La « Donation Room » Baur est repensée

La « salle des dons » Baur est réinventée

Publié aujourd’hui à 14h32

C’est au sommet, dans un étage aménagé sous les combles. On y trouve depuis longtemps, outre quelques salles d’exposition dédiées au Japon, l’appartement officiel du gardien de l’immeuble. Il aurait pu indiquer une bonne adresse sur sa carte de visite, puisque nous sommes dans un hôtel particulier des Tranchées, occupé depuis 1964 par la Fondation Baur. L’ancienne directrice du musée privé genevois Monique Crick a réussi à récupérer les lieux, qui ont été luxueusement transformés en « Donation Room ». Initialement, la collection constituée par Alfred et Eugénie Baur n’avait droit à aucun ajout. C’était leur bébé. Mais tu sais comment ça se passe. Un tel enfant se momifie assez rapidement, faute de sang neuf. Une « meilleure lecture » du testament a ainsi permis d’accueillir des fonds qui ne rivalisaient pas avec les œuvres des Baurs.

Chine et Japon

C’était déformé sur le plan juridique, mais efficace sur le plan pratique. Depuis, de nombreuses pièces aux genres très divers sont entrées dans ce musée des arts asiatiques (plutôt de Chine et du Japon). Après les laques de la Fondation Edward et Virginia Chow de 1995 (qui devraient bientôt faire l’objet d’une petite exposition ailleurs dans le musée), vinrent les porcelaines chinoises d’exportation de Thérèse et John-D. Blum en 2002. Suivent en 2004 les céramiques (également du Céleste Empire) trouvées en Indonésie par le couple Müller. En 2008 s’ajoutent les kimonos familiaux de Sato Mariko. Je saute quelques largesses ici. Il faut en venir à l’énorme don de Philippe AF Neeser, japonologue s’il en est, en 2011. Il tourne autour de la cérémonie du thé. Malheureusement, on attend toujours le catalogue que Philippe Neeser continue d’affiner… Avant sa mort, François Storno (avec qui j’ai travaillé au début des années 1970, un homme charmant) a finalement sorti certains de ses « netsukes » en 2019 (1).

Tout cela n’est pas fini. La Fondation reçoit régulièrement des propositions, qui ne sont pas toutes retenues et de loin. L’attrait de la salle inaugurée en 2017 y est sans doute pour beaucoup. On n’attire pas les mouches avec du vinaigre. Après l’exposition d’une partie de leur collection de jades archaïques, les époux Myers (ou plutôt lui, en mémoire de son épouse décédée) en ont offert un superbe aux Baur. Une série de textiles servant à emballer des objets japonais est arrivée. Un don de céramiques blanches contemporaines est actuellement à l’étude. Mais il est important de peser les choses à chaque fois. Le bâtiment ne paraît pas immense, malgré plusieurs extensions successives. Il faut être sûr de montrer les objets un jour. A quoi ça sert d’accumuler des réserves ?

Peintures des XVIIe et XVIIIe siècles

Tout cela pour vous dire que l’accrochage du « Donation Room » a une nouvelle fois été renouvelé. D’autres kimonos, par nature fragiles, apparaissent dans une vitrine. De la collection Neeser sont issus trois admirables tableaux des XVIIe et XVIIIe siècles, respectivement de Torii Kiyonobu, Itô Jakochû et Kanô Motoaki. Remis en 2015 par les Müller après leur première donation, un grand vase chinois archaïque ajoute un peu d’archéologie aux Baur. Des ivoires d’un collectionneur souhaitant rester anonyme donnent enfin une idée des objets que l’Asie exportait en masse vers le marché occidental au XIXe siècle. Une seule pièce n’est probablement pas suffisante. Mais il y a beaucoup à voir là-bas, dans une ambiance très raffinée.

(1) Fabriqué en bois ou en ivoire, un « netsuke » sert à contenir des objets que les Japonais portent à leur ceinture, comme un taquet. Là-bas, les vêtements traditionnels n’avaient pas de poches.

Pratique

Fondation Baur, 8, rue Munier-Romilly, Genève. Tel. 022 704 32 82, https://fondation-baur.ch Ouvert du mardi au dimanche de 14h à 18h Ce texte accompagne celui de l’exposition « Jusqu’ici, si près » au musée Baur.

Né en 1948, Étienne Dumont étudié à Genève qui lui furent de peu d’utilité. Latin, grec, droit. Avocat raté, il se tourne vers le journalisme. Le plus souvent dans les sections culturelles, il travaille de mars 1974 à mai 2013 à la Tribune de Genève, commençant par parler de cinéma. Viennent ensuite les beaux-arts et les livres. A part ça, comme vous pouvez le constater, rien à signaler.Plus d’informations

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