Macky Sall et ses lieutenants dans le collimateur des nouvelles autorités

Macky Sall et ses lieutenants dans le collimateur des nouvelles autorités
Macky Sall et ses lieutenants dans le collimateur des nouvelles autorités
Le chef de l’Etat sortant Macky Sall (à gauche) et le président élu du Sénégal Bassirou Diomaye Faye (à droite) au palais présidentiel de Dakar, le 28 mars 2024. ABDOU KARIM NDOYE / REUTERS

Le répit fut de courte durée pour le gouvernement sénégalais tombé en disgrâce. Près de trois mois après sa cinglante défaite à l’élection présidentielle, il est menacé d’être remis au banc des accusés par les nouvelles autorités. Attendu sur la lutte contre l’impunité, marqueur de son ” projet “ Sur le plan politique, l’exécutif dirigé par le duo Bassirou Diomaye Faye – Ousmane Sonko laisse entendre sa volonté de régler ses comptes avec ceux qui ont gouverné le Sénégal pendant douze ans.

Dimanche 9 juin, au Grand Théâtre de Dakar, le Premier ministre Ousmane Sonko a sonné la charge. Après avoir fustigé une partie des médias accusés de “ne payent pas leur dette fiscale” et les magistrats soi-disant « corrompu »il s’en est pris au camp de Macky Sall sur la question de la répression des troubles préélectoraux.

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Les violences ont fait une soixantaine de morts entre mars 2021 et juin 2024 et la responsabilité incombe, selon le nouveau pouvoir, à l’ancien président et à son appareil sécuritaire. Plus précisément l’ancien ministre de l’Intérieur, Félix-Antoine Diome, ou encore le haut commandant de la gendarmerie, le général Moussa Fall, ont débarqué. le 24 avril.

Recruter des voyous, leur donner des armes et les laisser en liberté pour tabasser et tuer des manifestants, pensez-vous qu’on va pardonner ça ? Non, nous ne le pardonnerons pas ! (…) À aucun moment nous n’avons dit que nous pardonnerions de tels actes. » a promis le nouveau chef du gouvernement devant un parterre de « jeunes patriotes » gagné à sa cause.

Abroger la loi d’amnistie ?

L’avertissement sortit le groupe déchu de sa torpeur. “Il doit arrêter de menacer les gens.” a réagi Abdou Mbow, président du groupe parlementaire Benno Bokk Yakaar (BBY), invitant M. Sonko » pour se rendre au travail, celui qui porte un costume qui ne lui va pas « .

Les menaces de poursuites lancées par le Premier ministre sénégalais sont d’autant plus critiquées qu’elles semblent remettre en cause la loi d’amnistie, votée à l’initiative de Macky Sall, à dix jours de l’élection présidentielle du 24 mars.

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Au nom du « réconciliation et pardon », le texte a abouti à la libération de centaines de personnes arrêtées dans un contexte de troubles politiques, au premier rang desquelles celles de Bassirou Diomaye Faye et Ousmane Sonko. Dans le même temps, elle a enterré toute possibilité de poursuites contre les forces de défense et de sécurité. Un accord de paix implicite.

Si son parti était le premier bénéficiaire politique, “Nous n’avons pas voté cette loi d’amnistie, souligne aujourd’hui Mamadou Vieux Aïdara, cadre de Pastef. Toutefois, Ousmane Sonko n’a pas déclaré qu’il l’abrogerait. Il estime que ceux qui ont commis des crimes pendant cette période, que ce soit dans notre camp ou en face, doivent payer. Et seuls les juges peuvent décider de mettre en place des mécanismes spéciaux pour les poursuites « .

Une question hautement politique

L’enjeu est hautement politique pour les nouvelles autorités qui ont fait de la lutte contre l’impunité un argument de campagne. Ils subissent la pression d’une partie de l’opinion publique déconcertée par l’amnistie et qui réclame toujours justice.

Un collectif de familles de victimes a récemment réclamé l’émission d’un mandat d’arrêt international contre Macky Sall, désormais établi au Maroc et envoyé spécial et président du comité de suivi du Pacte de Paris pour la planète et les populations (4P). A ce jour, une pétition allant en ce sens a rassemblé 12 836 signatures. Par ailleurs, plusieurs associations de la société civile réclament l’ouverture d’enquêtes, promise sous Macky Sall.

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Si les autorités parviennent à faire abroger la loi d’amnistie, ce serait un pas en avant dans la lutte contre l’impunité, espère Alassane Seck, président de la Ligue sénégalaise des droits de l’homme. Des crimes aussi atroces que ceux commis doivent être traduits en justice. Et le Sénégal a toutes les compétences pour le faire à travers ses chambres criminelles, comme il l’a fait pour l’ancien dictateur tchadien Hissène Habré. »

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Depuis un an, l’ancien chef de l’Etat et une centaine de cadres de l’ancien pouvoir font l’objet d’une campagne tenace les accusant de “crimes contre l’humanité”. En juin 2023, l’avocat franco-espagnol Juan Branco, conseil d’Ousmane Sonko, profitait d’une visite officielle de Macky Sall à Paris pour annoncer un signalement à la Cour pénale internationale (CPI) et le dépôt d’une plainte devant la justice française.

“Fulminer”

Il affirme avoir rassemblé 4 500 éléments prouvant ces “crimes” commis au Sénégal depuis mars 2021. Un an plus tard, le tribunal de La Haye reconnaît avoir reçu « renseignements » de M. Branco mais refuse, au nom de la confidentialité, de commenter la suite donnée à sa démarche.

“Il y a peu de chances qu’une enquête soit ouverte, estime un expert familier des arcanes du CCI. Le procureur reçoit des centaines de rapports de ce type chaque année. En Afrique, faute de moyens, ses priorités sont les crises en Libye et au Soudan, et non la répression des manifestations dans une démocratie, même en difficulté. De plus, la CPI ne juge les individus que si leur pays d’origine n’est pas en mesure de le faire. »

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En France, la plainte déposée auprès de la cellule Crimes contre l’humanité du Parquet national antiterroriste (PNAT) n’a pour l’instant pas abouti, selon nos informations. ” Le doyen des juges d’instruction, conformément aux réquisitions du PNAT, a constaté en février 2024 son incompétence au motif que les faits dénoncés dans la plainte n’entraient pas dans la qualification de crimes contre l’humanité. », a déclaré à Monde une source judiciaire du PNAT qui précise qu’un recours a été interjeté contre cette décision. Pour le moment, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris ne s’est pas encore prononcée.

Reste l’option d’un procès au Sénégal. Jeudi 6 juin, lors d’une conférence de presse à Dakar, Juan Branco a fustigé les capacités de la CPI, “sous l’influence” il croit, poursuivre les dirigeants de l’ancien régime. Il a invité les Sénégalais à prendre la justice en main à travers la création d’un « Tribunal spécial ».

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“Cela demandera du courage car cela implique d’adopter des dispositions juridiques et peut-être institutionnelles qui sont en contradiction avec ce à quoi les hommes politiques sont habitués, à savoir négocier, faire des compromis et se protéger”, a-t-il poursuivi après avoir regretté que Macky Sall ait a pu quitter le pays en jet privé et jouit toujours de son impunité ».

L’ancien président sénégalais, qui a toujours décrit “vantardise” les accusations portées contre lui, poursuit sa carrière internationale. Le 8 juin, M. Sall, dans le cadre de ses nouvelles fonctions au sein du 4P, a été invité à l’Elysée pour un dîner d’État organisé en l’honneur du président américain Joe Biden, à l’occasion des célébrations des 80 ans du Débarquement.

Coumba Kane

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