« J’ai toujours soutenu la solution des taxes locales sur les poids lourds »

« J’ai toujours soutenu la solution des taxes locales sur les poids lourds »
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Autoroutes, moyens AFIT, écotaxe, fret ferroviaire… En fin connaisseur des questions de mobilité, Bertrand Pancher, député de Meuse et président du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires (Liot) à l’Assemblée nationale, n’évite aucun sujet. à l’heure des coupes budgétaires au ministère des Transports. Pièces sélectionnées.

Informations sur les transports: Après l’Alsace, la région Grand Est prépare la mise en place d’une taxe régionale sur les poids lourds sur les grands axes routiers de Lorraine. En tant que député local, quelle est votre position?
Bertrand Pancher: Compte tenu des énormes investissements routiers que l’État et les collectivités doivent financer, l’écotaxe représente une opportunité importante pour aller de l’avant. J’ai toujours soutenu cette solution car elle permet de cibler des flux importants de poids lourds, notamment en Lorraine où ils peuvent représenter jusqu’à 80 % des camions.

La région Grand Est a fait son calcul : grâce à cette écotaxe, 1 milliard d’euros d’investissements ont été rendus possibles sur 10 ans, permettant de cofinancer les travaux de l’A30, de l’A31 ou de la route arlésienne représentée par le doublement de la RN 4. La Région travaille simultanément à la préparation de la taxe poids lourds, qui devrait être opérationnelle en 2028, et à la définition de ses priorités d’investissement pour pouvoir entreprendre de grands travaux routiers d’ici 2028-2029. Sans ces ressources, nous ne réussirons pas, c’est donc à mon avis une excellente initiative.

IL: Les transporteurs locaux vont forcément se plaindre…
PA: Je pense qu’on peut très bien cibler cette tarification sur les trajets longue distance constitués de flux internationaux afin de ne pas affecter les transports locaux et ainsi de ne pas pénaliser l’économie locale.

IL: Le sort de certains projets routiers est suspendu. Quelle est la position de votre groupe sur cette question ??
PA: Concernant les priorités autoroutières, j’ai lu le dernier rapport du Conseil d’orientation des infrastructures (COI) établissant plusieurs scénarios à l’horizon 2040 ou 2042. Pour résumer, le premier exclut la plupart des investissements, le second, dit scénario de planification écologique, est estimé à 84 milliards d’euros, tandis que un troisième, plus ambitieux, atteint 120 milliards d’euros en prenant en compte les demandes des collectivités.

Nous nous sommes plutôt orientés vers la seconde, qui donne la priorité à la modernisation du réseau ferroviaire et des transports, tout en incluant quelques projets autoroutiers structurants. Nous ne pourrons pas tous les réaliser, car nous sommes confrontés à un problème de ciblage de nos priorités en raison du manque de ressources. Tout dépendra de l’ampleur de la mobilisation des ressources trouvées.

IL: Parmi ces moyens figure l’utilisation de la manne des concessions autoroutières après 2031. Quelle est la position du groupe Liot?
PA: Nous n’avons pas de position particulière, si ce n’est de dire que les recettes doivent être versées à l’Agence de financement des infrastructures de transport (AFIT), quel que soit le scénario retenu. Si l’argent retourne dans le gouffre sans fond de l’État, cela ne résoudra rien. Fondamentalement, deux possibilités se présentent. Soit nous nous engageons à nouveau sur des concessions, mais de plus courte durée.

“Je considère qu’il est vraiment dangereux de réduire les ressources du ministère des Transports étant donné l’état désastreux des infrastructures.”

La dernière privatisation a rapporté 31 milliards ; après actualisation, on peut espérer pouvoir recevoir un gros chèque de 50 à 70 milliards d’euros, avec le risque que la majorité soit allouée au budget de l’Etat. Soit l’État confie la gestion des autoroutes à une délégation de service public et récupère des recettes annuelles, au total moins importantes. Il est urgent d’ouvrir un débat sur la gestion de nos autoroutes après 2031, car cette échéance arrive très vite, la préparation des études et l’appel d’offres étant un long processus.

IL: Comment utiliser l’argent des autoroutes?
PA: Avec ces ressources puisées dans les autoroutes auxquelles s’ajouterait celle des taxes locales généralisées sur les poids lourds, on pourrait financer un programme d’infrastructures très important, à commencer par le ferroviaire. La vétusté de notre réseau ferroviaire, deux fois plus vieux que celui de l’Allemagne, est la première cause des retards des trains et l’un des principaux obstacles au développement du fret ferroviaire.

Malgré l’annonce par Élisabeth Borne d’un plan de 100 milliards d’euros, on n’a encore rien vu et on nous dit que c’est à la SNCF de trouver toutes les solutions. Je n’oublie pas non plus le fleuve – certains de nos canaux fuient partout – sans oublier le canal arlésien Seine-Nord.

IL: Pour réduire le déficit de l’Etat, le nouveau ministre des Transports Patrice Vergriete voit son budget diminuer. Qu’en penses-tu?
PA: Je considère qu’il est vraiment dangereux de réduire les ressources du ministère des Transports étant donné l’état désastreux et catastrophique des infrastructures. Je suis convaincu qu’il est possible de faire des économies ailleurs, à commencer par la révision des niches fiscales pour les grandes entreprises comme le crédit d’impôt recherche (CIR).

IL: Il faut aussi débloquer des milliards pour la route, notamment pour installer des bornes de recharge électrique. Que pensez-vous de ce virage tout électrique initié par l’UE ??
PA: La décarbonation passe par le tout électrique, je ne vois pas comment y parvenir autrement. Les fabricants s’adaptent assez rapidement. L’Europe doit cependant protéger ses constructeurs avec des règles spécifiques. Il est nécessaire d’envisager des formes de régulation à nos frontières prenant en compte des évaluations sociales et pas seulement environnementales.

Marc Fressoz

 
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