Le JDD. Annuler un vote deux jours avant le verdict populaire, est-ce démocratique ?
Cristian Preda. Nous n’avons pas encore les détails, mais l’ingérence de la Russie a été si grave que Georgescu sera hors compétition. Oui, il y a une certaine frustration parmi ses électeurs. C’est compréhensible. Mais je rappelle que ce candidat était un inconnu, un produit des réseaux sociaux. Georgescu s’est adressé aux électeurs de manière simple avec cette image patriotique, comme un copier-coller de Poutine. On l’a vu en judoka ou nager dans l’eau glacée. Il avait le profil d’un homme machiste. Mais cet homme n’était pas Trump ! Il n’avait ni son charisme ni son énergie. C’était juste un influenceur dont nous n’entendrons plus parler.
Il avait quand même des millions de voix !
En Roumanie, nous créons des citoyens qui obtiendront leurs informations sur TikTok. Le niveau d’éducation est catastrophique. Il y a un manque de ressources dans les communautés rurales, qui ne sont pas correctement équipées. Les salaires des enseignants ont longtemps été misérables. En tant qu’enseignant, lorsque je compare le niveau des étudiants Erasmus avec celui des Roumains, je vois une nette différence. C’est un paradoxe mais, en termes d’éducation, c’était mieux sous le communisme. C’est terrible de dire ça.
Peut-être est-ce aussi une mauvaise nouvelle pour son adversaire Elena Lasconi ?
La suite après cette annonce
Je pense qu’elle avait de bonnes chances de gagner. Le seul à se réjouir est le Premier ministre social-démocrate Marcel Ciolacu, arrivé troisième du scrutin avec seulement 2.700 voix de moins que Lasconi. Ciolacu a sans aucun doute pu compter sur les quatre juges de la Cour constitutionnelle eux-mêmes issus du parti social-démocrate. Beaucoup diront que cela pose un problème de neutralité.
N’aurait-il pas été préférable que le peuple décide par les urnes ?
La mobilisation démocratique aurait pu résoudre cette crise. D’autant que les informations rendues publiques après le premier tour avaient déshonoré ce candidat, de nature contradictoire, qui mettait en avant une chose et son contraire, qui se disait religieux et franc-maçon, qui admirait les différents camps de la droite radicale de l’entre-deux-guerres ou qui a raconté avoir été en contact télépathique avec des clairvoyants du 16ème siècle.
« La Russie, lorsqu’elle intervient, n’a toujours qu’un seul candidat »
Et quelle est la prochaine étape ?
Il va falloir mobiliser les ressources pour une vraie vie démocratique. Ce qui nous a manqué, c’est un débat entre candidats que nous connaissions avant l’élection, projet contre projet. Quelqu’un prendra-t-il la place de Georgescu ? La Russie, lorsqu’elle intervient, n’a pas qu’un seul candidat. Elle en a toujours plusieurs.
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