pourquoi Paris et sa petite couronne ont « fait une exception » et ont résisté à Jordan Bardella

Les élections européennes ont eu lieu dimanche 9 juin 2024. En France, la liste conduite par Jordan Bardella (RN) est arrivé premier avec 31,5% des suffrages exprimés, et dans 94% des communes. Seuls cinq départements résistent à cette vague bleue. Parmi eux : Paris, la Seine-Saint-Denis, les Hauts-de-Seine et le Val-de-Marne. UN exception pour quelle analyse Actualités parisiennes Sébastien Michon, chercheur au CNRS et spécialiste de la sociologie des personnels politiques européens et français.

Le co-auteur de Profession, député : enquête sur la professionnalisation de la politique en France (Raisons d’agir, 2017) évoque entre autres la forte mobilisation de LFI en faveur de la cause palestinienne dans les quartiers populaires, mais aussi le dynamisme de la campagne.

nouvelles : Comment expliquer que la Ville de Paris et les départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne n’aient pas suivi la tendance du vote en faveur du Rassemblement national ? La liste conduite par Jordan Bardella a obtenu 31,5% des voix au niveau national, mais n’a pas dépassé 18% dans ces départements.

Sébastien Michon : La situation politique actuelle se distingue par une nouveauté notable : auparavant, le Front national, devenu Rassemblement national (RN), ne dominait que dans certains départements. Désormais, ce parti arrive au sommet dans presque tous les départements. Les grandes villes comme Paris font cependant exception, où La France insoumise (LFI) et le Parti socialiste – Place publique (PS-PP) attirent davantage de voix. Dans quartiers bourgeois, la Renaissance prédomine, tandis que les centres-villes penchent davantage vers le PS-PP. Dans les quartiers populaires, un vote massif en faveur de LFI se manifeste de manière impressionnante.

Les classes populaires affichent un soutien marqué à LFI, en partie grâce à l’engagement des élus insoumis pour la Palestine. Rima Hassan, en 7ème position sur la liste européenne, et le député Sébastien Delogu, brandissant un drapeau palestinien à l’Assemblée nationale, ont particulièrement trouvé un écho auprès de cet électorat. Là peur de la montée du RN est également présent, mais la cause palestinienne a fortement contribué à l’essor de LFI dans ces territoires, aux dépens du RN.

nouvelles : Si, à l’échelle nationale, le taux de participation, sans précédent depuis 1994, a été remarquable (51,4%), il l’a également été sur notre territoire, puisqu’il a dépassé celui enregistré lors des élections européennes de 2019 (50,37%) pour s’établir également à 51,4%.

SM : Les estimations du taux de participation ont été à peu près équivalent à ceux de 2019, déjà assez élevé par rapport à 2014 et aux élections précédentes. Nous avons a battu le record de participationquoique de manière relative, car il est à peine supérieur à 50% [51,4 % selon le ministère de l’Intérieur]. Mais, pour les élections européennes, c’est un participation significative si l’on compare avec la très forte abstention lors des dernières élections législatives (53,77%).

Les résultats montrent que ces électeurs ont démontré une réelle volonté de mobilisation et exprimez-vous. Il y a eu une réelle motivation pour participer à cette élection. Cela témoigne également de l’importance accordée à cette élection par les différentes équipes de campagne, qu’elles aient appelé à un vote de sanction contre le président de la République et son gouvernement, ou qu’elles aient proposé des alternatives au niveau européen. J’ai trouvé la campagne animée, avec un véritable investissement des partis politiques, et une confiance assez marquée des électeurs, aussi bien de gauche que de droite, voire d’extrême droite. Tout cela a contribué à une campagne particulièrement dynamique. Nous pouvons suivre la dynamique électorale nationale au niveau localet particulièrement à Paris et sa région où les électeurs se sont sentis touchés par ce scrutin.

nouvelles : La majorité des Parisiens s’est exprimée en faveur de Raphaël Glucksmann (PS-PP, 22,86% des suffrages exprimés). A quoi faut-il attribuer ce score, qui marque une avancée significative pour le parti de la maire de Paris (PS), Anne Hidalgo, qui a recueilli 8 % des voix lors de l’élection de 2019 ?

SM : Il est indéniable qu’il existe beaucoup de querelles à gauche, et que La France insoumise ne correspond pas à tous les électeurs. A Paris notamment, on observe un électorat qui oscille entre écologistes et socialistes. Raphaël Glucksmann a mené une campagne particulièrement active, ce qui explique en partie son très bon score dans la capitale. Il a su capter l’attention des électeurs et s’imposer en prenant la place qu’occupaient les autres partis en 2019.

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