Avec le festival de Nîmes, Maison Rouge, le musée des Vallées Cévennes à Saint-Jean-du-Gard présente le travail de l’illustrateur Cruschiform autour de « L’Odyssée des graines ».
Depuis plusieurs années, le festival Nîmes s’illustre permet de découvrir l’art de l’illustration autrement, avec un mélange errant de fraîcheur et d’exigence. Elle exporte ce look unique à la Maison Rouge, le musée des Vallées Cévenoles de Saint-Jean-du-Gard où Marie-Laure Cruschi, alias Crushiform présente le passionnant projet L’Odyssée des grainesqui se décline dans un beau livre chez Gallimard et dans une exposition après une résidence sur place.
Dans ce musée qui propose une vision panoptique des Cévennes, s’intéressant à la fois aux hommes et aux paysages, à l’histoire, aux traditions populaires et aux activités économiques, Crushiform élargit encore le point de vue et construit des ponts vers le reste du monde. Entre errance naturaliste et rêverie poétique, l’illustratrice mêle connaissances scientifiques et merveilleux, recherche et esthétique. Pendant quatre ans, elle étudie, observe, admire, dessine pour capturer au trait pur le dessin des graines, les inventions de la nature pour permettre le voyage, l’éclosion et le développement des plantes.
Une exposition comme une balade
Avec un accrochage très léger qui invite à la promenade, Crushiform suspend les planches dans l’espace, évoquant à la fois les herbiers des Lumières et la précision des images d’aujourd’hui. Grâce à un travail subtil sur le blanc et les volumes, elle donne vie à des formes merveilleuses et bien réelles. Elle accompagne ses images de petits textes, d’aperçus littéraires sur la force et la beauté de la nature. Durant sa résidence là-bas, elle a complété son travail commencé à Paris avec des variétés locales.
« Depuis des centaines de millions d’années, les plantes ont mis en œuvre d’astucieux stratagèmes pour permettre à leur progéniture de s’émanciper et de se disperser »écrit l’artiste dans la préface de son livre. C’est à partir de cette réflexion qu’elle a construit son travail, cataloguant les différentes manières dont les graines se perpétuent. Et ça tombe bien, ces outils sont souvent très graphiques et les mots de la science peuvent parfois prendre une hauteur poétique insoupçonnée !
Vent, eau ou feu
Certaines graines se dispersent d’un simple souffle, voyageant portées par le vent grâce à leurs panaches, leurs parachutes, leurs nageoires, leurs capes ou leurs lovelets. Une seule fleur de pavot fanée peut prospérer grâce à 6 000 petits soldats dévoués. D’autres flottent sur l’eau, emportés par les tempêtes, les rivières ou les océans. Chaque feu, chaque flamme, chaque graine a besoin de chaleur pour s’envoler violemment en explosions. Mais certains parviennent à se retourner contre eux naturellement, simplement en les touchant.
Les fourmis ont signé un contrat avec des graines charnues, se délectant de leur pulpe en échange d’un « billet pour voyager ». Les oiseaux peuvent aussi aider les graines à s’échapper, mais elles doivent être savoureuses… Pour être déplacées par les mammifères, ils doivent s’accrocher, s’agrippant aux toisons aux formes crochues. Certaines graines n’aiment pas l’aventure et préfèrent un mode de vie sédentaire. Ils tombent de tout leur poids mais gardent une grande réserve d’énergie en attendant la germination. Et puis bien sûr, l’homme, à travers l’espace et le temps, a évolué avec les graines, cultivant des épices et des céréales, domestiquer la nature pour créer des aliments, des objets, des parfums ou des potions…
Des histoires étonnantes de la vie
Les histoires de cette odyssée ne cessent de surprendre. Les magnolias existaient déjà à l’époque des dinosaures. Le cœur de la mer peut parcourir 20 000 kilomètres. L’huile de ricin est 12 000 fois plus toxique que le venin du serpent à sonnette. Le cornichon de l’âne expulse ses graines à 36 km/heure et le mégot de coco des Seychelles est si lourd qu’il est menacé.
En focalisant son regard sur ce microcosme, Crushiform capte toute la variété du monde, un monde qui se déploie alors avec de grandes images inspirées des paysages des Cévennes, captant là aussi les petits ruisseaux et les grands espaces, la beauté intacte de la nature et évolutions humaines. L’odyssée de la vie…