Par Modou Fall
Diembéring, 21 avril (APS) – Face à l’érosion côtière qui réduit de plus en plus les superficies rizicoles et menace les habitations, les populations de la côte sud tentent de faire face à la situation la plus urgente, avec des solutions locales, à travers le reboisement et l’installation de Des épis maltais pour limiter l’avancée de la mer, en attendant l’intervention des pouvoirs publics pour des solutions plus durables.
L’état de dégradation du littoral inquiète les habitants et les autorités locales, impuissantes face aux vagues qui risquent d’emporter une partie de leur territoire.
Populations locales, élus locaux et partenaires ont développé des solutions de fortune pour sauver quelques hectares de plage et de végétation, principales barrières de protection des rizières et des habitations de Diembéring, contre l’avancée de la mer.
Abdourahmane Diallo, adjoint au maire de cette commune, s’émeut du niveau de destruction de la plage et des arbres côtiers de ce village côtier.
« Il y a une situation catastrophique. Nous voici en présence d’un cimetière d’arbres. Cette situation, à laquelle nous assistons impuissants, est grave et difficile à décrire », reconnaît l’élu local.
L’avancée de la mer a atteint des proportions qui dépassent les moyens de la commune de Diembéring, note M. Diallo, soulignant l’existence de solutions locales initiées par la mairie et ses partenaires, pour contenir l’avancée de la mer.
« Chaque année, nous réalisons des reboisements sur le littoral avec le service des eaux et forêts et le conseil régional de la jeunesse. Néanmoins, nous demandons à l’État et aux organisations internationales des moyens colossaux pour contenir la menace de l’avancée de la mer », a-t-il confié.
Épis maltais et barrages anti-sel pour récupérer les rizières
D’autres solutions comme l’introduction d’épis maltais sont également entreprises par les communautés locales insulaires de Diembéring et leurs partenaires, pour ralentir l’avancée de la mer vers leurs habitations ainsi que vers les rizières.
Les épis maltais sont des méthodes douces testées pour limiter l’érosion côtière. Ils sont réalisés avec des épis en bois, des pneus et des feuilles de palmier installés sur le rivage pour retenir le sable.
« Sur l’île d’Ourong, leur installation a donné des résultats positifs, alors que, dans un passé récent, la mer dans sa progression avait envahi nos cimetières. On pouvait voir les ossements de nos morts en plein air», confie Omar Gomis, un habitant de l’île. Il appelle à soutenir les insulaires dans la lutte contre ce phénomène.
Sur l’île de Diogué aussi, « la mer a fini d’occuper une bonne partie de la plage », souligne Amy Guèye, une habitante de l’île. « À Diogué, pour faire face à l’avancée de la mer, nous avons essayé de stabiliser le sable, à l’aide de filets de pêche, de pneus, ou encore de bois. Grâce à ces solutions de fortune, nous avons réussi à stabiliser progressivement le sable », se réjouit-elle.
« Par la suite, nous avons installé des épis maltais contre l’érosion côtière, ce qui nous a permis d’avoir une petite amélioration », précise Mme Guèye.
Le projet de renforcement de la résilience économique et environnementale des zones côtières de la base Casamance (REEZO) a installé des épis maltais dans les villages de Diogué, Cachouane, Gnikine et Carabane.
« Avec l’appui des services techniques de l’État, nous avons apporté des solutions douces via la mise en place d’épis maltais, un système approprié pour réduire l’effet de l’érosion côtière en favorisant l’accumulation de sable », explique le chargé de communication du projet, Babacar Dji Coly.
Le projet REEZO Casamance est financé par l’Union européenne (UE) et la Direction du Développement de la Coopération Suisse. Il vise principalement à fixer le sable sur le littoral et à éviter qu’il ne soit emporté par la mer et ainsi éviter le déferlement des vagues, principale cause de l’érosion côtière.
Les universitaires prônent des études sérieuses
Cependant, pour Tidiane Sané, enseignant-chercheur au département de géographie de l’UFR des sciences et technologies de l’Université Assane Seck de Ziguinchor, « le premier pas vers la lutte contre l’érosion côtière de la côte sud réside dans la recherche ».
« Pour vaincre ce phénomène qui menace les activités rizicoles et l’habitat des populations de Diembéring, il nous faut des études sérieuses sur l’avancée de la mer », préconise-t-il, insistant sur la nécessité « de documenter sérieusement ses différents phénomènes naturels ».
Tidiane Sané appelle à impliquer la population, la recherche, l’Etat, les organisations non gouvernementales mais aussi les programmes et projets de recherche nationaux ou régionaux dans cette étude.
De son côté, l’enseignant-chercheur Bamol Ali Sow recommande de « documenter l’érosion côtière à Diembéring, pour connaître le type d’infrastructures adaptées à mettre en place contre ce phénomène ».
Son collègue, Cheikh Faye, enseignant-chercheur au département de géographie de l’université Assane Seck de Ziguinchor, soutient que la solution à l’érosion côtière de la côte sud « est globale et non locale ».
“Nous devons nous attaquer aux causes de l’amplification du changement climatique et de l’augmentation des températures pour espérer faire face à ce phénomène”, dit-il, estimant que la principale solution à ce phénomène “est l’atténuation climatique”.
Il propose de faire en sorte qu’il y ait moins d’émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, en protégeant la végétation côtière qui permet la fixation des molécules de carbone.
Au niveau local, M. Faye appelle à des activités de reboisement et de préservation des forêts pour permettre la fixation des molécules de carbone nécessaires à la lutte contre le changement climatique.
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