immense énergie collective

Stade Jean Delbert, au dessus de Montreuil. Sous un soleil d’été, ce samedi 8 juin, une fanfare entonne ses premières notes. Derrière elle, un premier groupe se met en marche en exécutant un mouvement de danse. Au centre du cortège, Mahamoud et Samba, élèves de deuxième année du lycée Condorcet, avancent les poings levés en hommage aux athlètes américains Tommie Smith et John Carlos des JO de Mexico en 1964. Ils sont toujours à pied et en répétition. avec une cinquantaine d’autres camarades. Le jour J, le 23 juin, ils seront près de 150 personnes de la section Théâtre Public de Montreuil (TPM) à défiler dans la Grande Parade. Mahamoud et Samba feront partie des cinq cavaliers qui monteront dans leur cohorte, mais sur de vraies montures. Ils rejoindront ensuite les 1 500 participants attendus pour la Grande Parade.

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Samba et Mahamoud reprendront le symbole du pouvoir noir sur les chevaux de la compagnie La Fauve.

« Il ne s’agit donc pas d’une simple réunion de personnes 15 jours avant

Pour « On ne va pas se gêner ! », nous avons commencé à travailler il y a deux ans. A travers ce défilé, nous avons voulu marquer une époque longue, celle d’une présence d’artistes à Montreuil qui ont créé des liens avec les habitants. Il ne s’agit donc pas d’une simple réunion de personnes 15 jours avant», explique Pauline Bayle, la directrice du TPM. “Nous avons quinze ou vingt projets comme celui-ci chaque année. C’est une réalité quotidienne de nos structures. Là, le résultat sera très visible puisqu’il y aura ce feu d’artifice le 23 juin. Mais ce n’est que la pointe de l’iceberg : ce travail de désenclavement de la ville, dans des lieux non dédiés au spectacle vivant, et à la fin sur les autres, fait partie de nos missions de théâtre publicc », poursuit-elle.

A l’origine de la Grande Parade, huit salles de spectacle vivant de Seine-Saint-Denis se sont associées au sein d’un collectif baptisé La Beauté du geste : le MC93 de Bobigny, le Centre national de danse de Pantin, Houdremont et la Maison des jonglages de La Courneuve, l’Espace 1789 de Saint-Ouen, le Théâtre Louis Aragon de Tremblay-en-France et les trois centres dramatiques nationaux du département : le TPM, La Commune d’Aubervilliers et le Théâtre Gérard Philippe de Saint-Denis.

Lorsque Paris a été désignée pour accueillir les Jeux Olympiques et Paralympiques, nos huit structures avaient ce rêve un peu fou de créer ensemble quelque chose qui nous ressemble, en mettant la jeunesse au centre des attentions. Et puis il y a eu la crise du Covid. Travail quotidien auprès des jeunes et des résidentss puis s’est avéré encore plus bénéfique», relate Julie Deliquet. Pour le metteur en scène Gérard Philipe, qui a lancé le projet en 2020, un an après son lancement, «ce défilé XXL est en effet l’occasion de mettre en valeur tous ces savoir-faire, de rendre visible l’identité de nos lieux et de rendre hommage à toutes ces structures qui gravitent autour de nous : les éducateurs, les enseignants, les chefs d’établissement, les associations, les bénévoles. , unités de soins…. Mais ce sont les artistes qui font le lien entre le théâtre et les habitants et qui donnent corps à notre mission de service public.», souligne-t-elle.

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Etudiants du conservatoire de Montreuil

L’idée est de changer la relation entre le spectateur et l’acteur

Pour réaliser son segment de la Grande Parade, le CDN de Montreuil a choisi la compagnie de cirque La Fauve. Son directeur, Arthur Sidoroff, s’est fait connaître pour ses « Dream parades », résidences artistiques dans l’espace public. Dans cet esprit, La Fauve s’est installée une première fois au Parc des Guilands en août 2022 et une seconde à la Prairie des Murs à pêches en juin 2023. »L’idée est de changer la relation entre le spectateur et l’acteur. Nous nous installons pour au moins deux semaines. C’est un vrai camp, une partie de l’équipe y dort. Et puis, nous partons à la rencontre des locaux avec nos chevaux. Nous parcourons les rues. Le cheval joue un rôle essentiel car en ville, il déclenche la curiosité, l’envie de toucher. Cela suspend le temps. Cette rencontre change la relation que l’on peut avoir avec l’animal. Nous disposons également d’un système de sonorisation. La musique joue un rôle important. Nous invitons les gens à participer au camp, à prendre soin des chevaux et finalement à faire comme nous», explique Arthur Sidoroff, en pleine répétition au stade Jean Delbert.

