La branche s’inquiète de l’attractivité de la Suisse

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La branche s’inquiète de l’attractivité de la Suisse

L’industrie de la blockchain s’inquiète de l’attractivité de la Suisse

Les relations sont tendues entre les représentants de l’industrie suisse de la blockchain et la FINMA, soupçonnée de faire le jeu des banques. A l’heure où l’Europe met en place un cadre juridique clair, l’insécurité semble changer de camp.

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Yulgan Lira admet volontiers « être au milieu de la tempête ». Venu du Brésil pour lancer le pièce stable de sa société Colb à Genève, il a investi une partie des 3 millions récoltés par le projet, confiant dans la sécurité du cadre juridique suisse. Il a été surpris par le Position de la FINMA publié en juillet 2024, obligeant les émetteurs à pièces stables contrôles d’identité systématiques à tous les niveaux des transactions. Pour Yulgan Lira, « une telle limitation de la transférabilité nous empêche d’être compétitifs sur le marché mondial ». L’entrepreneur dit étudier tous les recours possibles et «se battre pour continuer à exister en Suisse».

Tensions du secteur contre la FINMA

Il n’est pas le seul à être ému par la situation. Les deux associations nationales du pays – la Fédération suisse de blockchain et la Crypto Valley Association – ont ont exprimé leur profond désaccord avec une règle dont la conséquence serait l’impossibilité pratique de lancer pièces stables centralisé depuis la Suisse, faute de « modèle économique viable ». Le risque apparaît de voir une partie de l’industrie quitter le pays et émettre depuis l’Europe, avec la possibilité en contrepartie de distribuer les tokens en Suisse « sans aucune restriction ».

L’épisode n’est pas sans rappeler celui de 2023, lorsque la FINMA avait décidé de limiter l’activité des jalonnement aux établissements bancaires. Comme dans le cas de pièces stablesLes milieux associatifs ont déploré de ne pas avoir été consultés au préalable et ont dénoncé la menace directe qui pèse sur l’industrie suisse de la blockchain. Le régulateur a alors fait volte-face. Cette même année, le fondateur du Nym, Alexis Roussel, porte plainte contre la décision de la FINMA de baisser le montant des échanges en cryptomonnaies à 1.000 francs par mois sans vérification d’identité, jugée discriminatoire par rapport aux règles appliquées aux espèces.

Ce durcissement réglementaire inquiète le fondateur de Mont CapArnaud Salomon, pour qui « la réduction à 1000 francs par mois est un frein à l’activité, au même titre que les limitations du pièces stables« . Il a abandonné son projet de reprendre le pièce stable XCHF de Bitcoin Suisse, qui a effectivement annoncé sa fin en 2024. « La loi ne change pas, c’est l’interprétation de la FINMA qui change et crée de l’instabilité. Cela pose clairement la question de savoir s’il y a un avenir en Suisse.»

Tout pour les banques ?

Pour l’avocat Gabriel Jaccard, fondateur de l’association genevoise La bonne société de jetonsles positions de la FINMA, notamment celle sur pièces stables, « privilégier les banques qui identifient fondamentalement tous leurs clients et qui sont par nature compatibles avec ces exigences, même injustifiées ». Et de noter que «certaines d’entre elles, comme PostFinance, préparent également leur propre pièce stable».

Sa collègue Biba Homsy admet que les banques sont écoutées par le régulateur, « compte tenu de la densité et de la précocité de leur engagement dans la crypto ». Elle note cependant l’importance d’un dialogue constructif avec les petits intermédiaires financiers, “indispensable notamment en matière d’innovation”.

“Les récentes positions de la FINMA favorisent les banques, qui sont par nature compatibles avec ces exigences injustifiées.”

Gabriel Jaccard, co-fondateur de The Good Token Society

L’appel de l’Europe

Climat bien différent dans l’Union européenne, où 2024 marque l’entrée en vigueur progressive du Réglementation MiCA sur les cryptoactifs. « Le cadre européen n’est pas particulièrement favorable, mais il est ferme », constate Gabriel Jaccard, pour qui l’incertitude juridique a changé de camp. Parmi les points clés de MiCA, l’obligation d’obtenir l’agrément européen en tant que prestataire de services sur cryptoactifs pour approcher librement les clients européens. Les entreprises suisses se lancent, comme Zurich Relais d’applicationapplication phare d’épargne bitcoin, qui compte 80% de clients européens et ouvre son bureau parisien avec cinq salariés. Le jeu continuera notamment à être disponible sur l’App Store dans l’UE.

Malgré la lourdeur du MiCA, l’attrait d’un marché européen unifié est convaincant. Le géant Circle a ainsi été le premier à obtenir la licence européenne, permettant l’émission de pièces stables à partir de juillet à Paris. L’avocate Biba Homsy plaide pour “l’adoption de règles proportionnées en Suisse si l’on veut rester compétitif à l’international face à un marché de 450 millions de consommateurs”.

A ce sujet, son collègue Gabriel Jaccard déplore un arsenal suisse pas toujours bien calibré, illustré par le lancement en 2021 de la licence de commerce DLT, « qui coûte plusieurs centaines de milliers de francs pour un marché de 9 millions de personnes, et qu’aucune entreprise a été recherché en trois ans d’existence.

Retour à l’agenda politique

Du côté germanophone, l’inquiétude est partagée. Pour Luzius Meisser – membre du conseil de Bitcoin Suisse – le vent politique s’est inversé depuis la fin des années 2010, lorsque la Suisse s’est positionnée à l’international avec un cadre juridique clair et précoce, notamment sur les ICO et la qualification des tokens. «Avec Ueli Maurer, Johann Schneider-Ammann et Mark Branson, nous avions trois personnalités clés qui ont reconnu le potentiel de la cryptographie pour la place financière suisse.»

Malgré leurs départs successifs, une adaptation de la loi en réponse à la MiCA pourrait être à l’ordre du jour 2025. «Pour l’industrie, c’est une opportunité de rattraper, voire de dépasser à nouveau l’Union européenne», espère Luzius Meisser, qui prévient: «Pour être compétitif, le cadre suisse devra être plus attractif que le cadre européen, car la Suisse n’a pas l’argument de la taille du marché.

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Jeanne Plancade est journaliste économique et d’investigation pour Bilan, observateur critique de la scène tech suisse et internationale. Il s’intéresse aux tendances fondamentales qui remodèlent l’économie et la société. Plus d’informations

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