupures dans la culture : émergence des artistes en Ontario, création de maisons d’édition, La Nuit sur l’étang, etc. Dans les années 1970, de nombreuses entreprises québécoises s’installent en Ontario. Radio-Canada y a même établi ses bureaux dans ces années-là. Toronto reste toujours la capitale financière, économique et culturelle du pays et celle de l’Ontario français également.

Diane Chaperon-Lor reçoit un prix pour 30 années de bénévolat au Canadian Club de Toronto. Photo : avec l’aimable autorisation

Qu’est-ce qui vous a amené à travailler dans les médias ?

J’ai étudié les sciences politiques à l’Université d’Ottawa. Les médias sont des affaires publiques et les affaires publiques sont de la politique. Ce fut une transition en douceur qui me paraissait suffisamment logique. Comme la politique est une comédie, cela explique mon passage au monde du divertissement ! J’ai toujours eu besoin d’un peu d’excentricité. Le génie et la folie cohabitent en politique comme dans les arts.

Diane Chaperon-Lor, à droite, posant avec Céline Dion, au centre, en visite au Harbourfront Centre pour un concert, et la patineuse artistique Josée Chouinard, à gauche.

Comment résumeriez-vous les étapes importantes de votre carrière diversifiée ?

Arrivé à Toronto, j’ai débuté à Radio-Canada (RC) pendant huit ans, avant une pause de plusieurs années au Centre de recherche en éducation franco-ontarienne (CREFO-OISE), pour finalement revenir pendant quatre ans comme directeur des communications pour Ontario.

Au CREFO-OISE, j’ai participé à un projet de recherche sur les batailles scolaires en Ontario français, menant à la publication du livre Une minorité explique des Presses de l’Université de Toronto. Une expérience merveilleuse.

J’ai également travaillé avec l’ancêtre de TVOntario (TFO-TVO), l’Office des télécommunications éducatives de l’Ontario (OTEO), lorsque RC diffusait du contenu français le dimanche sur ce réseau. J’y suis resté lié par la suite pour la promotion de mes projets.

Parallèlement, j’ai toujours été impliqué dans la communauté, dont 30 ans de bénévolat au Canadian Club of Toronto depuis sa création, en tant que membre du conseil d’administration, puis président en 1996. J’ai également été le premier président de la Fédération des aînés et retraités francophones de l’Ontario, FARFO (anciennement FAFO).

Photo prise lors d’une exposition à la Galerie Angélica de Rome avec Natalie Coutou (à droite) et sa fille Kiki (à gauche), aquarellistes et créatrices de mode autochtones. Photo : avec l’aimable autorisation

Vous vous êtes par la suite grandement illustré dans le monde artistique…

Après une décennie à titre de responsable de la publicité à l’organisme culturel Harbourfront Centre, j’ai travaillé à la pige dans le dernier tiers de ma carrière en relations publiques artistiques. J’ai été recruté comme attaché de presse national pour les Prix du Gouverneur général en arts visuels et médiatiques pendant 9 ans.

Pour le magazine Canadian Geographic, j’ai été responsable des relations presse pour les Prix canadiens de l’environnement pendant huit saisons. Avec l’Association des musées de l’Ontario, j’ai planifié le lancement de la campagne « Mois des musées en mai » pour sa création en l’an 2000.

Travailler avec le Conseil des Arts du Canada sur le 400e de la Francophonie en 2015 et la création d’un musée numérique, j’ai réalisé que les médias sont les archives électroniques de l’Ontario français.

C’est une période que vous qualifiez vous-même d’âge d’or pour les arts…

Lorsque j’étais responsable de la publicité à Harbourfront, le centre a connu une période d’abondance. Les sponsors des plus grandes compagnies ont permis de nombreux événements d’envergure internationale qui ont servi de tremplin à la carrière de nombreux artistes.

Il y a eu un essor dans toutes les disciplines : théâtre, littérature, danse, musique… c’était extraordinaire. Nous avons généré des millions de dollars en publicité pour tous les spectacles et festivals internationaux organisés à Toronto. C’était un âge d’or pour les arts. J’ai notamment fait découvrir les francophones à la presse anglophone.

