nous avons goûté le burger de l’ex-chef de Trump

On a dégusté le burger de l’ex-chef de Trump à Lausanne

Après New York, Genève, Zurich, Dubaï, l’Irak et Singapour, Black Tap débarque à Lausanne. Autant vous dire que l’adolescent est aux anges. Image:

Black Tap arrive « enfin » à Lausanne. Au départ, il y avait deux fondateurs, Joe Isidori et Chris Barish. Le premier a travaillé dans la cuisine du président milliardaire, avant de se lancer dans la conquête des étoiles Michelin. La seconde a fait gonfler ce signe new-yorkais (et les ventres) de son malbouffe de qualité, où le burger dodu côtoie les milkshakes baroques. Immersion américaine-régressive.

24/04/2024, 19h0924/04/2024, 19h18

Tout a commencé par un piège. Dans lequel nous sommes évidemment tombés en tant que débutants. Avec notre moitié, il fallait trouver un endroit pour occuper et nourrir l’adolescent pendant les vacances.

Les algorithmes d’Instagram feront tout le travail.

De l’écran du smartphone va bientôt jaillir une explosion de couleurs criardes et dégoulinantes. Entre un film de Tim Burton et un torse fraîchement ouvert par un chirurgien. Une véritable scène de crime remplie de glaces, de bonbons et de crèmes, que seuls les enfants sont capables de fomenter dans des rêves interdits. Sans le savoir tout de suite, nous venions de faire connaissance avec un dessert aussi satanique que calorique, baptisé CrazyMilkshake™️.

Des créatures comme celle-ci, que Zendaya aimait :

Le 26 février 2016, Zendaya, alors jeune chanteuse, fête la sortie de la chanson Quelque chose de nouveau à New York, lors d’une soirée remplie de fans et de milkshakes de Black Tap.FilImage

Le seul bémol (pour les Lausannois) est l’obligation d’atteindre le bout du lac pour pouvoir vivre l’enfer du coin du ventre. Une fois le choc culturel digéré, l’univers Burgers et bières artisanaux Black Tap eu tout le temps d’infester nos nombreux préjugés. Parce qu’on en avait, au début. Des tonnes. « Encore un piège à touristes made in USA, avec une cuisine dégueulasse et une indigestion hors de prix »avons-nous crié silencieusement, tout en parcourant la carte avec le détachement émotionnel d’un médecin légiste.

Quelques minutes plus tard, nous hisserons lentement le drapeau blanc, car ce burger poulet frit, barbecue coréen, salade de chou au babeurre, coriandre, citron vert frais, mayonnaise épicée est une odieuse réussite. De quoi faire la paix avec Genève et des endroits qui ne payent pas de mine.

C’était il y a environ deux mois.

Depuis? Rien.

Enfin… jusqu’au mercredi 24 avril 2024.

«Enfin à Lausanne!»

Il aura fallu près de dix ans pour que la capitale vaudoise voit elle aussi son taux de cholestérol monter en flèche. C’est désormais chose faite, au cœur du centre-ville et avec une exclusivité mondiale dans son sac. (Patience, nous y reviendrons.)

Depuis sa création en 2015, dans un petit local situé sur Broome Street, à SoHo, le restaurant Black Tap a ouvert pas moins de vingt-six succursales. Six en Suisse, dont Verbier, Zurich et Bâle. C’est beaucoup, mais c’est explicable. Deux bons hommes d’affaires locaux avaient flairé la bonne idée, dès les premiers burgers vendus aux New-Yorkais.

A tel point qu’en 2017, deux ans après le début de l’aventure, Genève a accueilli le premier Black Tap du pays. A l’époque, l’un des fondateurs américains avait déjà promis Tribune de Genève pour faire de Lausanne sa prochaine victime. Son nom? Joe Isidori. Il vendra ensuite ses parts à son copilote, Chris Barish, pour partir à la chasse aux étoiles Michelin. Mais avant de trouver la recette du burger parfait, Joe a été chargé un jour de donner un coup de fouet aux cuisines d’un certain… Donald Trump.

L’actrice Katie Holmes, entre les deux fondateurs des burgers Black Tap, Chris Barish et Joe Isidori, lors de l’ouverture d’une nouvelle enseigne à Las Vegas, en décembre 2017.FilImage

Nous sommes au début des années 2000. Le jeune chef a 25 ans. Déjà aux fourneaux de Mar-a-Lago et de plusieurs golfs du milliardaire, Joe aura aussi la lourde tâche de nourrir les invités de son somptueux mariage avec Melania en 2005. Il mettra fin à son mandat de célébrité en dépoussiérant le restaurant de l’hôtel Trump International à Las Vegas.

En janvier 2017, alors que Donald venait à peine d’arriver dans le Bureau Ovale, les rumeurs grandissaient : qui serait le nouveau patron des cuisines ? A l’époque, selon Vice, le nom de Joe Isidori est bien placé. Bonnes ou mauvaises nouvelles? Joker. Disons simplement que le magazine Mangeur deviné avant tout le monde que la présidence Trump allait « détruire la cuisine de la Maison Blanche », avec « des steaks trop cuits et de la restauration rapide ». Ce sera finalement Cristeta Comerford, tenace patronne depuis 2005, qui restera à son poste.

Donc. Fermons la parenthèse politique américaine pour entrer dans le vif du sujet et Burger du bistro de New Yorkcuisiné pour la première fois mercredi à Lausanne.

Voici ce qu’est un NY Bistro Burger :

À l'intérieur? Prime burger, fromage cheddar vieilli, bacon, oignons rouges crus, iceberg, cornichon, sauce héritage.

