L’impressionnisme de la Manche à la Méditerranée – .

L’impressionnisme de la Manche à la Méditerranée – .
L’impressionnisme de la Manche à la Méditerranée – .

Giverny (Eure). Pour célébrer les 150 ans de l’impressionnisme, Cyrille Sciama, directeur du Musée des impressionnismes, a choisi le thème de la mer, mais aussi celui du tableau qui a donné son nom au mouvement. Il n’a pas pu obtenir le prêt deImpression, soleil levant (1872) de Claude Monet, car cette vue du port du Havre apparaît dans l’exposition « Paris 1874. Inventer l’impressionnisme » au musée d’Orsay. D’autres représentations de ports et mouillages, datant du XXème siècle avec Camille Pissarro et Paul Signac, ouvrent le parcours. Il n’y a pas de tableaux d’inspirations lointaines, Claude Lorrain ou Joseph Vernet, mais un précurseur, Camille Corot, avec Bateaux de pêche et voiliers (1853-1859) et Trouville, des bateaux de pêche bloqués dans le chenal (1875). Ces huiles sur carton et sur papier réalisées en extérieur révèlent un aspect méconnu de l’artiste lié à l’école de Barbizon : il fut l’un des premiers, dans les années 1820, à aller de Paris à Honfleur pour peindre. Une petite gravure, Coucher de soleil. Port d’Anvers (1868) de Johan Barthold Jongkind, artiste que Monet rencontra en Normandie en 1862, montre à quel point le futur maître de l’impressionnisme se nourrit de son entourage. Avec ses grands bateaux aux voiles déployées, son bateau qu’un marin dirige en godille et son soleil bas dans le ciel, l’œuvre du Néerlandais anticipe Impression, soleil levant.

Une grande place dans l’exposition est accordée à Eugène Boudin. Monet, qui le rencontra en 1858, lui dit qu’il lui devait tout. Le commissaire ne manque pas de souligner que nous commémorons cette année le bicentenaire de sa naissance et présentons 28 œuvres de l’artiste tout au long de l’exposition, soit plus du quart de l’accrochage. Il y a bien sûr les pastels et ces petits tableaux de vacances qu’il vendait à la riche bourgeoisie. Mais ce sont surtout les marines et les scènes décrivant la vie des travailleurs côtiers qui attirent le regard : des cieux immenses Port de Camaret (1872) et Bassin de l’Eure au Havre (1885), nuage noir du magnifique Un grain (1886) où deux voiliers de pêche traversent la tempête escortés de mouettes, laveurs de Femmes normandes étendant le linge sur la plage (1865) et Lavandières près de Trouville (vers 1872-1876), algoculteurs Plage de Deauville (1893).

Dissolution du motif

Parmi les plus de 80 œuvres exposées, il y a peu de tableaux de Monet car ils sont très demandés, d’autant plus en cette année célébrant l’impressionnisme. Mais une merveille se niche parmi celles présentées : Marée basse aux Petites-Dalles (1884, [voir ill.]), une toile intensément lumineuse dont la dissolution du motif annonce la série du « Pont de Waterloo » et des « Nymphéas » qu’il peint au début du XXe siècle, ou encore La pointe du Petit Ailly (1897) dans lequel le poste de douane, cette petite maison de Varengeville qu’il représente souvent, est réduit à une forme géométrique rose.

Mais la mer n’est pas que la Manche, même si l’exposition s’inscrit dans le cadre du festival Normandie Impressionniste. C’est la mer du Nord que l’on retrouve chez Alexandre Marcette dans En chemin. Bateaux sur la mer du Nord (non daté), le Méditerranée avec Petit Port (1919) d’Auguste Renoir, Le bord de mer à Palavas (vers 1854) de Gustave Courbet, Rochers à la Pointe de la Baumette (1893) d’Armand Guillaumin, et enfin l’Atlantique Breton. Monet rapporte de ses séries peintes à Belle-Île Les Rochers de Belle-Île, la Côte Sauvage (1886), où l’agitation de la mer et du ciel répond aux reliefs nets du granit rose. L’école bretonne est largement représentée avec Maxime Maufra – son rayonnant Entrée du port de Port-Goulphar, Belle-Île-en-Mer (1909) fut prêté par le Musée Thyssen-Bornemisza (Madrid) – et Henry Moret dont Mauvais temps à Doëlan (sans date) illustre cet impressionnisme qui s’épanouit dans la continuité des rassemblements de peintres du Pouldu et de Pont-Aven. Parmi eux, Paul Gauguin qui emmène le public dans un ailleurs évoqué par son Paysage Te Vaa (1896), un hymne à la beauté primitive de Tahiti où il place « éléments symbolistes qui concluent l’impressionnisme »,écrit Cyrille Sciama dans le catalogue. Le commissaire a choisi de terminer le parcours sur le thème de « La Volée ». Dans la célèbre œuvre d’Édouard Manet L’évasion de Rochefort (1881), commémorant la fuite de Nouvelle-Calédonie du journaliste communard déporté Henri Rochefort, le Pacifique Sud sur lequel naviguait le bateau des fugitifs éclairé par la lune occupe la quasi-totalité de la toile. On ne peut qu’être ému par ce tableau, son auteur, déjà très affaibli par la maladie qui allait l’emporter, semblant avec cette œuvre confier son propre destin à la mer.

 
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