C’est lors de ces « Défilés de rêves » que certains jeunes comme Mahamadou et Samba ont rejoint le projet, grâce à l’association de quartier Lez’Arts dans les Murs. Ils ont été récemment initiés à l’équitation par Arthur Sidoroff qui leur confiera Johnny et Saxo pour la parade. “On s’est tout de suite bien entendu avec les chevaux, même si ce n’est pas si simple de garder l’équilibre», commente Samba. “Je ne suis pas vraiment intéressé par les Jeux olympiques. Mais je suis fier car nous allons porter le symbole fort Black Power», confie-t-il. Assis à quelques mètres, Fatouma, Nawan et Djalil font une pause au frais, à l’ombre, dans les tribunes du stade. “Nous avons rencontré beaucoup de monde. On a un peu d’appréhension pour le public, mais ça va être génial», commente le premier. Tous trois sont en option danse au lycée Charles de Gaulle à Rosny-sous-Bois. “Pour les étudiants, c’est une expérience formidable. Lorsque TPM nous a proposé le projet, nos étudiants ont immédiatement adhéré. Ils sont très fiers de représenter leur ville et la Seine-Saint-Denis», observe Léna, enseignante au collège Jean Jaurès dont deux classes de 4e participent à la Grande Parade. “En tant que professeur d’éducation physique, je trouve aussi cela très bénéfique car ils travaillent sur une chorégraphie de danse. C’est une autre approche du rapport au corps, peu courante. C’est aussi un apprentissage de la responsabilité car c’est un projet collectif», poursuit-elle.

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Les participants sont divisés en groupes de couleurs

Il y a une vertu très émancipatrice à trouver sa place dans un collectif

La dimension collective est fondamentale dans le spectacle vivant et sa création», estime Pauline Bayle. “Je suis convaincu qu’il est essentiel de le partager car il transmet les valeurs d’écoute, de respect d’autrui, de faire ensemble. Il y a une vertu très émancipatrice à trouver sa place dans un collectif et à ressentir ce frisson lorsqu’on se lance car même si on n’est pas professionnel, on a toujours envie qu’un spectacle soit génial. Cet appel de lumière est très joyeux à partager“, Elle ajoute. Dans le groupe TPM, il y a aussi des « particuliers » comme Sandile, 24 ans ou Anne, 63 ans, qui explique justement avoir rejoint la troupe »participer à une œuvre collective« . “La TPM implique des habitants, des écoles, des maisons de quartier, des centres sociaux et des associations culturelles, des élèves du conservatoire de Montreuil qui forment la fanfare, mais aussi de l’École nationale des arts du cirque de Rosny-sous-Boisson.», explique Antonin Delom, coordinateur du projet chez TPM. Il y a même des élèves du lycée La Source à Nogent-sur-Marne, qui propose des formations aux métiers des arts, du spectacle et du design textile. Ce sont aussi eux qui ont confectionné les costumes aux couleurs vives, floqués d’une étoile, symbole du cirque, à partir de vêtements et textiles récupérés notamment au centre de ressources solidaire Neptune.

On n’a jamais vu autant de jeunes se mettre au diapason

Au Théâtre Gérard Philippe, le projet a aussi été pensé localement, »fabriqué à Saint-Denis», souligne Julie Deliquet. Au total, elle enverra 250 participants à la Grande Parade, dont six classes des collèges Elsa Triolet, Garcia Lorca et Pierre de Geyter, des étudiants de la filière mode du lycée professionnel Frédéric Bartholdi et du conservatoire de la ville.

La première fois que j’ai vu tous ces adolescents répéter dans une cour d’école, j’ai été ému jusqu’aux larmes de voir cet ensemble retrouver un silence commun et prendre vie après une semaine d’école.», remarque Julie Deliquet. “On n’a jamais vu autant de jeunes se mettre au diapason pour tenter un geste commun. Cela représente des heures et des heures de travail avec toutes les exigences que cela implique. Il faut imaginer la performance que cela représente avec les sept autres groupes qui défileront le 23 juin. Nous nous sommes posé la question d’un créateur qui viendrait signer le dernier geste artistique qui les réunirait tous. Nous y avons renoncé parce que nous étions d’accord sur le fait qu’il fallait laisser s’exprimer nos différences et que la fraternité, la sororité et, in fine, la solidarité sont les valeurs les plus représentatives de ce projet et de l’identité du groupe. 93. D’une certaine manière, c’est aussi une philosophie qui qui sous-tend les Jeux Olympiques. Cette Grande Parade est un projet sans précédent à l’échelle nationale. Et nul doute qu’il y aura un après car le projet a mis trop longtemps à s’enraciner pour disparaître après les Jeux.

 
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