– Défendre l’industrie et les dernières verreries de Suisse
Les deux conseillers de l’Etat vaudois expliquent pourquoi il est indispensable de soutenir l’entreprise de Saint-Prex.
Pierre-Yves Maillard – Conseiller des États, Pascal Broulis – Conseiller des États
Publié aujourd’hui à 6h44
Il y a quelques jours, les salariés de Vetropack à Saint-Prex ont refusé la prime qui leur était proposée pour accepter la fermeture de leur usine. Par ce geste, ces femmes et ces hommes, qui travaillent nuit et jour dans des conditions difficiles, ont montré que leur objectif est de défendre leur emploi et leur savoir-faire unique en Suisse.
Cette attitude est la meilleure preuve que leur verrerie a un avenir. Car on n’a jamais vu des salariés se battre pour une entreprise sans perspectives. Lorsqu’il n’y a plus de produit prometteur, ni de valeur ajoutée, ni de clients satisfaits, le personnel le sait. Et quand l’entreprise ferme, il demande juste un bon plan social. Chez Vetropack, la fermeture n’est pas acceptée par les équipes qui y travaillent, pour plusieurs bonnes raisons.
Tout d’abord, c’est la dernière verrerie de Suisse. Pour fabriquer du verre, il faut des infrastructures lourdes et un grand savoir-faire. Lorsque nous n’en aurons plus en Suisse, nous dépendrons des importations pour un bien de consommation. Nos vignerons ont besoin de mettre leur vin en bouteille, mais la capacité de conditionner les liquides que nous consommons de manière propre et respectueuse de l’environnement est nécessaire pour de nombreux autres secteurs. Pendant la crise du Covid, nous n’avons pas pensé qu’il était important de savoir fabriquer les vaccins et les flacons pour les conditionner par exemple, mais nous avons appris que les lacunes dans ces capacités de production peuvent coûter cher.
Il faut savoir aujourd’hui que le maintien de certaines capacités industrielles peut vite prendre une importance existentielle. Et surtout, nous savons qu’une économie qui se désindustrialise devient plus faible et plus exposée aux risques de déclin et de chômage.
Ensuite, le verre est un matériau que les Suisses recyclent avec zèle depuis des décennies. Les communes investissent à cet effet des moyens importants, que la Confédération compense par le produit d’un impôt qui ne couvre pas les coûts. A quoi servent tous ces efforts si cette matière première est ensuite traitée à des centaines ou des milliers de kilomètres de chez nous avant de retomber dans le coût d’un transport polluant ? Cette matière première, qui ne sert pas qu’à refaire des bouteilles, laisse des marges importantes à la multinationale Vetropack. Il est peu probable que ce commerce lucratif, dépendant de la docilité des Suisses, perdure longtemps si plus aucune bouteille n’est produite ici.
Si le propriétaire de la dernière verrerie de Suisse envisage de la fermer, c’est bien sûr pour une bonne raison. Le secteur immobilier est devenu tellement attractif ces dernières années que des phénomènes spéculatifs apparaissent, qui expliquent ce type de décision. Il est tentant de calculer ce qu’on pourrait gagner en transformant une grande zone industrielle bien située, à proximité d’une voie ferrée, en une zone de bureaux ou d’habitation. Des exemples récents suggèrent une belle oie qui pond des œufs d’or.
Protection nécessaire
Mais cette spéculation est dangereuse. Les risques qui pèsent sur le monde peuvent le faire exploser rapidement. Si cela se produit, c’est grâce à sa diversité que notre économie résistera au choc. Ceci justifie désormais que les territoires industriels et artisanaux soient protégés à long terme et que des outils de promotion économique éprouvés soient utilisés.
C’est pour ces raisons que nous soutenons tous les efforts qui seront entrepris par le personnel, l’entreprise et les autorités cantonales et fédérales pour sauver la verrerie de Saint-Prex.
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