Avec le célèbre peintre autochtone Alex Janvier, qui a peint l’Étoile du matin, exposée au Musée canadien de l’histoire, lors de son passage à Rome. Photo : avec l’aimable autorisation

Vous avez toujours évolué dans des milieux francophones et anglophones. Pourquoi était-ce important pour vous ?

À mon avis, la communauté franco-ontarienne ne peut pas s’isoler. J’ai travaillé toute ma carrière avec les réseaux français et anglais mais également avec la presse et les milieux artistiques internationaux. Il faut être ouvert sur le monde. En tant que média franco-ontarien c’est pareil, vous ne devez pas vous éloigner de votre public.

Selon vous, quels sont les enjeux et les défis auxquels sont confrontées les organisations franco-ontariennes aujourd’hui ?

La situation des Franco-Ontariens a une dimension politique. Nous ne devons pas faire confiance aux gouvernements, mais nous donner les outils nécessaires pour prendre des décisions. Avec les compressions budgétaires passées, nous savons que les orientations du gouvernement peuvent changer du jour au lendemain.

Le grand défi est qu’il ne faut jamais tenir pour acquis ce que l’on a, car il s’agit en effet d’un combat constant. La prochaine génération est redevable envers ceux qui l’ont précédée et doit avoir les mêmes principes d’intégrité et de résilience. Tout ce qui existe aujourd’hui a d’abord été créé par des personnes qui sont aujourd’hui âgées, qui ont fait du bénévolat, qui ont fait campagne et ont fait campagne. Rien n’est servi sur un plateau d’argent en Ontario français.

Diane Chaperon-Lor avec, à sa droite, sa fille, qui travaille pour Air Canada et parle français « grâce à sa mère ». Photo : avec l’aimable autorisation

Vous ne vous êtes pas arrêté là et avez ensuite continué à promouvoir les arts.

Si la retraite consiste à faire ce que l’on veut avec qui on veut quand on veut, c’est ce que j’ai fait. En 2018, j’ai organisé à Rome deux expositions avec des aquarellistes italiens et des peintres autochtones canadiens, dont le grand peintre Alex Janvier, avec qui je m’étais lié d’amitié grâce aux Prix du Gouverneur général.

L’année précédente, j’avais également organisé pour lui une exposition en France, L’art indigène aux couleurs de la Bourgogne. Quand on travaille avec des artistes, la notion de retraite n’existe pas. Mon amie peintre Rita Letendre, dont j’étais l’attachée de presse, n’a arrêté de peindre que parce qu’elle a perdu la vue.

Quelle place occupent les arts dans votre vie aujourd’hui ?

La langue sans culture est une coquille vide alors je suis assidûment les activités de la Toronto Historical Society (SHT), du Cercle canadien de Montréal, les nombreux concerts d’artistes francophones lors de la Franco-fête et de la Francophonie en Fête de Toronto, etc. . Je fréquente les concerts de Voix du cœur, les expositions d’artistes visuels, sans oublier notre Théâtre français qui offre une programmation de haut calibre depuis plus de 50 ans. »

LES DATES CLÉS DE DIANE CHAPERON-LOR :

1947 : Né le 5 janvier à Chicoutimi, Saguenay, Québec.

1968 : Départ étudier les sciences politiques à l’Université d’Ottawa, marqué par la crise d’octobre 1970.

1970 : Agente de recherche pour l’opposition officielle à la Chambre des communes du Canada et déménage à Toronto, où elle rejoint Radio-Canada.

1990 : Alors directrice des communications pour l’Ontario, elle quitte Radio-Canada et devient chef de la publicité à l’organisme culturel Harbourfront Centre.

2000 : Le Conseil des Arts du Canada lui demande de devenir attachée de presse nationale pour les Prix du Gouverneur général en arts visuels..

2015 : Dernier hommage lors des Jeux panaméricains de Toronto à son amie peintre Rita Letendre, dont elle était l’attachée de presse.

 
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