Le Canada sur le pied de guerre face à la crise du logement

Le Canada sur le pied de guerre face à la crise du logement
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Je ne te cacherai pas, ça m’énerve un peu. Pas le plan, mais la façon dont il a été déballé, en morceaux. C’est la troisième fois que je reprends cette chronique.

Mon point de départ : abandonnons les demi-mesures éparses, l’ampleur de la crise du logement nécessite une mobilisation générale, un plan tous azimuts, un effort de guerre.

Le Plan canadien pour le logement, son nom officiel, y ressemble. Il regroupe les initiatives annoncées depuis fin mars, auxquelles s’ajoutent plusieurs autres mesures aussi importantes qu’originales. L’ensemble couvre un large spectre, il répond à la plupart des plaintes présentées par les principaux acteurs du secteur de l’habitat et de la construction.

Permettez-moi d’abord de recycler quelques bouts de textes que j’ai dû jeter à la poubelle. Ces quelques bribes pourraient nous aider à comprendre l’enjeu, qui n’est pas toujours perceptible depuis notre bungalow payant.

Il y a un manque de logements adéquats pour répondre aux besoins de chacun, voilà la situation. La construction est insuffisante pour répondre à la demande croissante. Conséquence : le problème continue de s’aggraver.

La SCHL a estimé l’année dernière que, d’ici 2030, il serait nécessaire d’ajouter 860 000 logements au Québec pour rétablir l’abordabilité. Quelque 140 000 devraient donc être construits chaque année.

Avez-vous une idée de l’ampleur de la tâche ?

Selon les prévisions de l’APCQ, un peu plus de 25 000 logements locatifs seront construits cette année. Moins de 5 000 maisons en copropriété devraient être mises en chantier durant cette période, en plus de quelque 6 800 maisons unifamiliales. C’est hors de propos.

Et ceci, encore une fois, sorti de la poubelle :

Il arrive que même les locataires établis ne dorment plus paisiblement. Des cauchemars d’expulsion perturbent leurs nuits. Souvent, ils ne rêvent même pas. Nous connaissons tous quelqu’un à qui cela est arrivé alors qu’il était éveillé.

Les propriétaires, alors là, j’espère qu’ils se rendent compte de leur chance, surtout s’ils sont là depuis longtemps (c’est vous, ça. Et moi). Pourtant, de plus en plus de personnes vivent la crise à travers la bande. S’ils ont des adolescents à la maison, ils risquent de les voir y rester pour toujours, ou de devoir mettre en péril leur retraite pour aider financièrement ces rejetons à quitter le nid familial.

Un collègue a rapporté dans La presse cette semaine, qu’un million de nouveaux couples (ou amoureux ?) canadiens n’auront pas les moyens de faire comme leurs parents et de devenir propriétaires tant l’immobilier est devenu inabordable dans les principales villes du pays. Je m’inquiète autant, sinon plus, pour les couples contraints d’endurer, incapables de se séparer faute de trouver ailleurs un logement solo à un prix raisonnable.

Quant à savoir ce qui permet de s’enrichir, autre question qui a refait surface récemment et qui semble vous intéresser beaucoup, elle me semble perdre de plus en plus d’actualité.

Il faut être riche au départ pour accéder à la propriété. Lorsque vous n’en avez pas les moyens, les loyers élevés vous laissent de moins en moins d’argent en poche pour épargner et investir.

On commence tout juste à percevoir les effets collatéraux de la pénurie de logements, qu’ils soient locatifs ou immobiliers. Paupérisation, sans-abrisme, violence, nous parlons davantage de conflits générationnels.

Dans ma 2ème version, j’ai conclu ainsi :

Le problème est incroyablement complexe, c’est vrai. Cela inclut l’augmentation des coûts de construction, le financement, la pénurie de main-d’œuvre dans l’industrie, les infrastructures urbaines, les transports publics, les questions d’urbanisme, de zonage et d’acceptabilité sociale, etc. (N’oubliez pas cette liste.)

Tout le monde fait sa part, mais il y a un sérieux manque de coordination. Et nous ne parviendrons pas à surmonter tous les obstacles avec des slogans vides de sens, des bonbons électoraux, de l’improvisation, des querelles de juridiction et cacahuètes.

Revenons maintenant à la troisième version de cette chronique, celle que vous lisez, la dernière. Vous ai-je déjà dit que je pouvais parfois écrire des choses sans grande conviction ?

Je n’étais pas encore convaincu des quelques pièces dévoilées avant de lire l’intégralité du plan. En plus de l’élargissement du RAP qui soulève des enjeux de finances personnelles en plus d’alimenter un marché immobilier encore très chaud, l’approche adoptée sur certains éléments a suffi à bouleverser le Québec.

J’allais donc réclamer une méthode plus concertée, capable d’aligner tous les niveaux de gouvernement vers un même objectif.

J’avoue que c’était un peu naïf de ma part de penser que nous pourrions réunir tout le monde autour d’une même table pour préparer une stratégie commune. Si possible, la situation aurait eu le temps de dégénérer avant de déboucher sur un accord.

Et cela aurait difficilement pu aboutir à un programme aussi élaboré, à en juger par ce qui se passe du côté québécois dans ce dossier. Je salue donc la décision d’Ottawa.

Le gouvernement fédéral invite (ou pousse) ses homologues provinciaux à le suivre. Il y a certes une marge de négociation, des accommodements à trouver, mais vu l’état de la situation, il sera embarrassant de laisser passer le train pour marquer des points politiques.

Ottawa résout toutes les difficultés énumérées ci-dessus. Il entend notamment améliorer et faciliter le financement de la construction de logements locatifs. Il encourage la densification des quartiers, en proposant des prêts à faible taux d’intérêt pour construire des appartements au-dessus des entreprises existantes, dans les maisons, les cours et les garages des particuliers.

Le gouvernement fédéral propose, entre autres, de louer des terrains publics (les siens, ceux des provinces et des municipalités) pour y construire des logements abordables, et c’est probablement l’élément le plus révolutionnaire du plan.

Ce sont généralement les terrains, sous les maisons, qui font l’objet de spéculations. En maintenant la propriété publique des terrains sur lesquels repose la propriété, le prix de cette dernière a tendance à beaucoup moins s’envoler, ce qui tempère aussi le marché environnant.

Le plan n’est sans doute pas parfait, il ne résoudra pas toute la crise demain matin et il néglige sans doute certains angles morts. Les gens ne manqueront pas pour le souligner. Ce que je constate, cependant, c’est que le problème qu’il aborde est immense et urgent, et qu’aucune solution de cette ampleur n’a encore été proposée.

Les sommes allouées à ce vaste projet sont-elles suffisantes ? Excessif? Je ne pourrais même pas te le dire. On saura ce que cela coûte plus précisément mardi, et les compensations nécessaires pour financer ce projet.

Si vous souhaitez répondre à cette chronique, écrivez-nous à [email protected]. Certaines réponses pourront être publiées dans notre rubrique Opinions. Si vous souhaitez contacter directement notre chroniqueur, vous pouvez le faire à [email protected].

 
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