Cette star suisse gravit l’Everest au lieu de payer ses dettes

L’enfant réfugié devenu millionnaire fait à nouveau l’actualité. Dadvan Yousuf doit payer des dettes, mais au lieu de sa nomination au parquet, ce pro de la crypto a préféré un autre plan.

16/04/2024, 05:5816/04/2024, 08:24

Pascal Ritter / ch média

Dadvan Yousuf est un personnage haut en couleur. En discutant avec lui, nous pensons avoir affaire à un jeune entrepreneur honnête qui s’est fait avoir à ses dépens. Mais si l’on discute avec ses anciens partenaires commerciaux, le portrait devient celui d’un bluffeur effronté. Comment séparer la réalité de la fiction ? Quoi qu’il en soit, l’histoire du « prodige de la cryptographie » a connu un nouveau rebondissement.

Arrivé en Suisse en tant que réfugié, Yousuf s’est fait connaître en 2021 pour avoir résidé des mois au Grand Hôtel Dolder, avoir été conduit en limousine par un chauffeur et avoir donné des conférences sur les cryptomonnaies devant des entrepreneurs. Dans des interviews, il a présenté sa fondation Dohrnii, destinée à la formation dans le domaine des cryptomonnaies. Il en a également lancé un du même nom.

Dadvan Yousuf, à Zurich, le 3 novembre 2021.Image : Alex Spichale

Comment il a obtenu l’argent pour ses promenades en limousine, ses nuits dans un hôtel de luxe et plus tard son appartement à Zurich Bellevue est raconté aujourd’hui comme une histoire incroyable. On apprend qu’à l’âge de onze ans, il vendait des jouets dans la rue et investissait ses bénéfices dans les cryptomonnaies. Alors que leur valeur explosait et qu’il savait investir habilement ses fonds, il devint multimillionnaire.

Aujourd’hui, presque plus personne ne croit à cette épopée. C’est notamment parce que des incohérences ont été révélées que l’autorité de surveillance des marchés financiers a dissous sa fondation et que le parquet a ouvert une enquête à son sujet.

Mais alors, comment a-t-il obtenu autant d’argent ? Jusqu’à présent, personne n’a apporté de réponse claire à cette question. Et Yousuf lui-même a réussi à nier bon nombre de ces bizarreries.

Saisies dans son pays d’origine

Tout a commencé à Ipsach, dans le canton de Berne, où cet enfant issu d’une famille kurde irakienne a passé une partie de son enfance. C’est à Bienne, non loin de là, que se déroule actuellement le dernier chapitre de la saga.

Mardi dernier, le jour de son 24ème anniversaire, il a été convoqué au parquet de Bienne. Un rendez-vous pour une crise. Un investisseur zurichois lui demande environ 5’000 francs. Une somme qui correspond presque à des frais supplémentaires pour la récupération d’une somme plus importante. Il s’agit du remboursement des frais de justice et de procédure avancés, des intérêts et des frais de port d’une assignation enregistrée.

Le lendemain, le parquet néo-zélandais a publié un avis de saisie. Il semble que Yousuf doit verser à l’entrepreneur zurichois 38’000 francs pour les avoirs résultant d’un «Contrat de résiliation». Une start-up informatique de l’Emmental réclame 66 000 francs supplémentaires pour des « travaux de développement de logiciels ».

L’affaire n’est pas encore entrée en vigueur. Yousuf rejette la demande de l’Emmental par une action en déclaration de droit négative. Le tribunal compétent doit désormais vérifier si les demandes de la start-up sont justifiées. Yousuf s’impose cette procédure parce qu’il n’a pas réussi à s’opposer à temps aux poursuites. Tant que le tribunal n’a pas rendu sa décision, aucune saisie ne peut avoir lieu.

La dette de 38’000 francs de l’investisseur zurichois sera toutefois saisie. Si Yousuf ne dépose pas de plainte auprès de l’autorité de surveillance cantonale pour poursuites et faillite dans les prochains jours, le montant deviendra dû.

