Caroline Clément, préfète de Mékinac, en objets tranchants et plats

Caroline Clément, préfète de Mékinac, en objets tranchants et plats
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Massive, faite de bois et de pignons, la maison familiale domine majestueusement le Saint-Maurice. À l’intérieur, des espaces ouverts, des instruments de musique alignés au mur et une imposante cheminée donnent le ton. Préfète pour quelques heures, Caroline Clément nous accueille avec franchise et bonhomie – « Je n’ai pas pris le temps de faire le ménage… tu veux prendre un café ? Big Piles le tapis rouge !

Caroline Clément n’a jamais rêvé de politique. Son piano, ses trois enfants, son compagnon de toujours, sa famille élargie, son enseignement, son bénévolat, ses amis, la jeune femme était épanouie. Nous lui avons tiré sur la manche à différentes reprises, en période électorale, sans jamais la convaincre. Jusqu’à l’incendie de 2018.

« Il est temps de redonner »

Partis en escapade il y a quelques années, Caroline Clément et sa famille reviennent du week-end et découvrent leur maison en flammes.

C’est un pompier qui les accueille, en sueur et en suie. Dans la communauté très unie, le premier intervenant avait tiré in extremis les instruments de musique du feu, connaissant leur valeur pour la famille.

Le geste du pompier ouvre la porte à un élan de solidarité qui ne se démentira pas. Si l’incendie s’avère être l’œuvre d’un individu mal intentionné, le méfait ne pèse pas lourd comparé à la bienveillance générale. Les victimes en ressortiront avec un sentiment d’appartenance accru et construiront leur nouvelle maison sur les mêmes fondations. Pas question de partir !

La vague est telle qu’en 2021, la mère de famille acceptera enfin de s’inscrire sur les bulletins de vote, devenant ainsi la maire de ceux qui l’ont soutenue dans cette épreuve. “J’ai l’impression qu’il est temps de redonner.”

«Quand je suis devenu maire…»

Pour quelqu’un qui a toujours vécu à quelques pas de toute considération politique, l’apprentissage de la vie publique se fera de manière accélérée.

En quelques mois, les trois employés du bureau municipal annoncent leur départ, puis à l’automne 2022, la Commission municipale rend son rapport d’enquête sur l’ancienne administration et conclut qu’il s’agit d’« un cas grave de mauvaise gestion ».

« On m’a dit que d’habitude, quand la Commission arrive, on a deux ou trois mesures correctives à mettre en place… Le reste d’entre nous en avait sept !

— Caroline Clément, maire de Grandes-Piles et préfète de Mékinac

Les audits qui suivront révèlent l’ampleur du gouffre financier et alimentent la colère des citoyens. “Ils avaient tout à fait raison, mais je n’arrêtais pas de leur dire ‘donnez-moi la chance d’arriver'”, se souvient le maire. Rien n’y fait, les conseils municipaux se transforment en défoulement, et l’homme politique devient le paratonnerre des récriminations.

« Il ne faut pas mille citoyens pour vous attaquer, il en faut deux ou trois qui n’abandonnent pas… J’étais en train de me faire arrêter ! Je n’étais pas bon, je n’avais aucune expérience, j’étais trop jeune, je ne comprenais rien, je n’avais pas d’experts autour de moi pour m’expliquer… nomme le! »

— Caroline Clément, maire de Grandes-Piles et préfète de Mékinac

Celui qui a fait de la transparence un credo, et qui comprend qu’on peut s’indigner des années de dérive et de débâcle, en prend les coups. Jusqu’au 25 décembre 2022.

« Les deux genoux à terre »

Automne 2022, après un an de mandat, Caroline Clément sent monter en elle les premiers symptômes d’un profond stress. « On préparait le budget, je rentrais à la maison, mon cœur voulait sortir de ma poitrine. Je me suis levé le lendemain, ce n’était pas arrivé. J’ai regardé mon copain, je lui ai dit : “Ça est juste resté coincé, et puis ça s’en va.”

Les jours passent. Femme de famille et de communauté, Mme Clément compte sur le temps des Fêtes pour retrouver son aplomb. La maison est grande, la famille l’est tout autant, la tradition frappe à la porte, 50 convives sont attendus.

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La première partie du mandat de Caroline Clément comme mairesse de Grandes-Piles a été plutôt mouvementée. (Sylvain Mayer/Le Nouvelliste)

Dans les préparatifs, la tension monte. Les enfants s’occupent des petits détails tandis que les parents tentent d’orchestrer la situation dans son ensemble. Puis le sol cède sous les pieds de maman.

La mère est méconnaissable. Son partenaire la met sur le canapé. «Je pleurais, je tremblais, je criais…», se souvient-elle. Son peuple mettra une éternité à la calmer.

Une fois la crise passée, Caroline Clément convainc sa famille de ne pas annuler la fête. La visite arrive ainsi. Celui qui vient de subir les contrecoups d’une vague de stress accumulé ne saura tromper les plus intimes. Elle devra reconnaître que tout ne va pas bien. La rentrée au bureau s’annonce moins festive.

«Le cocktail complet!»

Celle qui a suivi de près les démissions et les problèmes de santé des élus qui ont fait la une des journaux – à Chapais, comme à Trois-Rivières – connaît parfaitement le film dans lequel elle joue actuellement.

Lucide, Caroline Clément a contacté son médecin dès le lendemain de Noël et a demandé un rendez-vous en urgence – « vraiment, je ne vais pas bien ! ». Le message a le mérite d’être clair.

