Nommé treizième recteur de l’Académie de La Réunion en juillet 2023, Pierre-François Mourier s’apprête à rejoindre l’Académie de Nancy-Metz et à devenir recteur de la région académique Grand-Est.
Vous terminez donc votre mandat de Recteur de La Réunion après un an et trois mois. Un mandat express. Avez-vous des regrets de nous quitter si tôt ?
Qui ne regretterait pas de quitter la Réunion ? Bien sûr que oui. Je regrette d’avoir quitté l’île, mes collègues, les étudiants de La Réunion, les professeurs, les cadres, les élus. Mais je suis un haut fonctionnaire et lorsqu’on me donne l’opportunité et l’honneur de diriger une très grande région universitaire, je réponds.
Y a-t-il des dossiers ou des projets particuliers qui vous tenaient à cœur, et que vous n’avez pas eu le temps de voir se concrétiser au sein de l’académie ?
Oui car, par définition, l’éducation est un projet qui ne finit jamais. C’est quelque chose qu’on commence et qu’on finit seulement 5, 10, 20 ans plus tard. Et il n’y a pas de mandat de 20 ans pour les réacteurs.
Quels sont les trois principaux projets ?
Ce sont les dossiers dont je suis le plus fier. Tout d’abord, l’essor des écoles inclusives qui est extrêmement important pour moi, et pour tous les Français, je crois. Deuxièmement, cette idée selon laquelle le multilinguisme à La Réunion est une opportunité extraordinaire. Le fait que 80% de nos étudiants soient créoles est une opportunité extraordinaire pour passer ensuite au multilinguisme.
Un projet initié par votre prédécesseur, la rectrice Chantal Manès-Bonisseau, aujourd’hui à la retraite. Créole en classe pour les étudiants de La Réunion. Un an plus tard, quels sont vos premiers bilans ? Et quelles pistes d’amélioration ?
Nous parvenons désormais à réellement convaincre les parents que les cours où l’on apprend réellement le créole, comme une langue vivante, sont un plus pour leurs enfants. Cela progresse de plus en plus et on voit comment la parfaite maîtrise du créole et du français travaillent ensemble pour avancer vers d’autres langues.
L’intimidation à l’école. Un fléau chez les jeunes. Sous la houlette de l’ancien ministre de l’Éducation nationale, Gabriel Attal, vous avez suivi la mise en place de cours d’empathie au sein des écoles. Comment pensez-vous que nous pouvons aller plus loin avec les systèmes ?
Nous sommes particulièrement fiers ici à La Réunion car avec notre cellule d’innovation académique, en effet, nous faisions des cours d’empathie. Nous ne l’appelons pas cours d’empathie, mais « compétences psychosociales » par exemple, depuis plus d’un an maintenant. Cela change l’ambiance d’une classe, d’une école, les relations entre les élèves, avec les professeurs, mais aussi avec les parents d’élèves qui en sont une composante essentielle.
Budget 2025. Les économies de l’État résulteront de la suppression de 4 000 postes d’enseignants dans le primaire. Nous avons entendu la montée des syndicats. Combien de postes d’enseignants pourraient être supprimés à La Réunion ? Dans quelle mesure ? Quelles conséquences pour les étudiants de La Réunion ?
Premièrement, le budget n’est pas voté. Le ministre a laissé entendre qu’une discussion était possible. Il est bien trop tôt pour répondre précisément, et encore plus pour savoir comment chaque académie pourrait être impactée. La Réunion, moins que d’autres, car nous sommes encore en train de rattraper notre retard. Cette académie fêtera ses 40 ans en décembre, c’est une très jeune académie. Je pense que nous serons moins touchés que beaucoup d’autres par cette éventuelle perte d’emploi.
Vous avez pu échanger avec votre successeur Rostane Medhi, nommé ce mercredi en Conseil des ministres, nouveau Recteur de l’Académie de La Réunion. D’autres défis vous attendent à l’académie Grand-Est. Quand allez-vous quitter la Réunion ? Et qu’emporterez-vous de La Réunion dans vos valises ?
Je pars lundi soir et j’emporte avec moi un cœur comme ça, le cœur de La Réunion qui est l’amitié, le respect, la bienveillance et le vrai sens du vivre ensemble.