Loi SRU, Jean-Michel Perret, “les maires sont pris en otages !” – .

Loi SRU, Jean-Michel Perret, “les maires sont pris en otages !” – .
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A travers une association nouvellement créée, les maires du Gard entendent porter à Paris les incohérences de la loi SRU relative à la production de logements sociaux. Entretien avec Jean-Michel Perret, maire de Saint-Hilaire-de-Brethmas en action.

Qu’est-ce que la loi SRU ?

Solidarité et rénovation urbaine, elle a été votée en 2000 sous l’impulsion de Jean-Claude Gayssot, ministre du Logement. Elle impose entre 20 à 25 % de logements sociaux pour les communes de plus de 3 500 habitants, situées dans un ensemble de communes de plus de 50 000 habitants. Les zones tendues marquées par une forte demande de logements sont soumises au taux de 25%. À Saint-Hilaire-de-Brethmas, on est en zone décontractée, donc 20 % s’appliquent.

Etes-vous contre ?

Absolument pas, cela fait partie de mon ADN politique et de celui de mon équipe municipale depuis mon élection en 2014. Le logement doit être abordable pour tous, si j’avais été ministre à l’époque, j’aurais fait cette loi. Ce qui pose problème, c’est qu’il ne s’adapte pas aux problématiques locales et à la spécificité des territoires.

Un exemple de spécificité locale ?

En termes d’urbanisme, nous avons une contrainte supplémentaire pour la construction à Saint-Hilaire-de-Brethmas. Une bruine parisienne ou normande n’est pas la même musique qu’un orage cévenol. Nous voici au confluent du Gardon et de l’Avène, deux rivières majeures. Avec mon équipe, nous avons donc pris la décision d’augmenter la capacité des bassins de rétention, pour passer du cadre légal de 100 litres à 200 litres par m2. Je me fais engueuler par les promoteurs et les propriétaires mais je l’accepte, sinon ça déborde et explose.

Vous évoquez également une charge foncière qui a explosé, quelles en sont les causes ?

La loi ALUR de 2015 a provoqué une augmentation de 30% du coût du foncier sur ma commune en moins d’un an. Il vise à faciliter la construction d’étages supplémentaires sur les bâtiments existants. Les propriétaires ont pu revendre leur maison à un prix nettement plus élevé. On est passé de 70 euros le m2 en 2014 à 100 aujourd’hui pour une maison individuelle classique. Le m2 constructible pour l’ensemble des opérations est passé de 25 à 40 euros. Cela alourdit évidemment la charge financière d’une opération de création de logements privés ou sociaux.

Quelles autres difficultés rencontrez-vous ?

La loi ZAN (notre article ici), la flambée des coûts de construction et des matériaux. Sans parler du gouvernement qui a, par le passé, contraint les bailleurs sociaux à baisser les loyers. D’un côté, les coûts de construction augmentent, de l’autre, les revenus diminuent. Un bailleur social n’a certes pas un objectif de rentabilité, mais il a celui d’équilibre économique. La crise du logement ? Macron ne s’en soucie pas du tout.

Un mot sur la rétention foncière ?

C’est l’autre problème important. Je ne peux pas forcer les propriétaires à vendre leurs terres pour faire du travail social. Il me faudrait justifier d’un intérêt général et engager une procédure d’expropriation. La propriété est un des acquis de la Révolution française, quelque chose de sacré. Le manque de logements sociaux n’est pas un motif d’expropriation. En attendant, j’ai encore une amende de 130 000 euros car je ne réponds pas aux objectifs de cette loi.

Certains maires manquent-ils de volonté ?

Oui clairement. J’ai hérité de l’héritage de mon prédécesseur qui a effectué six mandats, je me suis retrouvé pénalisé au maximum. Il y avait quelques logements sociaux mais moins qu’à Neuilly-sur-Seine. Proportionnellement, c’est ce que vous dites.

Qu’en est-il de cette tutelle de l’État ?

C’est le plus important. L’État nous a expulsés du siège du conducteur et nous a mis au volant. Il a ainsi pris le contrôle à travers le droit de préemption (le propriétaire du bien n’est pas libre de vendre son bien à l’acquéreur de son choix, ndlr), et l’examen des permis de construire. Il n’est pas normal que nous soyons toujours vilipendés, que nous soyons perçus comme horribles, sales et méchants alors même que nous faisons de notre mieux, avec des contraintes juridiques, économiques et humaines. Je pose une question, puisque l’Etat gère pour nous, pourquoi alors continuer à payer des amendes ? C’est comme si quelqu’un accélérait votre voiture et que vous deviez payer la contravention !

Les terres agricoles communales ne sont-elles pas une des solutions ?

Vous savez, nous ne sommes pas riches en terres. Nous avons des terrains agricoles ou forestiers mais ils ne sont pas constructibles. On a 14 hectares loin de tous réseaux, je ne vais pas m’amuser à construire un guetto de logements sociaux de toutes pièces au milieu de nulle part ? La véritable diversité sociale est avant tout géographique. Je ne plaide pas pour une société égalitaire, mais pour une société en paix avec toutes ses réalités sociales. L’ouvrier du bâtiment doit habiter à côté de son patron.

Les maires organisent-ils la résistance avec cette association ?

Ce n’est pas un mouvement de résistance, nous sommes pour la construction de logements sociaux, quelle que soit la tendance politique, ce sont les dispositions de la loi qu’il faut revoir. L’idée est de rassembler les maires défavorisés du Gard pour faire entendre notre voix au niveau gouvernemental. On fait ce qu’on peut, on finit par être pris en otage. Certains maires préfèrent rester en retrait, de peur d’être encore plus gênés par les services de l’État du Gard sur d’autres sujets…

 
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