Tous les opérateurs économiques qui poussent les pouvoirs publics à réorienter les aides à l’emploi, en ciblant mieux les petites entreprises, peuvent désormais s’appuyer sur des arguments incontestables. 73 % des emplois déclarés à la CNSS sont dus à ces petites structures, mais ce sont les grandes entreprises qui bénéficient de l’essentiel des aides à l’embauche.
Dans son rapport 2024, l’Observatoire TPME lâche une petite bombe. Contrairement aux idées reçues, y compris dans certains centres de décision, le véritable moteur de l’emploi au Maroc, ce sont bien les petites et moyennes entreprises. Si plus de 8 entreprises sur 10 déclarent moins de dix salariés à la CNSS, 73 % des emplois sont dus à de petites structures de taille très variable.
Pour la part des entreprises employant entre 11 et 50 salariés, leur part s’élève à 11,1% en 2023. La population de ces fantassins de l’emploi va des TPE (3 à 10 salariés) aux petites entreprises (10 à 50 salariés) en passant par la grande PME, qualifiée de « moyenne entreprise » dont l’effectif varie entre 50 et 175 salariés.
Paradoxalement, ce sont les grandes entreprises, celles de plus de 175 salariés, qui concentrent plus de la moitié (56%) des emplois aidés, les fameux « emplois Anapec ». Détail important, ces entreprises n’appartiennent pas forcément à des secteurs à forte intensité de main d’œuvre, car les aides à l’embauche ont créé un véritable effet d’aubaine.
Dans le réseau des agences bancaires par exemple, les jeunes diplômés placés dans des fonctions commerciales sont massivement recrutés sous ce régime. Le gouvernement sait désormais à quoi s’attendre pour une future réforme de ce système d’aide à l’emploi. Les PME de moins de 5 ans déclarent près de 21% des emplois contre 1,3% pour les grandes entreprises du même âge. La répartition de l’emploi, selon la catégorie d’entreprises et l’âge, révèle par ailleurs que les PME, dont l’ancienneté est inférieure ou égale à 5 ans, ont généré 20,7% du total des emplois déclarés. en 2023 contre 20,1% l’année précédente.
Cette proportion est de 1,3% pour les grandes entreprises, soit une hausse de 0,6 point. Cela signifie que ces petites structures ont gagné en résilience malgré les contraintes de cette phase critique et le risque élevé de mortalité dû à la dégradation des conditions de paiement dans le secteur privé. Même si elles n’ont pas encore retrouvé leur dynamisme en matière d’emploi d’avant la pandémie de Covid-19, les PME restent des acteurs de premier plan dans la lutte contre le chômage. Entre 2016 et 2023, ils représentaient en moyenne plus de 7 emplois sur 10 déclarés dans les registres CNSS.
En effet, ce taux évoluait en moyenne annuelle de 8,7% avant la crise du Covid, et de 6% après. Les grandes entreprises ont, quant à elles, maintenu une part stable autour de 27%, avec une hausse plus importante après la pandémie, soit une moyenne annuelle de 15,1% durant cette période contre 6,8% avant la crise.
L’analyse de la répartition de l’emploi, selon l’âge, révèle une augmentation, pour les entreprises en démarrage et celles de 2 à 5 ans, de 4,4% à 5,1% et 14,9% respectivement. à 16,9%. Les entreprises de 6 à 10 ans affichent une croissance post-Covid plus forte qu’avant la pandémie.
Quant aux entreprises de plus de 10 ans, elles concentrent, en moyenne, 61,1% de l’emploi sur la période étudiée, tout en enregistrant une légère croissance post-crise pandémique. Il ressort de la répartition des emplois aidés par défiscalisation et exonération de charges sociales, dits « emplois Anapec », que les très grandes entreprises (plus de 500 salariés) monopolisent le plus gros contingent de salariés en 2023, soit 55,9 %. Il s’agit d’une augmentation de 17,2%.
A l’inverse, les TPE et les « moyennes entreprises », celles de 50 à 175 salariés, ont connu une baisse de leur part, passant respectivement de 19,2 % à 11,3 % du nombre de stagiaires. Par ailleurs, 18,3% de cet effectif est employé par des entreprises dont le nombre de salariés est compris entre 101 et 500 personnes.
74% des salariés gagnent moins de 4.000 DH par mois
Le nombre d’entreprises affiliées à la CNSS est passé de 202.649 à 332.102 entre 2016 et 2023, soit une évolution annuelle moyenne de 7,9%. Ce taux de croissance a ralenti autour de 5 % en moyenne dans la période post-Covid. Quant au nombre d’employés, il est passé de 3,280 millions à 3,987 millions, soit une augmentation annuelle moyenne de 2,7% entre 2016 et 2023.
Ce taux de croissance s’est accéléré dans la période post-covid pour atteindre 4,9% en moyenne contre 2% dans la période pré-covid. Cette évolution résulterait notamment de l’effort de sensibilisation entrepris par la CNSS auprès des entreprises pour qu’elles fassent leurs déclarations conformément à la réglementation.
Par tranche de salaires déclarés en 2023, il ressort que 74,3% des salariés inscrits à la CNSS gagnent moins de 4.000 DH brut par mois. Pour eux, la réforme des IR, introduite dans la loi de finances 2025, est une excellente nouvelle.
Par ailleurs, 54,8 % sont payés moins que le salaire minimum. Une situation qui s’explique par le caractère à temps partiel de ces emplois, empêchant ainsi d’atteindre le salaire minimum requis. En revanche, la part des salariés dont le salaire dépasse 20.000 DH reste limitée à 2,7%.
Abashi Shamamba / Inspirations ÉCO
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