Salman Rushdie entre au cœur de l’écriture

Salman Rushdie entre au cœur de l’écriture
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L’écrivain Salman Rushdie, à Francfort, octobre 2023. KIRILL KUDRYAVTSEV/AFP

” Le couteau. Réflexions suite à une tentative d’assassinat » (Couteau), de Salman Rushdie, traduit de l’anglais par Gérard Meudal, Gallimard, « Du monde entier », 272 p., 23 €, numérique 16 € (en librairie le 18 avril).

Le 12 août 2022, un projectile frappe à distance l’écrivain américano-britannique Salman Rushdie, alors qu’il s’apprêtait à donner une conférence dans l’État de New York. « J’ai vu l’homme en noir se précipiter vers moi dans l’allée située du côté droit des sièges. Vêtements noirs, masque noir sur le visage, il est arrivé menaçant et concentré, un vrai missile”il note dans Le couteau. Réflexions suite à une tentative d’assassinat, à paraître jeudi.

Porté par une haine patiente, ce “missile” Il a fallu trente-trois ans pour atteindre son objectif principal. En fait, il a été incendié en 1989, lorsque l’ayatollah Khomeini a condamné à mort non seulement l’auteur, mais également les éditeurs et traducteurs du roman. Les versets sataniques. « J’appelle tous les musulmans à les exécuter partout où ils les trouvent »a résumé le dirigeant iranien dans sa fatwa, déclenchant une vague de violence à travers le monde : émeutes meurtrières, incendies massifs, librairies plastifiées… En Italie, le traducteur de Versets, Ettore Capriolo, a frôlé la mort après avoir été poignardé. Au Japon, son collègue Hitoshi Igarashi n’a pas eu cette chance : il a été retrouvé dans un ascenseur, assassiné à coups de couteau. En Norvège, l’éditeur William Nygaard a été abattu à plusieurs reprises et s’est miraculeusement échappé.

” Miracle “, le mot compte dans Le couteau. Bien que profondément athée, Rushdie fut forcé d’y croire un peu ce jour-là. LE “missile” l’a blessé quinze fois, aux bras, au cou, à la poitrine, au visage ; il lui a sectionné les tendons d’une main et lui a ôté un œil ; s’il réussissait à lui mutiler la vie, il ne parvenait pas à la lui reprendre. C’est déjà un miracle. Ce livre en témoigne autant qu’il en célèbre les bienfaits ordinaires : les retrouvailles amoureuses, familiales et amicales. Reste à savoir si ce premier miracle, existentiel, pourra en produire un second, littéraire. L’homme a survécu, mais qu’en est-il de l’écrivain ? Souvent underground, parfois explicite, cette question donne au livre sa confusion et son intensité.

Passages douloureux

Car la réponse n’est pas évidente. Certes, Rushdie s’en sort. Lui qui ne bénéficiait d’aucune protection policière au soir du 12 août avance désormais sous bonne escorte, en s’appuyant sur des auteurs bien-aimés, Voltaire, Kafka, Kundera ou Auster. Tout le monde l’aide à mettre des mots sur l’épreuve. « Ce livre est cette considération. Je me dis que c’est ma façon de m’approprier ce qui m’est arrivé, de le faire mien, d’en faire mon propre travail. », il écrit. Rien n’est pourtant moins facile, et d’emblée on sent que quelque chose reste inachevé : Rushdie a été touché jusqu’à la peau, donc au cœur du texte, à la racine de l’écriture.

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