un vademecum destiné aux évêques de pour mieux informer

Les évêques français ont adopté des lignes directrices pour les aider à informer le peuple de Dieu en cas de mesures prises à l’encontre d’un clerc ou d’un laïc accusé de faits de violences ou d’agressions sexuelles. Le document a été rendu public dimanche à l’issue de l’Assemblée plénière des évêques de Lourdes. Entretien avec Mgr Emmanuel Tois, ancien magistrat et actuel évêque auxiliaire de Paris.

Entretien réalisé par Marie Duhamel – Cité du Vatican

« Nous travaillons pour que la culture du silence appartienne au passé. La culture du secret doit être transformée», a affirmé dimanche le président de la conférence des évêques de dans un entretien accordé au dimanche à l’issue de la plénière d’automne du CEF à Lourdes. Mgr Éric de Moulins-Beaufort a immédiatement annoncé la publication d’un document adressé notamment aux évêques pour leur servir de référence lorsqu’ils doivent déterminer quand et comment informer le peuple de Dieu en cas de violences sexuelles commises dans un contexte ecclésial par un clerc. ou laïc en mission.

« C’est le premier document de ce type», assure Mgr Emmanuel Tois. L’ancien magistrat nommé évêque auxiliaire de Paris en novembre 2023 y voit un guide précieux sur la question du partage d’informations. «Cela se produit de plus en plus fréquemment lorsque les procédures sont jugées.»

Un cadre juridique pour canaliser l’émotion

S’il est “recommandé de faire appel à un avocat spécialisé», le document expose avant tout, de manière relativement détaillée, le cadre juridique dans lequel les informations peuvent être divulguées. Il rappelle les principales règles de procédure judiciaire en droit français et canonique – qui diffèrent selon que la victime est majeure ou mineure – et les grands principes du droit français (présomption d’innocence, droit au respect de la vie privée et de la vie privée). . , droit de ne pas être diffamé).

Aujourd’hui, la communication entre évêques et procureurs est devenue plus fluide, et «plus de 80 protocoles d’accord ont été signés partout en France entre parquets et diocèses», précise le document, mais le met noir sur blanc « les règles de la République et les règles du droit canonique qui convergent souvent, permettent de rappeler ce qui est permis et ce qui ne l’est pas », surtout quand l’émotion domine. “Lorsque nous agissons simplement avec empathie, avec l’émotion comme force motrice, nous n’agissons pas de manière cohérente.», explains Mgr Emmanuel Tois. Or, pour l’ancien juriste, on a forcément une position subjective qui «l’empathie est du côté des victimes ou, en raison d’une certaine paternité des évêques, du côté des auteurs».

Mettez fin aux rumeurs

Les modalités, les destinataires et les moyens utilisés pour rendre publique l’information sont nécessairement différents selon que les faits allégués sont jugés ou non, lit-on en préambule de la dernière partie du document consacré à la divulgation d’une information loyale.

Ainsi, lorsque des rumeurs circulent contre un prêtre ou un laïc en mission, il n’est pas question de faire quoi que ce soit. “Il peut arriver que des gens nous appellent à la fin de la messe pour nous dire confidentiellement qu’un prêtre n’est pas fiable, mais la rumeur n’est jamais quelque chose de fiable. souligne Mgr Tois. « Je leur demande alors de m’expliquer sur quoi ils fondent leur accusation de déviance. Nous avons besoin d’une caractérisation, pour objectiver.

Attendez la décision du tribunal

Si l’affaire est au stade de l’instruction, la prudence et la modération doivent être la règle, poursuit le document. A ce stade, l’évêque doit pouvoir, en fonction de ce qu’il a entendu d’une victime et aussi de la manière dont un auteur désigné réagit à ce qui lui est reproché, prendre des décisions qui peuvent être des mesures conservatoires, explique celui qui est chargée de la prévention et de la gestion des maltraitances pour le diocèse de Paris. Mais doit-il relayer l’information ? L’évêque peut le déterminer en consultation avec le procureur, lit-on dans le document. Mais la Conférence des évêques recommande de ne pas communiquer »tant que la question est provisoire et qu’il n’existe aucune décision qui appelle une reconnaissance de culpabilité soit par la juridiction civile, soit par la juridiction canonique« . Il peut toutefois arriver, précise l’ancien magistrat, que le diocèse soit amené à s’exprimer publiquement en cas de fuites. Un cas exceptionnel.

Publicité du verdict, une sanction supplémentaire

Lorsqu’une décision de justice est rendue, tant sur le plan canonique que sur le plan pénal, l’accusé et le plaignant ont le droit d’être tenus informés. En 2022, les évêques ont également voté une résolution pour que «les décisions finales sont toujours communiquées aux plaignants» (résolution 3.2).

«Il y a toujours cette notion d’information qui est indissociable de la restauration de la vérité lorsqu’elle est bafouée. »explique Mgr Tois. “C’est à dire que si les victimes sont informées et que rien n’est fait après, personne ne se pose de questions, souvent on en reste là.. Il est également rappelé dans ce document que la publicité est considérée comme un «complément de la sanction» pour garantir son efficacité et éviter les récidives.

La diffusion de l’information est soumise à l’appréciation de l’évêque qui décidera d’étendre ou non le champ de l’information au conseil pastoral, au presbytère, aux personnes qui sont en contact avec le prêtre concerné, poursuit l’évêque auxiliaire de Paris. .

Le droit à la réadaptation

Il y a de nombreux éléments à prendre en compte. Il faut protéger le plaignant, encourager les éventuelles victimes à s’exprimer, respecter la communauté des accusés et garantir la présomption d’innocence de ces derniers.

Concernant le clerc ou le laïc qui serait jugé coupable d’agression sexuelle, Mgr Emmanuel Tois souligne «chose que l’on a encore du mal à prendre en considération, et qui est clairement mentionnée dans ce document comme faisant partie du droit civil français : c’est la question de la réhabilitation. ». La société civile l’organise mais, note-t-il, «Il est difficile pour une victime d’admettre qu’un prêtre puisse réintégrer un ministère alors qu’il a été suspendu, même après avoir pris des précautions et effectué des expertises psychiatriques. Évidemment, tout le monde, la justice ou l’Église, a cette peur des récidives. Mais il existe aussi des cas de non-récidive« . Avec ce document, l’évêque auxiliaire de Paris estime que des progrès ont été réalisés.

Une nouvelle accablante, mais aussi Source d’espoir

Le scandale des abus commis par des membres du clergé fait régulièrement la Une de la presse, un fait accablant en soi, mais l’espoir vient du pourcentage de personnes concernées par rapport à l’immense majorité des clercs ou des laïcs en mission, souligne-t-on. Mgr Tois. Il voit en outre dans le fait que la question des abus est «Vraiment» traité, une autre Source d’espoir. Pour lui, il s’agit de l’espoir que ce traitement aura un effet préventif pour l’avenir, qu’il aura un effet dissuasif, un effet de réflexion, d’incitation à soigner, d’incitation à parler, à ne pas rester seul face à face. d’une tendance, d’une difficulté. “Le fait qu’on en parle et que le sujet soit abordé a un effet.» il déclare : «un jour, un prêtre m’a confié qu’il ne fallait pas le laisser seul avec son problème, sinon il dévierait. L’avantage de cette période, conclut Mgr Tois, c’est parce que je vois clairement que je dois faire face à ma difficulté personnelle.

Entretien avec Mgr Emmanuel Tois

 
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