« Projectiles potentiels », bouteilles en acier inoxydable interdites dans deux écoles de l’Outaouais

La décision insolite, prise à la suite d’incidents violents et d’une intervention de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) cet hiver aux écoles Colline et Sommet, à Val-des-Monts, est loin de faire l’unanimité, avec de nombreux disant que nous manquons le véritable objectif.

Selon nos informations, même s’il existe un consensus autour de l’importance de prévenir les violences dans les écoles, les nouvelles consignes en vigueur depuis ce mois font des grimaces tant en interne que chez les parents de ces établissements.

Dans une communication mensuelle aux parents consultés par La droitel’école du Sommet indique que les membres du comité de santé et sécurité du travail du centre de services scolaire (Des Draveurs) ainsi que les inspecteurs de la CNESST sont venus dans la communauté et ont énuméré « les gestes à poser immédiatement » afin de réduire les risques d’accidents et assurer la sécurité des étudiants et du personnel.

« Parmi les actions à poser, il faut veiller à retirer tous les objets qui pourraient blesser une personne et servir de projectiles en situation de crise. […] Parmi les objets à retirer, des bouteilles d’eau en métal ont été identifiées. Malheureusement, nous sommes obligés de retirer ces bouteilles, écrit la direction dans ce message. On peut continuer d’autoriser les bouteilles d’eau en plastique, mais il faut déterminer un emplacement autre que les bureaux (par exemple une étagère de bibliothèque au fond de la classe) pour que les élèves puissent continuer à les utiliser.

Une pente très glissante, estime un parent

Pour la mère d’un élève de cette école primaire, qui a préféré ne pas s’identifier pour ne pas nuire à son fils, cette règle – qui viserait aussi l’équipe de l’école – est complètement absurde car elle balaie en quelque sorte les fondamentaux. problèmes sous le tapis.

>>>>>>

L’école Sommet, à Val-des-Monts, a émis une directive qui est loin de faire l’unanimité. (Simon Séguin-Bertrand/Archives Le Droit)

« Il est tout à fait déplorable de pénaliser les élèves et de leur retirer des équipements meilleurs pour leur santé et l’environnement plutôt que de s’attaquer au vrai problème des comportements violents et dangereux en offrant davantage de soutien et de services à ces élèves, dit la mère. C’est une pente très glissante que de retirer encore plus de droits et de matériel aux élèves en raison des problèmes de violence dans les écoles, puisque tout peut être un objet dangereux : une chaise, un crayon et bien plus encore. Où sera la limite ?

Ce dernier rappelle que le problème fondamental auquel nous devons nous attaquer en tant que société n’est pas la bouteille métallique mais plutôt « le comportement de certains enfants » et le manque de personnel.

Le bulletin mensuel envoyé aux parents précise également qu’« il est entendu que (l’école) continuera à utiliser du matériel d’arts plastiques ou d’autres matériaux qui pourraient être plus à risque (ex : ciseaux à bouts pointus, couteaux pour un atelier de cuisine, etc.) ) mais (que nous) devons veiller à ce que leur utilisation soit surveillée et stockée pendant les périodes de transition ou lorsqu’ils ne sont pas utilisés.

Une mesure « excessive »

Le Syndicat du soutien scolaire de l’Outaouais (SSSO-CSQ), qui confirme que des rencontres impliquant les ressources humaines, le personnel, les instances syndicales et un inspecteur de la CNESST ont eu lieu plus tôt cette année à la suite de « nombreux incidents » dans ces écoles, soutient que les directions ont choisi cette avenue (en ce qui concerne les bouteilles) de leur propre gré.

« La mesure est excessive, ce n’est pas une solution pour protéger les gens, intimider qui que ce soit n’est pas la solution. C’est l’école qui a décidé d’aller plus loin. […] La bouteille d’eau peut devenir un projectile, oui, mais tout peut devenir un projectile, une arme, on est allé à l’autre extrême alors qu’on aurait pu trouver un juste milieu», s’exclame la présidente, Kim Lafleur-Lauriault.

>>>>>>

Kim Lafleur-Lauriault, présidente du Syndicat du soutien scolaire de l’Outaouais (SSSO-CSQ), estime que cette mesure est exagérée et ne répond pas aux vrais enjeux. (Simon Séguin-Bertrand/Archives Le Droit)

Celui-ci soutient que la CNESST n’a fait aucune recommandation en ce sens et qu’elle a au contraire préconisé la mise en place de mesures adaptatives qui ne sont pas des interdictions car l’école s’avère être fondamentalement « un milieu éducatif ».

« C’est un milieu de vie, pas un milieu carcéral. Par exemple, nous avons discuté de l’idée de placer la bouteille d’eau ailleurs au lieu de l’avoir à chaque coin du bureau. Cela pourrait être de dire : on la met à terre, par exemple. Qu’il s’agisse d’une bouteille en plastique ou en métal, si vous la jetez, cela peut faire mal. Quand la CNESST arrive (sur un lieu de travail), c’est parce qu’il y a beaucoup d’incidents (qui mettent en danger la sécurité des travailleurs), mais était-ce lié aux bouteilles d’eau ? Certainement pas.”

— Kim Lafleur-Lauriault, présidente, Syndicat du soutien scolaire de l’Outaouais (SSSO-CSQ)

Le président du SSSO-CSQ rappelle que c’est aussi par la sensibilisation qu’il faut passer par pour contrer les actes violents, quelle que soit leur ampleur, dans une école.

