un rapport décrit comment Ryanair a collecté illégalement de l’argent public

un rapport décrit comment Ryanair a collecté illégalement de l’argent public
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Entre 2010 et 2019, au mépris des avertissements, la Chambre de Commerce et d’Industrie de Montpellier et les collectivités ont subventionné illégalement la compagnie aérienne low-cost via l’Association pour la Promotion des Flux Touristiques, ce qui fait l’objet d’un rapport de la chambre régionale de comptes

Alors que militants écologistes et riverains de l’aéroport de Montpellier ont prévu de se réunir ce mercredi 13 mars 2024 à 18 heures à la Préfecture pour réclamer un plafonnement du trafic aérien, l’information pourrait provoquer quelques turbulences. Au cœur des perturbations, l’Association pour la Promotion des Flux Touristiques.

Créée en 2010 par la Chambre de Commerce et d’Industrie (CCI) de Montpellier avec les collectivités locales et leurs groupements, auxquelles se sont ajoutées quelques entreprises, l’association pour la promotion des flux touristiques et économiques (APFTE) a pour objectif « la promotion et le développement du tourisme, y compris commercial, sur le territoire à travers des marchés promotionnels, l’achat de publicité sur Internet et des services de marketing ou tout autre support publicitaire tel que la participation à des foires et expositions, pour attirer une clientèle internationale ». En pratique, sa seule activité est le subventionnement des compagnies aériennes à l’aéroport de Montpellier.

9,2 millions d’euros

La Marseillaise l’évoquait dans ses colonnes la semaine dernière, et l’affaire avait déjà fait du bruit en 2015, lorsque le PoinT (à ne pas confondre avec le PoinG) révélait que l’Association pour la promotion des flux touristiques (APFTE), créée par l’Hérault Chambre de Commerce et d’Industrie, avait reversé les subventions qu’elle recevait des collectivités (Ville, Métropole, Département, Région) à Ryanair, via sa filiale Airport Marketing Services, basée sur l’Île de Man, un paradis fiscal. Laurent Dublet, avocat d’Anticor 34, avait alors expliqué que “l’association n’a pas payé de taxes commerciales et n’a publié ses comptes que l’année dernière” (c’est-à-dire 2014), et a évoqué un « une coquille vide pour contourner la législation européenne interdisant les aides d’État. »

Une analyse corroborée par un récent rapport de la Chambre régionale des comptes, qui indique : «La création d’une structure associative recevant des subventions des collectivités puis les transférant à quelques compagnies aériennes devrait permettre aux entités publiques de continuer à subventionner certaines compagnies aériennes à l’aéroport de Montpellier sans que ces flux financiers puissent être assimilés à des aides. d’État.”

Au total, on parle de 9,2 millions d’euros distribués à Ryanair entre 2010 et 2019. La Chambre régionale des comptes précise : “La décision du Tribunal de l’Union européenne ayant confirmé le caractère illégal des subventions versées, l’APFTE doit organiser la restitution de cette somme à l’ensemble des financiers.” A noter que l’entreprise a également déposé un recours en annulation devant le Tribunal de l’Union européenne en février 2021, et un appel en date du 21 août 2023 contre l’arrêt du tribunal de l’Union européenne (selon une lettre envoyée par Kléber Mesquida, président du département de l’Hérault, à la Chambre régionale des comptes le 21 novembre). Le jugement définitif n’a donc pas été rendu.

Critiques acerbes

Mais le rapport ne s’arrête pas là : il pointe du doigt « Une association n’ayant d’autre activité que l’achat de prestations marketing auprès des compagnies aériennes »contrairement aux activités mentionnées dans ses statuts, qui mentionnent « participation à des foires et expositions, pour attirer une clientèle internationale ».

Le document mentionne également « respect imparfait des règles de marché applicables » (absence de concurrence réelle et vérification de la bonne exécution des marchés),« l’absence de corrélation entre les aides versées et le développement du trafic »et surtout la continuité de cette aide malgré les alertes.

En effet, « Dans son rapport final d’observation relatif aux comptes et à la gestion de la communauté urbaine de Montpellier (pour les exercices 2010 à 2014), la chambre régionale des comptes avait mis en avant les risques inhérents au système d’aides que la collectivité accordait à quelques compagnies aériennes à travers le APFTE, une manifestation qu’elle avait déjà soutenue dans son rapport sur la région Languedoc-Roussillon. Les subventions versées étant susceptibles d’être assimilées à des aides d’État illégales, la chambre avait recommandé à la communauté urbaine de Montpellier de « notifier au préalable à la Commission européenne tout nouveau projet de versement d’une subvention à l’APFTE et de convenir avec cette dernière, ce qui profite ». d’une subvention annuelle d’environ 400 000 €, d’une évaluation documentée des retombées économiques de ses actions promotionnelles. Cette recommandation n’a pas été mise en œuvre.

En 2015 et 2016, la Préfecture de l’Hérault a également demandé la fin des subventions de l’APFTE à la Métropole, qui a continué à verser de l’argent jusqu’en 2018. Le rapport constate également que les dispositions relatives aux statuts de l’association (notamment les cotisations) n’ont pas été respectées et que les décisions du la structure manquait de traçabilité (on ne retrouve par exemple pas les procès-verbaux des conseils d’administration de certaines périodes).

Les communautés réagissent

Dans sa réponse à la Chambre régionale des comptes, en date du 4 décembre 2023, Carole Delga, présidente de la région Occitanie, rappelle que « Si Ryanair a versé cette somme de 9,206 millions d’euros à l’APFTE, la compagnie a également déposé un recours en annulation devant le Tribunal de l’Union européenne en février 2021. Dans l’attente d’un jugement définitif, l’APFTE n’a pas remboursé cette somme aux différents bailleurs de fonds, dont la Région Occitanie pour 3 791 635 €.

Elle précise que « La Région Occitanie a fait le choix, en ce qui la concerne, de ne pas encore demander ce versement […] même si ce paiement est nécessaire et légitime »et ajoute que la Région “privilégie donc à ce stade la solution du maintien de la somme contestée dans les comptes de l’APFTE, qui assume pleinement le risque juridique et comptable du remboursement à Ryanair […] de manière à garantir, sous forme de dette, le versement de cette somme par l’APFTE à la Région en cas d’issue favorable à nos intérêts dans le litige avec Ryaniair.

La Ville de Montpellier, de son côté, a insisté, dans sa réponse, sur « confirmer qu’elle a respecté les règles de droit en vigueur en suivant les recommandations de la préfecture de l’Hérault, et a donc mis fin aux paiements dès qu’elle lui a été demandée », et explique que la Chambre a tort de dire que la Ville a continué à verser de l’argent à l’APFTE après les recommandations de la Préfecture. La Ville a également demandé le remboursement de la somme qui lui est due (707 464,47 €). La Métropole a fait de même en demandant le remboursement de 2 777 572,94 €.

De son côté, l’APFTE précise qu’elle a organisé un système de restitution de sommes via des conventions, et que cela dépend de l’issue finale du contentieux mené par Rynair devant les instances européennes.

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