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Dans le Tarnn-et-Garonne, l’équipe mobile santé et précarité (EMSP) se rend dans les structures spécialisées dans l’accueil d’urgence et la réinsertion pour prendre en charge les populations les plus vulnérables dans un contexte de désertification médicale. Reportage à Montauban.
Plus personne n’ignore les difficultés croissantes d’accès aux soins. Mais lorsqu’on est étranger, sans papiers, sans abri, analphabète et rejeté du système de droit commun, consulter un médecin peut s’avérer une mission impossible. Face à cette dure réalité au quotidien, l’association « Promotion, autonomie, santé » (Apas 82) a fondé une équipe mobile santé et précarité (EMSP) qui se déplace à la rencontre des plus fragiles. Composée de trois infirmières, d’une éducatrice de jeunes enfants, d’une coordinatrice et d’un médecin généraliste, l’EMSP organise des permanences de santé ou des interventions à la demande dans les centres d’hébergement d’urgence (CHU), les centres d’accueil pour demandeurs d’asile (Cada) et les associations spécialisées dans l’accueil et de réinsertion comme Emmaüs, Escale Confluences ou Amar notamment.
“J’ai toujours été sensible à la misère des autres”
Cette semaine encore, toute l’équipe investit les locaux de l’accueil de jour de l’association Relience 82, à Montauban, pour suivre les personnes déjà prises en charge et orienter les nouveaux arrivants. « L’équipe de Relience nous fournit parfois une liste de personnes à voir en priorité, ce qui permet de simplifier le travail en amont. Nous travaillons également avec eux pour accroître leurs compétences sur ces problématiques de santé afin de les prioriser avec précision. Et selon, soit nous rencontrons la personne pour poser un premier diagnostic, soit nous travaillons à coordonner les soins. Nous prenons donc rendez-vous pour le patient et nous apportons même un soutien physique sur le lieu de soins, si nécessaire », explique Pauline Pettré, la coordinatrice de l’EMSP, un dispositif qui a vu le jour en avril 2023 avec le soutien de l’EMSP. Agence Régionale de Santé.
L’interprétation, un métier à part entière
Les personnes qui consultent l’équipe mobile santé et précarité (EMSP) viennent parfois du monde entier. Et ils ne maîtrisent pas toujours le français, notamment lorsqu’il s’agit de termes médicaux. Bien entendu, Google Translate nous aide au quotidien. Mais pour des besoins plus spécifiques, l’EMSP travaille avec trois cabinets d’interprètes : Tradilibre, ISM Interprétariat et un indépendant pour la langue pachtoune notamment. « Un médecin généraliste de droit commun n’a pas le temps de réaliser un tel travail de médiation », remarque Pauline Pettré. Récemment, une dame d’Europe de l’Est a dû apprendre qu’elle souffrait d’une forme de cancer incurable. Un interprète a donc été mobilisé pour lui annoncer la terrible nouvelle en toute confidentialité.
En 18 mois, près de 700 personnes ont pu bénéficier de soins médicaux professionnels pour soigner cancer, diabète et autres problèmes cardiaques. Heureusement, le Dr Marc Vironneau est en mesure de délivrer des ordonnances et de référer ses patients les plus vulnérables. « J’ai toujours été sensible à la misère des autres et ces interventions correspondent à ma réflexion. Beaucoup sont à la rue et pourtant, ils sont suivis par des spécialistes des centres hospitaliers de Montauban et de Toulouse pour maladies graves”, précise celle qui peut aussi compter sur le centre médical de soins immédiats (CMSI) de Montauban, aux urgences, ou sur la Girafe. 31 cabinet dentaire, à Toulouse.
Le précieux soutien du centre hospitalier
Durant ses horaires, l’accueil réservé aux membres de l’EMSP est toujours chaleureux, parfois même trop chaleureux. Ces personnes qui ont parfois tout perdu sont tellement ravies de retrouver une oreille attentive qu’elles s’y accrochent “comme une bouée de sauvetage”, constate Pauline Pettré qui reste vigilante à être disponible pour chacun. « On rencontre beaucoup de gens déprimés, des gens qui n’ont plus de logement. Ils ont besoin de parler», confirme le Dr Vironneau.
En effet, des problèmes psychiatriques et addictologiques. L’EMSP, dont le cœur de métier reste la pathologie somatique, peut alors compter sur l’équipe mobile de psychiatrie et de précarité (EMPP) et l’accès permanent aux soins (Pass), soutenus par le centre hospitalier de Montauban qui mérite une mention particulière pour son soutien sans faille. Sans oublier Epices 82, Addiction France ou encore le Centre de soins, d’accompagnement et de prévention des addictions (CSAPA).
« Sans cela, beaucoup auraient renoncé aux soins, notamment les plus de 75 ans qui n’arrivent plus à subvenir à leurs besoins malgré leur retraite », constate Pauline Pettré. C’est formidable que ce type d’équipe existe, surtout dans un contexte de désertification médicale. Mais nous manquons de ressources compte tenu des besoins actuels. »
Relience 82, une structure tentaculaire
L’histoire de Relience 82 est aussi riche qu’ancienne. A l’origine, c’est l’aumônier de la maison d’arrêt de Montauban qui a fondé un foyer pour anciens détenus en réinsertion et sans abri. A sa mort, l’Association pour la protection et la promotion des personnes (ASPP) prend le relais et en 2010, l’association 82 est créée, toujours avec pour objectif d’aider les populations les plus vulnérables. Les personnes à la rue, en logement précaire ou insalubre, celles ayant des problèmes de santé mais aussi les familles expulsées, les jeunes sans ressources, les femmes victimes de violences conjugales ou les mères célibataires en difficulté peuvent bénéficier d’une écoute attentive et d’un accompagnement individualisé. En effet, Relience 82 est découpée en quatre domaines (suivi social, insertion, enfance et famille, santé précaire). Centre d’accueil de jour, d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), d’hébergement d’urgence mère-enfant (HUME), de lits d’accueil sanitaire (LHSS) ou encore de lits d’accueil médicalisé (LAM) sont autant de dispositifs mis en place au service des plus précaires.