Nora Dåsnes, « Appels manqués » (Casterman)

Nora Dåsnes, « Appels manqués » (Casterman)
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L’adolescence en résilience. En cet automne 2011, leur première rentrée au lycée a un goût amer pour les jeunes Norvégiennes Rebekka et Fariba. Un goût de cendres et de peur. Parce que les attentats d’Oslo et d’Utøya ont eu lieu il y a seulement quelques semaines et que ce sont surtout les jeunes de leur âge qu’Anders Behring Breivik a ciblés et assassinés. Rebekka fait des recherches, veut comprendre, dort mal. Elle est en colère contre ceux qui, à la première détonation, ont accusé les musulmans et insulté sa meilleure amie parce qu’elle porte le voile. Elle craint qu’une telle tuerie ne se reproduise, car la société n’aura pas tiré les leçons de cette tragédie. Et elle est terrifiée de voir frère aîné, en échec scolaire et accro aux écrans, sombrer dans la dépression, telle une caricature de psychopathe en puissance…

Remarquée pour son excellent roman graphique pour enfants L’année où je suis devenu adolescent (Casterman, 2021), la Norvégienne Nora Dåsnes avait 16 ans en 2011 et garde un souvenir affligeant des attentats. Mais elle est depuis devenue une artiste accomplie, ce qui fait queAppels manqués n’est pas un simple témoignage superficiel, sans distance. En empruntant le chemin d’une fiction ancrée dans une temporalité précise et en choisissant de focaliser son regard sur une jeune fille incapable d’accepter et de gérer son traumatisme, elle évoque avec délicatesse les angoisses d’une génération. Rebekka cherche des réponses simples et claires aux racines du mal, mais perd pied dans sa vaine quête. Son amie Fariba choisit de faire campagne avec la Young Labour League, cible du tueur à Utøya. Et tous les lycéens qui l’entourent se demandent comment tourner la page de la terreur tout en perpétuant la mémoire des disparus. Tout au long d’un récit à la construction claire, l’auteur creuse son sujet sans tirer de larmes ni tomber dans l’angélisme ou au contraire dans la dénonciation facile. Sobre mais pleine de vie, sa ligne est soutenue par une matière vibrante au crayon et un bicolore brut (bleu pour le présent, rouge pour le désastreux 22 juillet), qui laisse le noir aux cauchemars. Des cauchemars qui ne sont pas une fatalité : la résilience, concept tellement galvaudé, prend ici une dimension concrète et est accessible aux adolescents. Un exploit à saluer.

Nora Dasnes
Appels manqués
Casterman
Tirage : 6 000 exemplaires.
Tarif : 25 € ; 288 p.
ISBN : 9782203241848

 
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