Agé de 40 ans, ce forçat qui a passé 20 ans derrière les barreaux nie avoir dirigé le lucratif réseau géré par son fils de 21 ans dans les quartiers de Marels et d’Aiguelongue. Mais il admet avoir quand même donné quelques conseils marketing.
« Ne me mettez pas à la tête du réseau, gérer cela depuis la prison est impossible. Il faut être là ». Devant la salle comble du tribunal correctionnel de Montpellier, Laurent Morcillo, 40 ans, révèle ce mardi 12 mars sa vérité sur son degré d’implication dans le grand trafic de drogue organisé par son fils Laurent, 21 ans, dans le quartier de La Cluster, l’avenue des Marels et celle d’Aiguelongue, jusqu’à la descente de police de mai 2022. Treize prévenus, dont huit détenus, sont jugés pour ce trafic démantelé en mai 2022 par la police de Montpellier.
Crâne rasé et silhouette massive
Crâne rasé, silhouette massive, cet homme au lourd passé judiciaire, détenu à la prison de Lannemezan, a annoncé qu’il allait se montrer plus bavard à la barre que devant le juge d’instruction.
Le procureur est surpris : “Pourquoi ce changement d’avis?” Laurent Morcillo : « Aujourd’hui, nous sommes là pour l’addition. Chacun s’explique. Je sais que je vais en prison, à moins que mon avocat ne soit un magicien. J’ai les mains mouillées, mais je ne veux pas ne pas porter le chapeau que vous essayez de me mettre.
1000 € pour un téléphone à la centrale de Lannemezan
Il explique donc son rôle depuis ce centre réservé aux longues peines, d’où il multiplie les appels et échanges via messagerie cryptée avec son fils. Les smartphones sont bien entendu interdits. « A Lannemezan, ce n’est pas une maison d’arrêt, c’est plus compliqué, ça coûte 1 000 €, un téléphone. Je suis connecté 24h/24 et 7j/7. C’est une centrale électrique, vous faites ce que vous voulez dans une centrale électrique.
Le président: “ToiVous n’apportez toujours pas votre téléphone à la salle de sport ? “Oui, ça m’est arrivé”.
Conseils marketing
Au téléphone, Laurent Morcillo joue le rôle de consultant auprès de son fils. “J’ai vingt ans de prison, j’ai vu encore et encore des trafiquants, et 90% des gens que je rencontre, leurs discussions portent sur leur trafic et leurs affaires. Alors je lui ai donné quelques conseils délinquants, pour qu’il puisse mieux faire fonctionner son entreprise, sans aller en prison. Laurent Morcillo assure que c’est lui qui s’est occupé du marketing, c’est-à-dire des flyers détaillés qui circulent sur Snapchat ou Telegram pour vanter les points deal de son fils, labellisés Street Prod GRP 34, (comme The NDRL Cluster). Ou encore pour commander des sacs d’emballage de sachets d’herbe ou de cannabis : plus de 40 kilos de ces colis ont été saisis dans le local de stockage du Cluster.
“Dans la vie, nous faisons des choix. J’ai choisi d’agir de façon stupide, j’en paie les conséquences” il philosophe. Le président : “Mais vous entraînez aussi votre fils, qui ne vous a pas vu, et on a l’impression que le seul leitmotiv de tout cela est l’argent, dont il ne reste finalement plus rien.»
Vers une nouvelle vie en Espagne
Laurent Morcillo. “Je suis d’accord avec toi à 100%. Ma fille a 18 ans, je l’ai vue pendant 9 mois. J.J’ai passé ma vie en prison, je n’ai pas vu grandir mes enfants et je ne veux plus entendre parler de la France. Quand je sors, je veux aller en Espagne et mon fils est libre de me suivre. Je pense qu’en Espagne, on peut commencer une autre vie. J’ai 40 ans, j’ai encore de quoi vivre.
Le président : “Oui, il est encore temps de travailler.” Le prévenu, tout sourire : “Ah, mais je le souhaite, et je suis en bonne forme aussi.
Intermédiaire sur les ventes Rolex
Depuis son portable, avec son téléphone, Laurent Morcillo travaille déjà. “J.Je bricole ici et là, je fabrique quelques cigarettes, je fais des montres. LLe marché horloger est important. Par exemple, on va prendre une Rolex : je suis comme un agent de joueur, je suis un intermédiaire, je connais des gens qui vendent, des gens qui achètent, et quand j’ai une vente, si je prends 2000€ ou 3000 € de vente, je suis content.
Une Rolex, estimée à 30 000 €, la police en a saisi une au cours de l’enquête, appartenant à Laurent Morcillo fils, qui estime que ses points de deal lui ont valu « 3000€ par jour ». De quoi rêver, dans les échanges avec son père, d’autres Rolex à 59 000 €, d’achats d’appartements à Dubaï.
Laurent Morcillo est prêt à assumer aujourd’hui la responsabilité de tout cela. Mais gestion directe des points de deal, d’approvisionnement ? « Dire que j’ai tout ça ? Ce sont des jeunes de 19 ans, 20 ans, et je vais leur parler ? Ça n’a aucun sens.”