Les discours masculinistes ciblent des adeptes de plus en plus jeunes sur les réseaux sociaux – rts.ch

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Propos misogynes, banalisation des agressions sexuelles, appels au viol, clichés, contradictions, fausses informations : les discours masculinistes prennent de plus en plus d’ampleur sur des plateformes comme TikTok, Instagram, Facebook ou YouTube. Une idéologie qui cherche à attirer des adeptes de plus en plus jeunes.

La « pensée masculiniste » est une théorie selon laquelle la masculinité traditionnelle traverse actuellement une crise de société qui se banalise et se déploie. Pour ses adeptes très actives sur les réseaux sociaux, une guerre est ouverte avec les femmes, affirmant que « tout est la faute du féminisme » ou que « les femmes sont nos ennemies ».

Dans ce que nous appelons la « manosphère », des sous-communautés d’hommes se créent alors qui développeront des sous-axes de discours. Parmi eux, on peut citer par exemple les « Incels », contraction en anglais de « involontary celibates ». Ces derniers prétendront n’avoir pas accès à la sexualité, car physiquement défavorisés. Un célibat imposé dont seules les femmes sont, selon eux, responsables.

Il y a aussi les « MGTO », les « Men Going Their Own Way », autrement dit ces hommes qui suivent leur propre chemin et qui ne veulent plus côtoyer les femmes. Ou encore l’idéologie dite de la « pilule rouge » qui prône de sortir d’une société trop féminisée en prenant une « pilule rouge » permettant enfin de voir la réalité. Cette référence à Matrix met également en évidence une certaine attirance des milieux masculinistes pour les références culturelles populaires.

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Un contenu a priori inoffensif

Autrefois confinés à des forums obscurs, les masculinistes apparaissent désormais sur les réseaux sociaux populaires comme Instagram, TikTok et YouTube. Pour eux, ce sont des lieux de rassemblement, de communication, d’échange et d’organisation politique, comme les autres communautés.

Il s’agit la plupart du temps de conseils de vie, de conseils de séduction ou de conseils de musculation par exemple.

Pauline Ferrari, auteur du livre « Comment les masculinistes infiltrent les réseaux sociaux »

Mais pour Pauline Ferrari, auteure du livre « Comment les masculinistes infiltrent les réseaux sociaux », le modus operandi de la manosphère présente une spécificité. En effet, les contenus diffusés semblent, a priori, très inoffensifs.

“Il s’agit la plupart du temps de conseils de vie, de conseils de séduction ou de conseils de musculation par exemple”, explique-t-elle sur La Matinale. Autrement dit, des contenus qui excluent les femmes par définition. Les masculinistes peuvent alors glisser vers une radicalisation de leurs propos, poursuit-elle, allant jusqu’à affirmer que « tous leurs problèmes sont liés aux femmes et aux féministes ».

« Nous n’avons pas vraiment de vidéos qui disent explicitement que toutes les femmes doivent être tuées. Cependant, nous avons beaucoup de contenus qui sous-entendent que les femmes sont toutes pareilles, qu’elles sont corrompues, qu’elles mentent et que leur seul objectif serait d’anéantir le genre masculin.

La cible privilégiée : les jeunes

Les jeunes sont la cible privilégiée des masculinistes, comme le souligne Julien Mesangeau, maître de conférences à l’université de Lille. Il a cosigné une étude sur la manosphère avec Céline Morin. Une manosphère dans laquelle ils ont cartographié et identifié les différents canaux de distribution comme YouTube ou Reddit par exemple.

Les jeunes entre 18 et 24 ans représentent donc le public le plus réceptif à ce type de discours. Un public qui découvre les relations entre hommes et femmes et qui ont surtout des parcours similaires, décrypte le chercheur dans La Matinale.

Souvent, soit ils ont vécu une première expérience difficile, soit ils n’ont pas pu vivre une première expérience. Donc généralement, ils arrivent avec des griefs dès qu’ils se connectent à ces espaces

Julien Mesangeau, maître de conférences à l’Université de Lille

« Souvent, soit ils ont vécu une première expérience difficile, soit ils n’ont pas pu vivre une première expérience. Donc, généralement, ils présentent des griefs lorsqu’ils se connectent à ces espaces. Elles y trouveront du soutien auprès de gens comme Elles y trouveront des vidéos qui expliqueront que ce n’est pas de leur faute, qu’elles n’y sont pour rien et que ce sont les femmes qui sont responsables de cette situation. Ces discours vont donc de l’un à l’autre. d’une part pour rassurer la personne et d’autre part pour confirmer quelles étaient ces idées et ressentiments au moment des difficultés rencontrées.

Phénomène de chambre d’écho

Il y a donc un phénomène de chambre d’écho. Ces espaces en ligne forment en effet un cocon très sécurisé autour de l’individu. Et il y a un double effet de fermeture, comme l’explique Julien Mesengeau.

Les individus sont obligés de tenir un certain discours, de le répéter et de le réaffirmer. Et d’un autre côté, ils sont obligés de parler, de commenter des contenus vidéo – images et textes – qui relaient ces mêmes idées.

Julien Mesangeau, maître de conférences à l’Université de Lille

« Le premier est relationnel. Vous ne pouvez pas exprimer une opinion différente de celle du groupe, sinon vous êtes généralement banni. La sanction, lorsque l’on n’adhère pas à l’avis du groupe, est immédiate. D’abord, on te bloque, puis on insulte et enfin, on sort.

La deuxième fermeture est informative. Les jeunes générations s’informent principalement en ligne, un espace dans lequel « les individus sont obligés de tenir un certain discours, de le répéter et de le réaffirmer. Et d’un autre côté, ils sont obligés de parler, de commenter des contenus vidéo – images et textes – qui relaient ces mêmes idées.

Radicalisation ciblée

Ces vidéos et discours posent problème car ils utilisent la même méthode utilisée par les réseaux complotistes, à savoir la stratégie du pied dans la porte. Dans un objectif de radicalisation, comme le souligne Pauline Ferrari.

« On part de concepts très anodins qui répondent à de vraies souffrances et de vraies questions que peuvent ressentir les adolescents et les jeunes hommes sur la séduction et la confiance en soi par exemple. Et nous proposons à ces questions des clés de lecture et des corrigés qui seront des réponses très simplistes, très manichéennes et de fait très misogynes aussi.

Des discours misogynes qui ont un impact hors ligne. Un chiffre du dernier rapport sur l’état du sexisme en France indique qu’un quart des hommes de moins de 35 ans estiment que pour être respecté dans notre société, il faut parfois être violent.

Miruna Coca-Cozma/fgn

 
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