quand la guérilla espagnole organisait la première brigade de résistance armée dans l’Aude… et en France

quand la guérilla espagnole organisait la première brigade de résistance armée dans l’Aude… et en France
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Fils d’un des piliers de ce mouvement, Raymond Hernando raconte comment les Républicains espagnols fuyant le franquisme et réfugiés dans le département, notamment à Carcassonne, contribuèrent à allumer la flamme de la lutte contre l’occupant nazi.

En février 1939, les réfugiés espagnols républicains, communistes ou anarchistes fuyant l’arrivée au pouvoir de Franco se comptent déjà par centaines de milliers dans l’Aude et les Pyrénées-Orientales (avec les conditions d’accueil inhumaines qui leur sont réservées). C’est dans ce contexte que sont créées la même année les entreprises de travailleurs étrangers (CTE) : constituées d’Espagnols (250 à chaque fois), ces groupes deviennent pour le gouvernement français un vivier de main d’œuvre libre, affectée à l’exécution de travaux d’intérêt général. ou un intérêt stratégique dans les zones frontalières ou dans les camps militaires. Antonio Hernando Villacampa faisait partie de l’un d’entre eux : en 1940, il se trouvait le long de la ligne Maginot au moment de l’invasion allemande.

Armes volées au commissariat

“12 000 Espagnols ont été faits prisonniers par les Allemands, mais mon père a réussi à s’échapper”, raconte son fils Raymond Hernando. Membre de la JCU (prononcer « Jota CU »), mouvement anarchiste espagnol, Antonio profite de ses réseaux pour s’engager, en France, dans un mouvement de résistance à l’occupant nazi dirigé exclusivement par des immigrés républicains. Passé par le Somail, Marcorignan où il a rencontré sa compagne (« Je suis né à Névian »s’exclame Raymond Hernando), l’homme s’installe finalement à Carcassonne : c’est là, dans la capitale du département, que se structure la lutte. « À l’hiver 1941, l’Union nationale des Espagnols est créée à Grenoble. Des relais commencent à se créer dans l’Aude et notamment à Carcassonne, où les réfugiés espagnols sont nombreux. Les premiers « réunions secrètes » s’est déroulée à la Villa Odette le long du canal face au quartier de La Prade, sur la Route Minervoise (le bâtiment existe toujours).

Raymond Hernando, fils d’un résistant espagnol.
DR – DR

« Le noyau initial était constitué d’une quinzaine d’hommes », précise Raymond Hernando. Le groupe prend le nom 234e bataillon, devenant par la suite le 5e brigade sur directive du Parti communiste. Le 7 mai 1942, il attaque le commissariat de Carcassonne afin de voler des armes. Bien que recherchés dès la fin 1941 par la Gestapo et la police française, ses membres mènent de nombreuses actions contre les Allemands, préfigurant la Résistance telle qu’elle sera connue plus tard dans tout le pays. « Ce fut la première brigade armée dans l’Aude et même en France, qui sera suivie plus tard par les francs-tireurs partisans »indique le spécialiste.

Information

Lien entre Parti communiste et JCU, dirigeants clandestins, agent de liaison, création du maquis militaire de la Haute Vallée… L’organisation se veut très structurée. « La brigade était divisée en quatre sections armées : mon père était affecté au 4e, précise le spécialiste. En quête d’informations, le groupe s’appuie sur un informateur du commissariat de Carcassonne, ainsi que sur des informations glanées dans les activités extérieures de l’un ou de l’autre (« Certains travaillaient comme ouvriers dans les mines de La Caunette et d’Agel »). Il finira par acquérir de nombreuses connaissances sur l’armée et la police allemandes, facilitant l’organisation d’opérations de déstabilisation. Raymond Hernando tient également à mentionner le nom de José Busto (“Je l’ai connu”), engagé dans la lutte contre l’oppresseur alors qu’il n’avait que 14 ans. Il cite également le Dr Delteil : « En plus d’organiser des réunions secrètes, il cachait des ressortissants espagnols blessés dans sa clinique de Carcassonne en 1943 et 1944 ».

Les guérilleros n’ont cependant pas oublié leur patrie. En octobre 1944, 10 à 12 000 d’entre eux tentent d’investir le Val d’Aran. “Les combattants venaient de toutes les brigades de France, mais l’Aude a envoyé le plus gros contingent.” Une trentaine d’hommes parviennent même à s’infiltrer à Huesca : parmi eux, Antonio Hernando Villacampa. De retour dans l’Aude, il sera décoré de la médaille des Forces françaises de l’intérieur (FFI). La juste reconnaissance d’un combat pour la liberté qui, à ses yeux comme à tous ses frères d’armes, ne connaissait pas de frontières.

Le côté obscur de la victoire

Raymond Hernando détient probablement le plus grand nombre de documents authentiques retraçant l’histoire de l’engagement de la guérilla espagnole en France pendant la Seconde Guerre mondiale. Il y a bien sûr les nombreux faits d’armes qui ont eu lieu pendant l’occupation… puis vient la libération. Un moment de joie incommensurable autant que de froide vengeance.

C’est ainsi qu’entre « 10 et 20 collaborateurs » ont été abattus à la caserne Laperrine à Carcassonne, sous « règlements de compte accélérés ». Antonio Hernando Villacampa a cependant sauvé l’un d’eux, un commissaire de son état, qui lui avait également fourni des informations, en lui annonçant qu’il avait reçu “l’ordre de [le] liquider” et l’invitant à fuir. Un geste que cet homme n’oubliera pas.

« Quelques années plus tard, il est venu prévenir mon père qu’une rafle de républicains espagnols allait être organisée par la France pour satisfaire la CIA : à leurs yeux, ils étaient tous communistes. Et comme mon père était de tous côtés… » Il ira se cacher dans le quartier carcassonnais de Trivalle, échappant ainsi à un aller simple pour l’Algérie.

 
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