Dans le jargon populaire, on peut affirmer sans se tromper que pour l’élection de 2024, Donald Trump a « passé le cap ».
Je vais entrer en classe aujourd’hui et beaucoup d’étudiants vont me demander ce que je pense de cette élection, en tant que personne qui enseigne l’histoire des États-Unis et de son système électoral depuis longtemps.
Nous n’avons pas encore toutes les statistiques, mais j’en ai suffisamment à apprendre.
Démocrates, mauvais professeurs
Si je me retrouve devant une classe, c’est avant tout pour l’ensemble de mes connaissances et de ma méthode de travail. C’est doté de ces outils que j’oriente ensuite mes démarches pédagogiques.
L’un des principes pédagogiques les plus anciens est d’aller à la rencontre des étudiants là où ils se trouvent, pour éviter tout jugement. Si je veux qu’ils me fassent confiance et m’écoutent, je dois éviter de les mépriser, de leur donner une impression de mépris ou de condescendance.
De nombreux démocrates semblent incapables d’assimiler cette leçon et de nombreux penseurs et intellectuels prêchent la morale plus qu’ils n’éduquent.
Qu’est-ce que je leur dis ?
Dans mes classes, je retrouve un grand nombre de jeunes femmes et un nombre toujours croissant d’étudiants issus de l’immigration. Ma première pensée fut pour eux lorsque, vers 1h30 du matin, la victoire des Républicains fut confirmée.
Donald Trump a su exploiter les thèmes de l’immigration et du wokisme pour dominer Kamala Harris, mais il l’a fait de la pire des manières. Des insultes, des préjugés, de la haine et des vociférations de colère que l’on n’avait plus entendues depuis les années 30.
L’immigration est l’un des facteurs déterminants des récents cycles électoraux dans les démocraties occidentales. On en parle de plus en plus au Canada et au Québec.
Nous ne sommes pas américains, notre contexte est différent, mais plusieurs de nos concitoyens expriment des inquiétudes très légitimes sur cette question. Est-ce qu’on écoute ? Nos politiques gèrent-ils bien ces craintes légitimes quant aux incertitudes légitimes qui pèsent sur notre capacité d’accueil ?
En cours, j’aborde ces questions de front, l’histoire fournissant le contexte et le matériel nécessaires pour alimenter le débat et la réflexion.
Lorsque mes élèves, dont beaucoup ont la peau noire, m’interrogeront sur les causes de la défaite de Kamala Harris, un modèle qui suscitait chez eux de nombreux espoirs, je ressentirai d’abord un malaise, un malaise.
Je suis en mesure d’expliquer les principales raisons de cet échec, mais je garderai toujours à l’esprit les propos de Trump. Le racisme, le sexisme et l’homophobie ne sont acceptables nulle part. Cependant, le 47e Le président des États-Unis n’a pas hésité à jouer avec ces concepts…
J’affirme depuis longtemps qu’à travers leur polarisation et leurs débats extrêmes, les États-Unis constituent un formidable laboratoire. Nous pouvons apprendre de leurs expériences.
J’irai donc en classe en espérant que lorsque nous aborderons des sujets sensibles, nous le ferons ouvertement et en écoutant tout le monde, afin d’éviter que la colère ne prenne le pas sur la raison.