La petite municipalité de Sainte-Mélanie prise dans des histoires de conflits d’intérêts

La petite municipalité de Sainte-Mélanie prise dans des histoires de conflits d’intérêts
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L’apparence de conflits d’intérêts se multiplie dans une petite ville de Lanaudière où un conseiller sera suspendu pour avoir obtenu un contrat public et où le maire a également été dans la ligne de mire de la Commission municipale du Québec.

Mercredi, le conseiller de Sainte-Mélanie, Evens Landreville-Nadeau, a été condamné à une suspension de 90 jours de ses fonctions par décision de la Commission municipale du Québec (CMQ).

Il a plaidé coupable de manquement à l’éthique puisqu’une de ses entreprises, Transport Gaston Nadeau, avait un contrat de déneigement de stationnement avec sa propre municipalité, qui compte un peu plus de 3 300 habitants.

Le contrat, qui a précédé l’élection de cet homme d’affaires bien connu dans la région, s’est poursuivi pendant son mandat.

L’entente, d’une valeur d’un peu moins de 25 000 $, a même été renouvelée pour trois ans en septembre dernier par le conseil municipal.

M. Landreville-Nadeau s’est retiré au moment du vote sur le contrat, mais tous les autres élus qui ont voté font partie de la même équipe politique que lui, appelée Fier et Unis.

Le juge de la CMQ, Thierry Usclat, a également trouvé « aberrant » que le directeur général de la municipalité et les autres membres du conseil n’aient pas empêché ce contrat.

L’équipe Fier et Unis après sa victoire électorale en novembre 2021. Au centre avec la pancarte, le maire Louis Freyd. En bleu, le conseiller Evens Landreville-Nadeau qui sera suspendu pour 90 jours.

Facebook fier et uni

Moins sevère

La loi interdit à un élu d’avoir un intérêt « direct ou indirect » dans un marché public.

Interrogé sur ce contrat à la fin mars par notre Bureau d’enquête, M. Landreville-Nadeau a juré qu’il n’enfreignait pas la loi, puisqu’elle contient quelques exceptions.

“Le directeur général a vérifié et a dit que cela répondait aux critères [d’un service de proximité]. Je m’en remettais à cela», a-t-il déclaré, assurant que ce sont les élus municipaux qui ont adressé une demande de soumission à son entreprise.

Cette infraction aurait pu conduire à une interdiction de candidature de M. Landreville-Nadeau pendant 5 ans.

Mais le juge Usclat a jugé raisonnable la proposition de suspendre l’élu pour 90 jours, en raison de sa « bonne collaboration » et du fait qu’il avait déjà résilié le contrat et souhaitait conserver ses fonctions d’élu.

« Comme vous avez des entreprises, il serait important de consulter un conseiller en déontologie », a toutefois précisé le magistrat.

Le maire aussi à la loupe

Le maire de Sainte-Mélanie, Louis Freyd, a également été rencontré par des enquêteurs de la Commission municipale du Québec (CMQ) pour des dossiers qui semblaient constituer un conflit d’intérêts, a appris notre Bureau d’enquête.

Élu en novembre 2021, M. Freyd est psychologue, mais aussi agriculteur, promoteur immobilier et il exploite une entreprise de location de chalets. Cela l’oblige à se récuser de nombreux votes du conseil pour éviter de se retrouver en conflit d’intérêts.

Mais les autres élus, qui sont tous du même parti politique que le maire, ont pris les décisions suivantes qui affectent ce dernier :

· Ils ont donné leur approbation à un projet résidentiel soumis par le maire. Une fois les maisons construites, la Municipalité prévoit acquérir le terrain y menant appartenant à M. Freyd et les contribuables assumeront les frais d’entretien.

· Ils ont demandé à la MRC de Joliette un changement de zonage pour les terrains, dont plusieurs appartenant au maire, afin que leur usage passe d’agricole protégé à résidentiel. Sur deux de ces sites, l’élu loue des chalets avec son entreprise.

· Ils ont appuyé M. Freyd dans une demande d’autorisation afin qu’il puisse offrir des services de zoothérapie sur son terrain agricole.

Le maire se défend en affirmant qu’il n’a pas participé à ces décisions.

La Municipalité envisage de racheter cette rangée, inutilisable en hiver, une fois que le maire aura terminé son développement immobilier.

Photo Dominique Cambron-Goulet

Il ne veut pas perdre ses droits

« Moi non plus, je ne veux perdre aucun droit parce que je suis maire. J’ai toujours eu ce projet. Le marché est bon », dit M. Freyd à propos de son développement immobilier.

Il jure avoir subi le même traitement que n’importe quel citoyen.

«Il y a une manipulation politique avec la CMQ», juge le maire, qui se dit victime de quelques citoyens détracteurs qui ont porté plainte.

Il assure que la CMQ ne lui a donné « aucune recommandation » après l’avoir interrogé et fermé le dossier, ce que la commission n’a voulu ni confirmer ni infirmer.

«Nous gagnerions à resserrer les règles autour du lien entre la politique et l’immobilier», estime la professeure à l’UQAM spécialisée en gestion municipale, Danielle Pilette, sans condamner directement le maire de Sainte-Mélanie.

« Le principe général est que les élus sont là pour servir la municipalité. Cela ne les empêche pas de présenter des demandes, mais l’intérêt collectif doit prédominer », rappelle l’expert.

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