La professionnelle accueille sa patiente et lui demande quelles sont ses attentes. Femme qui prend les problèmes à bras-le-corps, la maire répond sans détour. « Je veux dormir, je veux des antidépresseurs et je veux un psychologue ! Donnez-moi le cocktail !

Une période de repos et de retraite commence pour l’homme politique, avec l’artillerie lourde en appui. La sensibilisation se déroule sur quatre mois. Un psychologue et des Affaires municipales sont impliqués.

« Faire plaisir »

L’autre partie de la « guérison » du maire se jouera sur une partition plus connue. Le pianiste de formation trouve un recul salvateur au clavier.

En marge de la politique, Caroline Clément est aussi l’une des voix des P’tites Germaines, un groupe de musique émergente mauricien, qui aborde sur scène les tabous de la sexualité.

C’est Julie Cossette, l’autre moitié féminine du groupe, enseignant la sexualité à une clientèle adulte, qui écrit la plupart des textes – le groupe comprend également trois Germain, aux cordes et à la batterie. La mascotte du groupe, « Clite Eastwood », un clitoris duveteux, a pour seule mission de « faire plaisir ». On comprendra qu’on est ici au nom d’une musique engagée et quelque peu délurée.

En abordant son parcours musical, qui s’est également déroulé sur des thèmes beaucoup plus classiques, la préfète de Mékinac s’ouvre sur un pan de sa vie qu’elle a d’abord tenu à distance de ses fonctions politiques – tout comme son rôle de mère, central dans sa vie. équilibre.

Pour se remettre sur les rails, Caroline Clément dit avoir compris qu’il lui fallait concilier les « trois M » de sa vie – la musicienne, la mère, la maire.

« C’est comme si avant cela, je ne supportais pas de me présenter à la mairie, de voir l’attitude des gens changer à mon égard. J’ai dû accepter une certaine forme de notoriété, puis de fierté.

— Caroline Clément, maire de Grandes-Piles et préfète de Mékinac

En acceptant son rôle, la première magistrate a également compris qu’il se double d’une certaine forme d’autorité.

“Il y a des limites”

De retour au bureau, la maire passera en revue tous les outils dont elle dispose pour relancer la machine sur de nouvelles bases. Tout y passe, à commencer par la manière de tenir les séances publiques du conseil municipal.

« Un professeur qui arrive en début d’année, qui semble très cool, la classe risque d’aller de tous côtés, car il n’y a pas de limites », dit celle qui a fait beaucoup de travaux de remplacement avant de revêtir ses habits de maire.

Caroline Clément présidera désormais les réunions, encadrant les débats de manière beaucoup plus stricte. La discipline qu’elle impose aux citoyens s’adresse également aux autres élus autour de la table. Finies les interventions intempestives et désordonnées, décide-t-elle. “Je pense que cela a fonctionné parce que cela s’adressait à tout le monde.”

La maire a désormais son code de conduite à ses côtés. Si on lui pose des questions sur la transparence, elle se réfère à la définition qu’elle a sous la main. Si une réponse ne peut être donnée immédiatement, elle est reportée à la séance suivante. Il n’est plus question de céder aux éclats et aux invectives.

“Je ne vais pas me battre”

Après avoir connu des vents contraires, Caroline Clément aborde son nouveau mandat à la MRC en toute connaissance de cause. La mobilisation de l’opposition au projet d’hydrogène vert de TES Canada et ses 140 éoliennes a poussé son prédécesseur vers la sortie. Le préfet veut instaurer un climat plus serein, sans pour autant ignorer le débat.

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Le mandat de Caroline Clément comme préfète, à la MRC de Mékinac, débute sur fond de tension. (Stéphane Lessard/Archives, Le Nouvelliste)

«J’essaie de lire et de m’informer le plus possible», explique Mme Clément, en faisant référence aux études, rapports de recherche, rapports du BAPE et autres correspondances qui atterrissent quotidiennement dans sa boîte courriel.

Pourtant, le projet TES est un élément parmi tant d’autres dans le plateau déjà bien rempli des élus locaux, explique-t-elle : « on ne peut pas être experts en tout ! »

Pas question pour autant de prendre des raccourcis. Comme son prédécesseur, la préfète de Mékinac affirme qu’il faudra du temps pour répondre aux inquiétudes, et assure que chacun aura la possibilité de s’exprimer. Une réunion de concertation sur le règlement de contrôle intérimaire est également au menu le 29 avril. S’il peut être amélioré, les élus ne manqueront pas à leur devoir, insiste-t-elle.

Caroline Clément rappelle cependant que la MRC doit composer avec un encadrement qui dépasse la seule volonté des décideurs locaux.

« Il y a aussi une réalité gouvernementale, on ne va pas la cacher, il y a quelqu’un, quelque part, qui a dit oui pour 150 mégawatts d’électricité. [consentis par Hydro-Québec].»

— Caroline Clément, maire de Grandes-Piles et préfète de Mékinac

L’élu convient que le climat est tendu et que la grogne ne va pas s’estomper par enchantement. « Je redoute la séance du 29 avril, c’est sûr ! Celle qui a déjà résisté à la tempête dans sa propre ville est pourtant convaincue que la question peut être débattue de manière civilisée.

Il va falloir que les gens continuent à vivre ensemble, avec ou sans éoliennes, observe la maire, musicienne et mère de famille. Autant le faire en harmonie, se permet d’espérer la désormais préfète.

 
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