C’est au retour de la marée, lundi en début d’après-midi, que le drame s’est déroulé. Un accident d’autant plus rare qu’il s’est produit tout près du rivage de la pointe de la Fumée, dans à peine plus d’un mètre et demi d’eau. Bousculée par une vague, la barge ostréicole de Philippe Raingonneau (1) s’est immédiatement retournée, projetant en un instant son employé par-dessus bord. Coincé sous le poids, le corps d’Yves Le Meur, 44 ans, n’a été retrouvé que dans la nuit de lundi à mardi.
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« Sud-Ouest ». Le mauvais temps pourrait-il expliquer votre naufrage ?
Philippe Raingeonneau. Nous avons été victimes d’une vague un peu plus forte que les autres. Rien qu’une vague stupide qui a déstabilisé le bateau en déplaçant notre chargement. Mais j’ai déjà navigué des dizaines de fois dans des conditions bien pires que cela sans rencontrer le moindre problème. Depuis vingt ans que je fais ce métier, je n’ai jamais eu d’ennuis. D’ailleurs, nous étions partis tôt pour la ferme ostréicole, et le temps n’était pas encore très mauvais. Nous n’étions qu’à cinquante mètres du col de Fort Enet…
A une époque où la mer n’était pas encore très haute ?
Quand je suis tombé, l’eau m’arrivait jusqu’à la taille. Le drame, c’est qu’Yves s’est retrouvé coincé sous l’eau, entre la barge et le chargement. J’ai tout fait pour le libérer, en vain, c’était horrible. Je savais qu’après cinq minutes sans respirer, c’était fini. Jusqu’au bout, j’ai essayé mais, hélas, je n’avais plus aucun doute. Quelqu’un du rivage me criait de partir, car la mer montait rapidement et je m’enfonçais dans la boue en essayant de le retrouver. L’eau jusqu’au cou, impuissante. J’ai fini par me traîner jusqu’au rivage.
L’eau montait très vite et je m’enfonçais dans la boue en tentant de secourir mon employé coincé sous le bateau.
Malgré l’ampleur des efforts, les secours n’ont pas réussi à retrouver son corps avant la nuit…
Avec la marée montante, la barge dérive et il devient impossible de déterminer l’emplacement exact du naufrage. Quant aux plongeurs, ils ne voyaient pas à plus de trente centimètres. J’ai compris qu’il faudrait attendre la marée basse. L’hélicoptère de la Sécurité Civile est revenu à une heure du matin pour hisser deux plongeurs sur place. Yves était là, coincé jusqu’aux jambes sous une armature métallique. Un troisième homme les rejoignit depuis le sol car ils ne parvenaient pas à le libérer.
Yves Le Meur était-il votre seul employé ?
Oui, nous avions pris l’habitude de travailler ensemble depuis huit mois. Un type bien, marié, père de cinq enfants. Motivé pour le travail et ponctuel, ce qui est plutôt rare dans le métier. Ça y est, je suis parti avec lui, et je suis revenu seul. C’est terrible.
(1) Une barge ostréicole de 8,30 m, en aluminium.