« Quand Jean-Pierre mord, gratte ou frappe et qu’il y a une intervention effectuée, il peut être suspendu. Nous ciblons souvent l’étudiant. Mais cela ne permet pas au travailleur de se sentir plus en sécurité désormais. Il faut voir quelles mesures prendre pour s’adapter et pour ne plus subir de tels agissements, dit-elle. Et il faut sensibiliser, nous avons le personnel pour le faire. Le problème est que nous agissons moins en prévention parce que nous éteignons toujours les incendies.»

Quand « les fils se touchent »

De son côté, le Syndicat scolaire de l’Outaouais (SEO) se dit également bien conscient de cet enjeu « nuancé » et affirme que les bouteilles métalliques faisaient partie des discussions conjointes mais que l’option d’un réaménagement des locaux a été davantage recommandée, de manière à « minimiser les risques ». Que chaque élève place sa bouteille sous le bureau ou dans son sac faisait partie des exemples évoqués.

« Un étudiant qui pique une crise et la première chose qu’il a sous la main est une bouteille d’eau pleine, s’il la jette, cela peut causer des dégâts. Les fils se touchent et il n’y a pas de censure, alors qu’autrefois, il y avait plus de barrières lorsque l’enfant se retrouvait nez à nez avec un adulte», décrit la présidente Nathalie Gauthier.

Affirmant que cette situation est une sorte de rappel indirect que « les violences à l’école sont loin d’être résolues », le dirigeant syndical est cependant aussi d’avis qu’on aurait pu faire les choses différemment. En d’autres termes, il y a un accord sur le fond, mais pas sur la forme.

« Les interdictions, je ne pense pas que ce soit la bonne voie à suivre. Nous sommes obligés de réfléchir à cela (de telles mesures) car c’est devenu vraiment effroyable le nombre de crises violentes, même chez les tout-petits, que nous vivons quotidiennement, dit-elle. Ce n’est pas la bonne voie, mais nous en sommes là dans la remise en question de la violence.»

>>>>>>

La présidente du Syndicat de l’éducation de l’Outaouais, Nathalie Gauthier. (Patrick Woodbury/Archives Le Droit)

À titre d’exemple, elle dit avoir rencontré un membre du personnel de l’école lors de la grève de l’automne dernier qui a subi, entre autres, un traumatisme crânien et une fracture de la clavicule lors d’incidents violents distincts avec le même écolier.

« Il y avait des corrections à faire (dans ces milieux). Quand la CNESST s’en mêle, cela signifie que la sécurité physique et/ou psychologique (des travailleurs) est en jeu», a-t-elle déclaré.

Citant en exemple l’incident qui a fait beaucoup les manchettes à l’hiver 2023 à Gatineau – un enseignant a été transporté à l’hôpital après avoir reçu un objet lancé au visage par un élève – le président du SEO rappelle que les employeurs doivent agir avec célérité lorsque le CNEEST intervient.

« L’année dernière, le rapport était vraiment très cinglant envers le CSS (Portages-de-l’Outaouais) et la direction. Il y a des obligations à respecter et quand on dit qu’il faut faire des corrections, c’est maintenant », explique-t-elle.

Mme Gauthier soutient que les événements violents de toutes sortes – qui selon elle doivent être systématiquement dénoncés et compilés – représentent tout un travail de gestion pour les enseignants, dont la tâche est déjà lourde.

“Quand cela arrive, on ne peut évidemment pas sortir l’élève et le laisser seul dans le couloir, il faut appeler quelqu’un qui viendra s’occuper de l’enfant jusqu’à ce qu’il soit calme, il faut sortir de la classe avec les autres élèves, etc., raconte-t-elle. Et parfois, cela prend beaucoup de temps avant que le problème soit résolu, c’est beaucoup de temps d’apprentissage perdu. Quand vas-tu le reprendre ? Les enseignants trouvent cela difficile.

>>>La CNESST affirme être intervenue dans ces deux écoles de Val-des-Monts à la fin février mais qu'aucune recommandation relative à l'interdiction des bouteilles en acier inoxydable n'a été formulée.>>>

La CNESST affirme être intervenue dans ces deux écoles de Val-des-Monts à la fin février mais qu’aucune recommandation relative à l’interdiction des bouteilles en acier inoxydable n’a été formulée. (Simon Séguin-Bertrand/Le Droit)

Des corrections ont été demandées par la CNESST

La CNESST explique être intervenue dans ces deux écoles primaires le 26 février pour vérifier la mise en œuvre de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST) et de la réglementation applicable aux mesures de prévention visant à réduire les risques de violence. dans l’établissement et assurer la santé et la sécurité des travailleurs. Dans les deux cas, elle soutient que l’employeur n’a pas tardé à corriger la situation.

« La CNESST a émis des avis de correction. Ces avis de correction ont été effectués. Les inspecteurs de la CNESST n’ont toutefois pas recommandé d’interdire les bouteilles en acier inoxydable. Le choix des moyens pour éliminer un risque ou un danger appartient à l’employeur. La CNESST se concentre sur la prise en charge de la santé et de la sécurité au travail », précise-t-on.

Invité à réagir à cette décision par deux de ses établissements, le Centre de services scolaire des Draveurs (CSSD) a refusé de commenter.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV Plus de 50 chorales d’enfants et de jeunes à Neuchâtel pour le festival SKJF – rts.ch – .
NEXT La Tour Vagabonde espère rester à La Poya pendant 5 ans