Noël, l’humilité de Dieu

Noël, l’humilité de Dieu
Noël, l’humilité de Dieu

Noël, l’humilité de Dieu

Lettres de lecteurs

Publié aujourd’hui à 8h45

Vandœuvres, 6 décembre

Le temps de Noël approche. Froid, pluie, neige, journées sombres et trop courtes, guirlandes, sapins de Noël, décorations lumineuses, achats à finir vite et fêtes de famille à organiser. Mais Noël a aussi un message plus profond, qui peut toucher de nombreux aspects de nos vies, notamment la question de l’humilité, une valeur toujours vantée mais pas toujours bien vécue.

Noël commémore la naissance de Jésus, que les chrétiens confessent comme Dieu le Fils, égal en dignité et en puissance à Dieu le Père. Il ne faut pas passer à côté de ce qu’il y a de paradoxal, voire de choquant, là-dedans. Le créateur de matière devient matière. Le Tout-Puissant devient un bébé sans défense. L’Éternel se déroule dans le temps. Et Jésus n’est même pas né dans une famille royale, puissante ou riche, mais dans un couple pauvre qui n’a pas de meilleur endroit pour dormir que la mangeoire à bétail.

« Jésus n’est même pas né dans une famille royale, puissante ou riche, mais dans un couple pauvre qui n’avait pas de meilleur endroit pour dormir que la mangeoire à bétail. »

Noël manifeste une caractéristique de Dieu unique par rapport aux religions du monde : Dieu est humble. Dieu peut descendre au-dessous de sa condition naturelle et légitime. Dieu est prêt à renoncer à l’honneur qui lui est dû pour rejoindre l’humanité.

L’humilité est généralement recommandée dans la plupart des traditions philosophiques ou religieuses (Nietzsche étant une exception). En règle générale, l’humilité est recommandée soit en alléguant l’insignifiance ou l’impuissance de l’être humain, soit en mettant en valeur la grandeur de Dieu ou des dieux, devant lesquels l’homme n’est rien. Ainsi la mythologie grecque place l’hubris, l’orgueil qui refuse de rester à sa place dans le cosmos, à la tête des fautes capitales. La philosophie socratique commence par savoir que nous ne savons rien. Et ainsi de suite. La spécificité chrétienne sur ce point est de recommander l’humilité parce que Dieu lui-même s’est fait humble.

Cet angle apporte également un équilibre bienvenu. L’humilité qui se fonde sur la grandeur des dieux n’a de chance d’être valable que face à des dieux, ou à des humains plus puissants que soi. Les puissants de ce monde n’ont donc aucune raison d’être humbles face à des personnes de rang inférieur ; une telle humilité s’adapte à une société très stratifiée, comme l’était la société grecque, et la légitime même. Mais lorsque le Tout-Puissant vient prendre la dernière place, les plus grands des hommes sont concernés. Quant à l’humilité qui repose sur l’insignifiance humaine, elle porte en elle un germe de dégradation, que l’on risque d’appliquer aux autres autant qu’à soi-même. Mais lorsque Dieu prend la place des faibles et des pauvres, il confère ainsi la dignité même aux plus insignifiants. La présence de Dieu chez un bébé donne de la valeur à chacun, quel qu’il soit.

Ainsi, le message de Noël, incarnation de Dieu dans l’homme, fonde une humilité qui concerne chacun, petits et grands, et valorise l’humanité plutôt que de la dégrader. Les plus laïcs d’entre nous ne seraient-ils pas d’accord sur le fait que c’est le genre d’humilité dont nous avons besoin ?

Jean-René Moret, physicien EPFL, docteur en études théologiques, curé de l’Église évangélique de Cologny

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