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Un défi TikTok pousse des dizaines d’adolescents à se mutiler

Lorsqu’elle a décroché son téléphone le 8 octobre, Eranda Kumnova-Baci, inspectrice scolaire au Kosovo, a cru qu’elle devait résoudre un problème commun, et non découvrir que des dizaines d’adolescentes de sa ville se mutilaient pour participer à un défi TikTok.

“Une mère m’a appelé pour me dire que sa fille, une élève de cinquième, s’était mutilée avec ses amis alors qu’elle participait à un défi TikTok”, a décrit à l’AFP l’inspecteur de Gjakova, 80 000 habitants, dans le sud-ouest du Kosovo.

Elle a immédiatement demandé à tous les enseignants, responsables pédagogiques et psychologues scolaires d’enquêter. Ils ont enregistré 22 cas de mutilations en quelques semaines parmi les adolescentes de la ville. La première remonte à janvier.

« Nous avons d’abord pensé qu’ils s’étaient blessés – volontairement – ​​aux mains, avec des objets pointus. Mais après des examens médicaux, on s’est rendu compte que certaines filles avaient des dizaines de coupures sur tout le corps”, explique M.moi Kumnova-Bisous.

Gjakova, jusque-là surtout connue comme le lieu de naissance de plusieurs militants albanais, a été bouleversée.

“Ce n’était pas seulement un choc pour la communauté éducative”, explique M.moi Koumnova-Baci. “C’était un tremblement de terre pour tout le monde.”

Santé mentale

TikTok, l’un des réseaux sociaux les plus populaires au monde avec 1,5 milliard d’utilisateurs, a fondé une partie de son succès sur des « challenges », des campagnes invitant les utilisateurs à créer des vidéos en reproduisant quelque chose : une blague, une chanson, une danse… ou des mutilations.

Selon la mère de l’une des victimes, des enfants âgés d’à peine 9 ans ont participé au défi après être tombés sur des vidéos sur TikTok.

“C’est comme un jeu pour filles de 9 à 17 ans, qui reproduisent ce qu’elles voient sur TikTok”, explique cette maman, qui préfère ne donner que ses initiales, EZ

«C’est devenu mon pire cauchemar», ajoute cette femme dont la fille prenait des photos de chacune de ses blessures.

Comme les autres parents, elle refuse de donner son nom. Quant aux autorités locales, elles ont interdit de révéler l’identité des victimes, toutes mineures.

Officiellement, TikTok interdit les vidéos faisant la promotion de l’automutilation ou du suicide.

Pourtant, experts, chercheurs, médecins et parents alertent depuis des années sur l’effet des réseaux sociaux sur la santé mentale de leurs utilisateurs, notamment les jeunes. Dépendance, harcèlement, manque d’estime de soi… les risques sont connus.

En 2023, le chirurgien général américain Vivek Murthy a appelé le gouvernement américain à prendre des mesures pour protéger les jeunes utilisateurs des réseaux sociaux.

Interdire

« Nous sommes confrontés à une crise nationale de santé mentale qui touche les jeunes, et les médias sociaux constituent un facteur majeur auquel nous devons remédier de toute urgence », a écrit le Dr Murthy dans un avis officiel.

À Gjakova, selon des personnes interrogées par l’AFP, une grande partie des victimes considéraient l’automutilation comme un moyen de surmonter leur tristesse. D’autres voulaient tester leur résistance à la douleur.

« Il est incroyablement difficile pour nous d’admettre que nos enfants se sont fait du mal intentionnellement », admet Besfort Krasniqi, chef d’entreprise de 45 ans et père de trois enfants.

« Ce n’est pas seulement un problème, c’est bien plus que cela. C’est extrêmement inquiétant», renchérit Qendresa Hoti, coiffeuse de 32 ans. « Mes enfants sont encore jeunes et je ne suis pas directement concerné, mais nos peurs grandissent, tout comme nos enfants. »

Pour lutter contre cette tendance, la communauté éducative a lancé de nouvelles initiatives pour alerter les étudiants sur les risques posés par les réseaux sociaux.

Pour Mirevete Aziri, psychologue, ces actes de scarifications sont sûrement liés « à un accès incontrôlé aux réseaux sociaux, même lorsque les enfants sont à l’école ou en famille ».

La justice kosovare s’est saisie du dossier et a ouvert une enquête, a confirmé à l’AFP le porte-parole du parquet, Drin Domi. La police a été autorisée à « prendre toutes les mesures » pour faire la lumière sur cette affaire, selon lui.

Mais pour certains, la seule solution serait de bannir complètement l’application.

« L’État devrait interdire TikTok », balaie EZ. « L’application publie tout. Même le contenu le plus dangereux ! »

 
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