À l’intérieur? Prime burger, fromage cheddar vieilli, bacon, oignons rouges crus, iceberg, cornichon, sauce héritage.image : fred valet

Situé à deux pas du métro Bessières, le Black Tap de Lausanne sent logiquement le neuf. La peinture fraîche colle encore aux barrières noires qui entourent la petite terrasse. De nombreux estomacs impatients se relaient pour retenir la porte d’entrée, également noire. C’est aussi l’une des marques de fabrique de cette enseigne qui a remporté cinq fois de suite le prix du meilleur burger de New York, depuis son ouverture.

Murs et chaises sombres, quelques graffitis trop polis (bonjour la Statue de la Liberté) et cuisines exposées. Côté ambiance, nous sommes entre le bowling provincial et l’atelier de l’artiste. Assez impersonnel pour accueillir « le milliardaire pressé au bar du coin, comme les gamins partageant un milk-shake »», nous dira plus tard Lorenz, le réalisateur pour la Suisse.

A douze et trente minutes, la tanière est déjà bondée. Le vieux rap US bat les enceintes, les casquettes Black Tap sont parfois renversées sur les cuisiniers et les grillades dégagent un parfum qui fait chanter les ventres. Les adolescents se bousculent et les billets sont chers. Direction le bar, cachette stratégique pour voir le ventre danser sur le feu. En plus du NY Bistro Burger, nous saluons un Crispy Chicken, des frites de patates douces et deux Coke Zeros. Attendre, on assiste avec amusement aux premières bourdes, dans une excitation palpable et uniforme.

« Non, non, pas de milkshake pour nous, il faut qu’on puisse travailler après. Mais enfin vous êtes à Lausanne !

Un voisin de bar

« Vous avez vu la taille de la cuisine ! On ne peut pas faire mieux », nous répondra l’homme, dans une veste noire ajustée, armé d’un sourire que l’on voit souvent sur les visages des hommes d’affaires heureux. Si Black Tap a snobé Lausanne pendant près de dix ans, c’est « parce que nous ne trouvions pas l’endroit idéal », apprenait-on juste avant de recevoir notre grande foule de gourmets américanisés.

Bon sang, ce n’est pas une bonne idée. Prêts au combat, père et fille décident alors de ne pas s’embarrasser de la moindre politesse. Bouche grande ouverte, c’est l’heure de la boucherie alléchante.

Verdict chaud ?

« Merde, ça déchire »

La gamine, qui sait très bien qu’un milkshake indécent l’attend dans quelques minutes.

Image

image : fred valet

Il faut avouer que la vraie force de Black Tap frappe immédiatement le fond du palais. Dans un cadre sans fioriture, sans prêcher aucune philosophie poético-culinaire, on se régale de burgers généreux et d’une qualité étonnante. Si la viande ou la salade viennent d’ici, les ingrédients magiques sont en revanche catapultés depuis les Etats-Unis. Pas question de « perdre l’ADN du projet » et pas question de frimer devant les clients en bricolant « la petite mayonnaise maison ».

Les clients ont donc droit aux fameux petits pains qui fondent dans la bouche, base secrète des sauces new-yorkaises et aux bonbons « introuvables ici » qui noient le CrazyMilkshake™️. « Par contre, tout est fait sur place, à la minute » et la sueur du cuisinier, qui lève ses deux pouces dans notre direction pour s’assurer que ça marche, le prouve.

Le burger smash du tsunami

Contrairement à la recette originale et à la vingtaine de succursales à travers le monde, Black Tap inaugure à Lausanne son premier menu composé uniquement de smash burgers. Cette technique tendance qui consiste à écraser fermement la viande sur le grill, pour en faire de fines feuilles de bœuf croustillantes. Ailleurs, comme à Genève, on a encore droit au monticule de notre enfance, impossible de se mettre à la gorge sans faire tomber trois tranches de tomate. La prochaine ville à succomber à la tentation du smash sera Atlanta.

Bon, ce n’est pas tout ça mais… un dessert ?

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photo : fred valet

Ce monstre de chocolat porte bien son nom : Brooklyn Blackout. La progéniture devra manger un glaçage au chocolat, des pépites de chocolat, un brownie au chocolat et une sauce au chocolat & fine chantilly. Bien sûr, tout cela serait un peu médiocre sans mille pépites de chocolat qui attaquent le vase comme des abeilles sur une ruche. A vingt boules la régression calorique, autant lécher le verre. Vous trouvez ça cher ? C’est à la fois légitime et… question de point de vue.

Avec des burgers à partir de vingt francs et des frites de patates douces à huit francs, on n’est pas chez McDonald’s et tout simplement pas chez Five Guys. Back Tap revendique sans sourciller son côté « haut de gamme », « car les produits sont de qualité et on repart complètement satisfait ».

«Le prix est la principale critique en Suisse romande, alors qu’à Zurich, ils s’en fichent. En Suisse allemande, c’est embêtant, surtout parce que nous n’acceptons pas les réservations.»

Lorenz, directeur pour la Suisse, assis dans sa filiale lausannoise, se réjouit que le coup de feu de midi se soit déroulé sans accroc.

Avant d’aller gaspiller notre graisse dans un coin de la rédaction de Watson, nous allons nous débarrasser d’un dernier doute sur le piège dans lequel nous sommes tombés il y a deux mois : « Oui, désolé, les milkshakes qui se répandent sur Instagram sont notre signature. Les gens viennent pour la première fois les voir de près. Ensuite, ils reviennent manger des hamburgers.

Et ce n’est pas tous les jours qu’un piège est aussi agréable en bouche. Reste désormais à savoir si Lausanne la bobo est prête à retomber en enfance.

 
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