Aider une rainette étoilée

Aider une rainette étoilée
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Depuis maintenant dix ans, des scientifiques du Biodôme de Montréal travaillent à sauver la rainette faux-grillon en pilotant un programme d’élevage de l’espèce en captivité. Des milliers de petites grenouilles ont ainsi été relâchées. Mais pendant ce temps, leurs habitats continuent d’être détruits au nom de l’étalement urbain.

Divers bacs remplis d’eau sont déposés sur les tables dans une salle située dans les coulisses du Biodôme, qui n’est pas accessible aux visiteurs. Au fond, on retrouve également des terrariums le long du mur. Ces installations en apparence banales jouent un rôle important dans la survie d’une espèce très médiatisée et de plus en plus menacée : la rainette faux-grillon.

« Ce que nous voyons ici, ce sont plusieurs milliers de têtards de rainette faux-grillon », souligne Emiko Wong, vétérinaire et scientifique principale en conservation au Biodôme, en faisant visiter la pièce. Devoir. Certains réservoirs contiennent également des œufs fraîchement pondus et d’autres sur le point d’éclore.

Le printemps est en effet la période de reproduction de cette rainette qui mesure un peu plus de trois centimètres de long et pèse environ un gramme. Il s’agit donc d’un moment critique pour la survie de l’espèce, qui doit, en quelques semaines seulement, assurer la création de la prochaine génération d’amphibiens.

La reproduction en captivité s’avérant actuellement trop difficile et imprévisible, les rainettes adultes sont capturées temporairement en milieu naturel et transportées au Biodôme afin d’y produire les œufs nécessaires au programme scientifique.

« Une fois les œufs éclos, les têtards grandissent jusqu’à atteindre un demi-centimètre. C’est à ce moment-là qu’ils commencent à se transformer. Ils vont progressivement réabsorber leur queue et développer des pattes, puis chercher à se déplacer davantage vers les milieux terrestres », explique Emiko Wong. L’ensemble de ce cycle se déroule au Biodôme et dure une quarantaine de jours.

Augmenter la survie

Un tel programme permet aussi de maximiser le nombre de petites grenouilles, fait valoir le vétérinaire. « Notre objectif est d’augmenter le taux de survie, car les rainettes sont déjà suffisamment confrontées aux menaces anthropiques, comme le changement climatique et la transformation des milieux naturels. »

Il faut savoir que les rainettes faux-grillon passent la majeure partie de leur année sur terre et qu’elles ne convergent qu’au printemps vers les étangs qui se forment alors. C’est là qu’on peut entendre leur chant, que l’on qualifie de « choral » lorsque plusieurs individus se trouvent dans la même zone. C’est aussi là qu’ils pondent leurs œufs.

C’est également ce qui se passe actuellement sur le chantier du prolongement du boulevard Béliveau, à Longueuil. Les rainettes se sont rassemblées dans les mares formées le long du tracé de cette future rue ce qui détruira une grande partie de leur habitat.

C’est dans ce contexte que la Ville multiplie les opérations de captage afin d’éliminer les amphibiens et de pouvoir relancer les travaux de construction du nouveau tronçon routier. Certaines rainettes ont été envoyées au Biodôme. Quant au projet de rue déjà en cours, il détruira définitivement « un point de passage nerveux » et des « habitats de reproduction » des espèces « particulièrement actives », selon un avis scientifique rédigé par des experts du gouvernement du Québec en 2021.

Un climat perturbé

Le dérèglement climatique rend également les années à venir plus incertaines, notamment en raison de la probable diminution de l’enneigement, qui pourrait nuire à la formation de mares printanières. Le programme du Biodôme est donc d’autant plus pertinent, selon Emiko Wong. « Si les mares temporaires s’assèchent trop vite, il y aura une forte mortalité des têtards. On pense donc que nous leur offrons une protection de l’environnement en les gardant dans un environnement captif pendant les premières étapes de leur croissance. »

L’objectif ultime est de faire en sorte que cette démarche, répétée année après année et soutenue par le gouvernement du Québec et des chercheurs universitaires, reconstitue des populations qui déclinent dangereusement en raison principalement de la destruction des milieux naturels.

« Si l’espèce se portait bien, nous n’aurions pas besoin de faire ce genre d’effort. Mais malheureusement, les menaces sont grandes», explique Emiko Wong. Selon les données disponibles, l’espèce a perdu plus de 90 % de son habitat au Québec. Ces dernières années, plusieurs cas de destruction illégale ont également eu lieu.

Résultat : selon un rapport sur les « menaces » daté de mars 2021 et établi par des experts gouvernementaux, moins de 25 % des populations présentes dans la province pourront survivre, à moins que les menaces grandissantes ne soient jugulées.

S’il est difficile de mesurer le taux de survie des rainettes une fois qu’elles se retrouvent dans la nature, les données indiquent que la reproduction assistée donne des résultats. Plus de 4 880 rainettes ont été relâchées depuis 2016. Certaines ont retrouvé leur milieu d’origine, tandis que d’autres sont destinées à évoluer dans des étangs aménagés dans le parc national du Mont-Saint-Bruno. Chaque printemps, des chants semblent indiquer la reproduction dans ce milieu naturel protégé.

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