Drogues du viol à Trois-Rivières : « Ça fait peur »

« J’ai deux enfants, je ne suis pas du genre à boire de manière excessive ou quoi que ce soit. Je sors rarement», affirme d’emblée le Trifluvien. Elle révèle avoir ingéré deux verres de vin blanc pendant le repas, puis quelques gorgées de bière et de boissons non alcoolisées une fois au billard.

coupure électrique total”

La suite de l’histoire, elle ne s’en souvient plus. Ce sont ses amis qui le lui ont dit. Après quelques minutes, elle leur faisait savoir qu’elle ne se sentait pas bien. « Ils m’ont emmené dehors, j’étais à peine capable de marcher. J’ai commencé à vomir partout et j’ai eu un coupure électrique total après », raconte-t-elle.

«Je sais que plusieurs personnes ont pu avoir accès à nos lunettes. Nous avons été un peu négligents à ce sujet car il s’agissait de tables partagées entre les tables de billard. Parfois, nous laissions nos verres traîner sur la table là où se trouvaient les verres des autres.

— Léa*, victime d’une intoxication au GHB

Bien sûr, elle ne s’attendait pas à ce que sa soirée se termine ainsi. Elle passe la nuit à subir les conséquences de l’ivresse. “J’avais des tremblements vraiment excessifs, sur tout mon corps, mes bras, mes jambes qui bougeaient”, révèle-t-elle.

Sachant que la substance disparaît rapidement de l’organisme, entre 10 et 12 heures après son ingestion, ses amies se sont procurées un kit d’urine pour tenter de voir si elle avait été droguée. «Je savais que j’avais été empoisonnée au GHB à mon insu», raconte Léa.

«C’est effrayant», déplore-t-elle. “Je ne comprends pas comment des hommes, et j’imagine qu’ils étaient jeunes, mais ce n’est qu’une supposition, pourraient être excités par l’état dans lequel je me trouvais.”

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Léa* envisage de se procurer des pochettes antidrogue et des dessous de verre permettant de détecter les traces de GHB kétamine, distribués par certains organismes de la région. (François Gervais/Le Nouvelliste)

Depuis, elle se demande si elle oserait retourner dans un bar de sa ville natale, où elle ne vit plus, voire même consommer à nouveau de l’alcool. Une chose est sûre, elle envisage de se procurer des pochettes anti-drogue et des dessous de verre permettant de détecter les traces de GHB kétamine, distribués par certains organismes de la région.

«Le meilleur conseil que je donnerais aux filles qui sortent est de toujours amener des amis fiables avec vous. Parce que si j’avais été laissé là, après ça, j’aurais été une proie extrêmement facile pour faire n’importe quoi.

— Léa*, victime d’une intoxication au GHB

Déposer une plainte?

À la police de Trois-Rivières, même si quelques cas ont fait les manchettes ces dernières années, on assure que la situation est sous contrôle et qu’on appelle rarement le service pour ce type de question. «Il faut noter que cela se fait régulièrement et que, danger, si vous venez à Trois-Rivières, vous risquez de vous empoisonner, nous n’en sommes pas là», souligne Luc Mongrain, porte-parole.

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Sergent Luc Mongrain, porte-parole de la police de Trois-Rivières. (Stéphane Lessard/Archives Le Nouvelliste)

Malgré cela, ce dernier admet qu’il est très difficile, voire impossible, d’assembler des preuves dans un événement comme celui-ci. «Je vous dirais qu’il n’y a aucun dossier, je crois, initié par Trois-Rivières qui ait abouti à une condamnation de ce niveau-là.»

“Nous ne nions pas que ces événements auraient pu se produire, mais pour étayer la preuve devant le tribunal, nous avons vraiment besoin de l’élément de base qui est la confirmation. […] que la personne, on a trouvé cette substance dans son corps», poursuit le sergent.

« Après, c’est toute la partie enquête, essayer de voir si nous avons des images vidéo. Sommes-nous capables de voir quelle personne ? Parce qu’il est si facile, disons, qu’une personne mal intentionnée vienne déposer cette substance.»

— Luc Mongrain, porte-parole du Service de police de Trois-Rivières (DPTR)

Léa est du même avis, c’est pourquoi elle n’a pas contacté les enquêteurs. « Qu’est-ce que ça me donne de porter plainte ? Qu’est-ce qu’ils vont faire ? Ils ne peuvent rien faire, il y avait des tonnes de monde dans le bar, ce n’est pas possible d’aller interroger tout ce monde. « De toute façon, trouver des preuves ne fonctionnera pas », explique-t-elle.

S’il reste presque impossible de traduire en justice les personnes qui consomment des drogues du viol, existe-t-il des moyens de prévenir les empoisonnements ? «La première précaution est de toujours avoir son verre sous surveillance», explique M. Mongrain. “Malgré tout, si c’est celui qui sert la consommation qui le fait dans son dos, là encore, ça peut arriver à tout moment.”

Soins disponibles

Depuis décembre 2023, toutes les salles d’urgence de la province sont équipées de kits d’urine légaux capables de détecter plus de 200 substances, dont le GHB. Il peut donc être conseillé de se rendre à l’hôpital si des symptômes d’intoxication sont détectés.

Sur place, les infirmières peuvent réaliser diverses manœuvres médicales, comme administrer une solution d’aide à la réhydratation, administrer des médicaments, ou encore prendre du sang pour valider la présence de certaines substances dont le GHB.

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Depuis décembre 2023, toutes les salles d’urgence de la province sont équipées de kits d’urine légaux capables de détecter plus de 200 substances, dont le GHB. (Stéphane Lessard/Archives Le Nouvelliste)

« Il est important de noter que le test de dépistage du GHB nécessite un consentement libre et éclairé, donc que la personne soit en mesure de donner son consentement », précise Kellie Forand, préposée à l’information au CIUSSS de la Mauricie-et-du. -Centre du Québec. “Dans le cas d’une personne dont l’état est significativement altéré, il ne lui serait pas possible de donner son consentement et donc de procéder aux tests.”

C’est en partie là que réside le nœud du problème, et précisément parce que la substance est appelée « drogue du viol », il devient difficile d’accorder son consentement une fois sous ses effets. Comme dans le cas de Léa, ses amis lui ont proposé de l’emmener à l’hôpital, mais elle a refusé, même si elle n’en a aucun souvenir.

Il faut ajouter à cela que les résultats des analyses d’urines légales réalisées dans un établissement de santé peuvent mettre plusieurs mois avant d’être communiqués à la victime. Ceux-ci doivent au préalable être analysés par le Laboratoire des Sciences Forensiques et de Médecine Légale.

« Les résultats constituent une preuve qui pourrait être utilisée dans le cadre d’une procédure judiciaire si la personne souhaite porter plainte », poursuit la porte-parole du CIUSSS MCQ. “Dans tous les cas, au-delà de notre prise en charge concernant son intoxication et des tests, notre équipe est là pour l’accompagner dans cette situation.”

Une équipe spécialisée

Le gouvernement du Québec a annoncé mardi la mise sur pied d’une unité de coordination pour appuyer les forces policières enquêtant sur des cas où des personnes ont été droguées à leur insu. Le Laboratoire des sciences judiciaires et de médecine légale recevra 2,3 millions de dollars pour créer cette équipe.

L’objectif est que l’information circule de manière adéquate entre les différents acteurs afin de réussir à détecter si des lieux sont particulièrement visés ou si une substance circule dans une région donnée.

* Prénom fictif

 
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