4 idées cadeaux livres sélectionnées par Polar en cabines

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Bordeaux et le cinéma policier by Benoît Pénicaud

Le livre comble une lacune de l’histoire de Bordeaux : la représentation de la ville dans la fiction policière au cinéma, embrassant, en plan large, toute la Gironde. L’auteur le fait avec toute la précision, la minutie et le sens du détail que l’on lui connaît, déjà à l’œuvre dans ses précédentes monographies. Il y étudie pas moins de 23 films, tournés de la fin des années 1950 au début des années 2000.

De grands réalisateurs s’y sont illustrés comme Alain Corneau, Yannick Bellon, Robert Enrico, Alain Jessua, Claude Chabrol… On y découvre également des œuvres uniques : un thriller musical (L’inspecteur connaît la musiqueJean Josipovici, 1956) tourné dans les studios du roi bordelais des nanars, Émile Cousinet ; une immersion sur les chantiers de forage du bassin d’Arcachon, (Le Mordus Jolivet 1960), un film de braquage aéronautique (Objectif 500 millions de Schoendoerffer, 1966).

La fiction policière s’est emparée de Bordeaux plus tard que de Marseille et bien sûr de Paris. Elle ne manquait pourtant pas d’atouts, avec des lieux avec lesquels l’imaginaire cinématographique pouvait travailler, les quais, le fleuve, les quartiers majestueux ou plus populaires. Sans doute son histoire plombée par le poids de la bourgeoisie marchande, et particulièrement celle du vin, joue beaucoup dans les récits qui font la part belle aux drames du vignoble : J’ai épousé une ombre (1983, Robin Davis), Désir flagrant (1986, Faraldo), L’Ange Noir (1994, Brisseau).

Ces films masquent presque ceux qui se déroulent à Bordeaux, exploitant souvent les défauts des personnages policiers, des cinq réalisateurs déjà cités. On pourrait ajouter Les fugitifs (1986, Francis Veber), tourné certes à Bordeaux, mais la ville n’est qu’un décor, jamais évoqué. Le livre pointe clairement une sorte d’incomplétude dans la représentation de la ville, bref une potentialité qui n’a pas été exploitée. Ce n’est donc pas le moindre intérêt de cet ouvrage original, à la généreuse documentation iconographique.

• Preface by François Guérif, La Geste éditions, 223 pages, 2024, €35

Aucun ennemi comme un frère par Frédéric Paulin

Le début du livre est clair : « Ô mon frère chrétien, ô mon ami druze, ô mon voisin sunnite ou chiite, ô mon hôte palestinien, vois ce pays qui est le tien. » Ainsi commence le récit des huit premières années de la guerre civile au Liban (1975-83).

Le roman conjugue avec une vigoureuse justesse et comme dans l’urgence, l’histoire d’un pays qui s’enfonce dans le chaos, les luttes sanglantes de communautés brusquement déchirées, la question palestinienne et le parcours de certains protagonistes : Michel Nada, d’un importante famille maronite partie en pour faire campagne pour le RPR, le parti de Chirac et Pasqua ; Philippe Kellermann, passé de conseiller politique à l’ambassade de France à spécialiste du Moyen-Orient à l’Élysée sous Mitterrand.

Au Liban, Zia, une militante chiite, organise des attentats suicides ; Chrétiens et musulmans participent volontiers (et ensemble) au trafic de drogue pour alimenter leurs armes (séparées) ; tandis que le capitaine Dixneuf, agent du Service de documentation extérieure et de contre-espionnage (Sdece) tente de comprendre la situation libanaise.

L’auteur maîtrise magistralement le mouvement fatal du récit, comme un chronomètre se déplaçant au-dessus de la tête du lecteur. C’est à la fois un roman d’espionnage, un thriller, un récit épique et tragique, le tout bâti sur une documentation impressionnante, mêlant avec succès la petite et la grande histoire. On attend avec impatience la deuxième partie de cette fresque.

• Éditions Agullo, 457 pages, 2024, 23,50 €

Retour de Barbarie de Raymond Guérin

Suivant l’adage nul n’est prophète en son pays, le grand écrivain Raymond Guérin (1905-1955) est plutôt méconnu des Bordelais. Il y a pourtant passé une grande partie de sa vie. A l’exception du - passé, jusqu’en décembre 1943, comme prisonnier de guerre ; il a subi plus de trois ans d’internement strict.

C’est la période du retour à la vie civile qu’il raconte dans ces deux textes rassemblés ici, tirés de ses carnets de guerre, judicieusement réédités aux éditions Bouscataise Finitude. Le premier récit décrit le choc de l’étonnement face au mode de vie de l’élite intellectuelle parisienne, qui s’est très bien adaptée à l’occupation allemande et a tiré ses profits du marché noir. Il trouve cependant l’occasion d’échanger avec de grandes figures littéraires – Albert Camus, Jean Paulhan, Jean-Paul Sartre – et de se confronter à l’écrivain Jacques Chardonne, chantre de la collaboration. Il est certes redevable à Chardonne de sa libération mais après les premiers mots de remerciement, il lui confie ses quatre vérités…

Le deuxième texte raconte un autre choc, celui de la Libération. Enthousiasmé les premiers jours, Guérin a rapidement pris ses distances, ne mâchant pas ses mots face au « règne des vestes à l’envers ». En plus d’un précieux témoignage littéraire de cette période, ces écrits dessinent la figure d’un écrivain, écorché vif, qui finit par se proclamer loin du monde et du bruit, dont le style est l’image de sa rigueur morale, frappant et bouillonnant de colère. .

• préface de Jean-Paul Kauffmann, Finitude, 2024, 204 pages, 18 €

Le maître de Ballantrae Robert Stevenson

La préface précise et rigoureuse de François Angelier donne de l’ampleur à un roman entièrement consacré au « satanisme romantique ». Nous vous recommandons de lire l’introduction une fois le livre terminé, l’esprit encore sous le choc de cette formidable histoire écrite il y a près de 150 ans.

On connaît Stevenson, son thème majeur du bien et du mal indissolublement liés (L’étrange cas du docteur Jekyll et de M. Hyde), et celui de la fascination de l’innocence, incarnée par un enfant pris dans un récit d’aventures avec un corsaire redoutablement retors (L’île au trésor).

Le maître de Ballantrae rebat les cartes du roman d’aventures et du conte moral et fantastique. La figure maléfique est celle de James, le fils aîné d’une noble famille écossaise paré de toutes les qualités physiques et d’un esprit aussi diabolique que séduisant. En raison de la guerre civile qui faisait alors rage en Écosse au milieu du XVIIIe sièclee siècle, le domaine familial revient par défaut au plus jeune, Henry ennuyeux et soumis.

C’est ainsi que commence entre les deux hommes une opposition de plus en plus irréductible, où le pouvoir de la haine contamine les « bons » protagonistes, Henry mais aussi le narrateur, son fidèle intendant. Un ouvrage classique, fondamental, à lire et relire, ici dans un bel écrin éditorial.

• Translated from English by Geneviève Maljean, preface by François Angelier, Illustrations by Donatien Mary, L’Arbre Vengeur, 2024, €29.50

 
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