Yousuf avait annoncé qu’il était prêt à parvenir à un accord avec la partie lésée et à effacer la plupart de ses dettes. Ce n’était clairement pas le cas. Le jeune Bernois accuse son ancien partenaire commercials, qui aurait refusé une offre. Ce dernier voit les choses différemment et accuse Yousuf de ne pas avoir tenu parole.

Argent de la Banque Sarasin

Pendant longtemps, on a douté que les créanciers obtiendraient plus qu’une reconnaissance de dette en cas de succès. Mais ils peuvent recommencer à espérer. La décision du tribunal détaille la manière dont les autorités envisagent de rembourser les créanciers. Apparemment, ils ont accès à 75 000 francs déposés sur un compte avec la banque privée J. Safra Sarasin. Jusqu’à présent, on ne savait pas que Yousuf était un client de ce noble établissement.

Davdan Yousuf a entretenu une image de globe-trotter sur Instagram.Image : instagram

Bien entendu, cela ne suffit pas à couvrir tous les montants réclamés. Toutefois, s’ils obtiennent gain de cause, les créanciers peuvent s’attendre à recevoir une somme proportionnelle. Mais pourquoi les autorités n’ont-elles pas accès à des sommes plus importantes ? Yousuf ne crie-t-il pas à qui veut l’entendre qu’il est toujours multimillionnaire ?

Lorsque nous l’avons recontacté, Yousuf nous a répondu qu’il n’avait qu’un compte bancaire, coincé pendant environ trois ans. Il explique qu’il n’utilise plus les autres et vit de et avec le bitcoin comme seul moyen de paiement et d’investissement. Pour les autorités, accéder à cette manne n’est pas aussi simple que de bloquer les comptes traditionnels. Les actifs sont détenus dans des portefeuilles virtuels, appelés portefeuilles cryptographiques.

Yousuf en route vers l’Everest

Lors des procédures de saisie, les débiteurs doivent se présenter personnellement au bureau des poursuites ou se faire représenter. Yousuf, dont le lieu de séjour est inconnu selon la feuille officielle, ne s’est pas rendu à Bienne le jour de son anniversaire ni lors de réunions précédentes. Il est parti pour une toute autre mission…

Par e-mail, Yousuf nous dit queil est actuellement à Dingboche, un village népalais situé à 4340 mètres d’altitude, près de l’Everest, le toit du monde. Il envoie des photos le montrant avec des enfants dans une école monastique. Sur une autre photo, il fait le signe de la victoire avec ses mains. En arrière-plan, on voit de hautes montagnes.

Davdan Youyuf prétend être près de l’Everest.Image : DR

Son plan serait de gravir l’Everest et d’y hisser un drapeau Bitcoin. Il a également emporté un drapeau kurde dans ses bagages :

« Je ne sais pas si j’y arriverai vraiment. Je voudrais au moins, à travers ce voyage, attirer l’attention sur les inégalités mondiales dans l’accès à l’éducation financière.

Yousuf se sent discriminé par les autorités et les médias. Concernant les procédures de saisie, il déclare : « Je n’ai rien à voir avec un acte de défaut de marchandise. En aucun cas je ne paierai si je ne suis pas d’accord ou si je me sens clairement injustement traité.

À propos de la conquête de l’Everest…

Reste à savoir qui a subi le plus d’injustice dans cette affaire, qui occupera probablement les tribunaux encore un certain temps. Une procédure a été ouverte auprès du parquet de Berne. Il vise à déterminer si Yousuf a réussi à convaincre les investisseurs d’acheter sa propre crypto-monnaie en utilisant les médias nationaux et internationaux ainsi que des apparitions publiques. Le tout sans forcément avoir l’intention de réaliser les projets qu’il présentait.

Certaines d’entre elles, dont une application ludique, ont en effet été créées. Sa cryptomonnaie existe également. Mais sa valeur est en chute libre. Dadvan Yousuf reste un personnage haut en couleur.

(Traduit de l’allemand par Valentine Zenker)

 
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