Toutes les victimes ont décrit un manipulateur sans scrupules ayant recours à la violence verbale et physique pour arriver à ses fins. L’homme de Stanstead a encouragé ses victimes à couper les liens avec leurs familles pour « continuer à serrer les griffes » sur elles, comme l’a décrit une jeune fille devant le tribunal.
«Pour ma part, c’est du jamais vu», a expliqué la représentante de la Couronne, Me Stéphanie Landry, à propos de la manipulation à laquelle Brousseau s’est livré envers ses victimes.
Brousseau était présent dans la salle d’audience, mais n’a jamais regardé les victimes et leurs proches qui lisaient les lettres. Il semblait fixer un point dans l’espace, fermant parfois les yeux.
“Un monstre”
L’un d’eux, dont l’identité est protégée par un interdit de publication, était sous l’influence de Brousseau dès l’âge de 15 ans. « J’étais encore un enfant. J’ai enduré les viols et les agressions de peur qu’il m’arrive encore pire », a-t-elle déclaré avec courage.
Selon la jeune fille, Brousseau l’aurait menacée en lui disant qu’il était membre de la mafia italienne de Montréal. Cette même victime l’a même traité de « monstre » dans la salle d’audience.
Brousseau a également forcé cette jeune fille à filmer sa propre sœur lors de moments intimes, déclenchant une série de conséquences familiales.
« J’avais l’impression que ça venait de partout, je pleurais de désespoir », a lu au tribunal le père de ces deux jeunes filles. “Nous avions maintenant deux filles qui étaient ses victimes.”
Une deuxième jeune fille est venue témoigner et a également déclaré que Brousseau se faisait passer pour un membre d’un « groupe criminalisé ».
«Je n’avais que 12 ans lorsque j’ai été confrontée à un dérèglement sexuel», raconte d’emblée la jeune femme. Elle a également parlé de tous les impacts sur sa vie personnelle et sur sa famille des attaques qu’elle a subies.
« Drogues, alcool, fugues, pensées suicidaires, dégoût de soi. Incapable d’aller à l’école, incapable de faire confiance aux gens qui voulaient m’aider », a-t-elle déclaré au juge.
Pour les parents qui ont témoigné au tribunal, leur fille se rendait chez Brousseau pour faire du babysitting, ou même simplement pour aller rendre visite à une amie.
“Dire oui à un enfant qui veut dormir chez son ami, c’est ce que j’ai fait, sans savoir qu’un simple oui définirait la suite”, a lu une mère dans la salle d’audience.
« Menacé, humilié et terrifié »
Deux des ex-conjointes de Brousseau ont également raconté en détail au juge Benoit Gagnon la relation toxique dans laquelle elles étaient chacune plongées. «Je suis devenue une femme malheureuse et piégée», explique l’une d’elles.
“J’avais le sentiment d’être en captivité, impuissante”, a-t-elle poursuivi, peinant à retenir ses larmes et ses sanglots dès le début de son témoignage, par visioconférence.
« Menacée, humiliée et terrifiée », cette victime a expliqué avoir été « contrainte sur le plan sexuel à faire plein de choses qui n’étaient pas dans ses valeurs », a-t-elle lu au juge.
Une deuxième femme, qui avait partagé une vie conjugale avec Brousseau depuis novembre 2001, a également tenu à s’adresser au juge Gagnon. « Il avait ce don », a-t-elle lu dans la salle d’audience. «J’étais jeune, très naïf et très impressionnable.»
Les crimes de Brousseau dans cette relation ont culminé lorsqu’il a présenté deux choix à son partenaire. “Des représailles violentes ou une heure avec lui pour répondre à toutes ses envies”, a déclaré cet ex-conjoint, qui avait alors rapporté avoir été filmé à ce moment-là.
« Il a filmé tout mon viol. Il m’a forcé à dire des choses cochonnes pour m’humilier encore plus. Ces images resteront gravées dans ma tête jusqu’à ma mort, même si je souhaite qu’elles disparaissent. J’étais son “truc” pendant une heure”, a-t-elle ajouté.
À la fin du témoignage, le juge Benoit Gagnon a pris le temps de saluer le courage des victimes et de leurs proches, sur un ton posé.
“Vos paroles ne sont pas tombées dans le vide”
Brousseau a comparu devant le tribunal jeudi après-midi. Il s’est adressé en particulier aux victimes.
“Je veux que vous sachiez que je vous ai écouté et que vos paroles n’ont pas été vaines”, a-t-il déclaré. “C’est à moi de faire face à mes actes.”
La peine de 10 ans était le résultat d’une suggestion conjointe proposée par la Couronne et la défense. Elle a été ratifiée par le juge Benoit Gagnon jeudi matin au palais de justice de Sherbrooke.
« On ne peut pas parler de réadaptation pour le moment parce que cela mettrait la société en danger », a déclaré M. Landry.
«Une longue peine est ici absolument nécessaire pour dénoncer des crimes ignobles et abjects», a déclaré le juge Gagnon. « Ce que vous avez fait à ces femmes est inconcevable. S’il vous plaît, allez vous faire soigner, allez chercher l’aide à laquelle vous avez droit.
Brousseau a plaidé coupable à une douzaine d’accusations en janvier dernier, dont agression sexuelle armée et agression sexuelle avec la participation d’un tiers. Il a également reconnu des agressions, du voyeurisme et la production de pédopornographie, après avoir filmé certaines des attaques.
Le rapport présentenciel de l’accusé, détenu depuis le 31 mai 2022, a révélé des traits de personnalité « très narcissique », a expliqué le procureur lors de l’audience d’aujourd’hui. «C’est la première fois aujourd’hui que j’entends M. Brousseau parler d’une autre personne que lui-même», a-t-elle déclaré au juge.
« Ce que je veux, c’est que les enfants puissent être des enfants. […] Je ne sais pas combien de fois les tribunaux devront le dire», a tonné le juge Gagnon en conclusion.