Pour ses derniers mots en tant que Premier ministre, Michel Barnier, 73 ans, a appelé chaque député à la « responsabilité » dans un « moment de vérité ».
“Ce n’est pas par plaisir que je n’ai présenté presque que des mesures difficiles”, la “réalité” budgétaire ne disparaîtra pas “par l’enchantement d’une motion de censure”, a-t-il déclaré, visiblement résigné, devant un hémicycle devenu sérieux. à nouveau après des moments d’agitation.
Pour défendre la motion de censure, Eric Coquerel (LFI) a critiqué « l’illégitimité » d’un gouvernement ne tenant pas compte du résultat des élections législatives, et refusant de reconsidérer la réforme des retraites. Boris Vallaud, patron des députés PS, accusant Michel Barnier de s’être “enfermé dans un tête-à-tête humiliant” avec la dirigeante du RN Marine Le Pen.
Malgré les nombreuses concessions obtenues dans la dernière ligne droite, le leader du groupe d’extrême droite a fustigé la politique proposée par le Premier ministre : “vous n’avez apporté qu’une seule réponse, la fiscalité (…) la pire politique serait de ne pas censurer un tel budget”. ».
Remplacement « rapide » ?
A l’inverse, les partisans du gouvernement s’en sont pris aux députés censurés.
« Qui vas-tu condamner ? France», s’en est pris à Gabriel Attal, patron des députés macronistes. Laurent Wauquiez, chef du groupe Les Républicains (LR), a dénoncé une « comédie d’une insupportable légèreté » et accusé Marine Le Pen de « choisir le chaos ».
Si Emmanuel Macron a appelé à « ne pas faire peur » en évoquant un risque de crise financière, Michel Barnier n’a pas hésité à dramatiser la question.
Attendu à 6,1% du PIB en 2024, bien supérieur aux 4,4% prévus pour l’automne 2023, le déficit public manquerait son objectif de 5% en l’absence de budget, et l’incertitude politique pèserait sur le coût de la dette et la croissance.
Malgré ces avertissements, Michel Barnier quittera Matignon, 62 ans après le seul précédent sous la Ve République, la censure de Georges Pompidou alors Premier ministre sous le général de Gaulle.
Les regards qui s’étaient détournés de l’Élysée vont désormais se tourner vers Emmanuel Macron.
Le chef de l’Etat pourrait choisir “rapidement” un Premier ministre, selon tous ses interlocuteurs. Un empressement inhabituel qui vise à limiter l’incertitude qui pèse sur les esprits et les marchés.
Un rendez-vous avant la cérémonie en grande pompe de réouverture de la cathédrale Notre-Dame de Paris samedi est « possible », estime un proche. Mais « rien n’a été fait », assure l’entourage présidentiel.
Et l’équation de Matignon semble toujours aussi complexe, avec l’impossibilité d’une dissolution et de nouvelles élections législatives avant sept mois.
« Pas de censure » contre « démission »
La fragile « base commune » qui soutenait le gouvernement sortant pourrait se fissurer dans « l’après ». Laurent Wauquiez a déjà rappelé que la coalition de septembre « n’était valable que pour Michel Barnier ».
Gabriel Attal propose un accord de « non-censure » avec le PS pour échapper à la tutelle du RN. «Libérez-vous» de la France insoumise, a-t-il lancé aux socialistes dans l’hémicycle.
Côté casting, les noms du président du MoDem François Bayrou, du ministre des Armées Sébastien Lecornu et du LR Xavier Bertrand circulent.
“Nous prenons les choses à l’envers (…) la question des politiques menées doit être prédominante”, insiste Cyrielle Chatelain, cheffe des députés écologistes.
La gauche reste désunie sur l’avenir. Le PS souhaiterait « un gouvernement de gauche ouvert au compromis », que la droite et le centre s’engageraient à ne pas censurer, en échange d’un renoncement au 49.3.
LFI continue de réclamer la démission d’Emmanuel Macron. C’est “aujourd’hui un obstacle, et en aucun cas une solution”, a insisté Eric Coquerel.
La petite musique résonne aussi sporadiquement dans d’autres camps, notamment chez des personnalités de droite.
Marine Le Pen, si elle refuse d’appeler à la démission au nom du “respect de la fonction suprême”, montre la porte : “c’est à sa raison de déterminer s’il peut ignorer l’évidence de méfiance populaire massive qui (…) Je crois que c’est définitif ».
Mardi, le chef de l’Etat a balayé les appels à la démission : selon lui, ils relèvent de la « politique-fiction ».
LFI demande « maintenant à Emmanuel Macron de partir »
La France insoumise, par la voix de la présidente du groupe à l’Assemblée Mathilde Panot, a une nouvelle fois demandé à “Emmanuel Macron de partir”, exigeant des “élections présidentielles anticipées”, mercredi après la chute du gouvernement de Michel Barnier à l’Assemblée.
« L’inévitable censure a eu lieu. Même avec un Barnier tous les trois mois, Macron ne tiendra pas trois ans”, a ajouté, sur le réseau social X, le leader de LFI Jean-Luc Mélenchon.