La maladie d’Alzheimer touche jusqu’à 9 000 personnes en Corse. Souvent, les patients restent à la maison avant que leur maladie n’évolue de manière trop importante et sont accompagnés par un membre de leur famille, appelé soignant. Deux d’entre eux racontent à France 3 Corse ViaStella leur quotidien.
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Marc Frant en est sûr, »tôt ou tard, le placement sera la solution, quand nous nous serons épuisés».
Depuis trois ans, le retraité s’occupe de son épouse, Laëtitia, atteinte de la maladie d’Alzheimer. Une maladie qui s’est imposée dans la vie du couple à une date très particulière. “Elle a oublié un de mes anniversaires. C’est à ce moment que j’ai réalisé», dit-il.
L’île ne dispose pas de chiffres consolidés pour les personnes touchées par la maladie d’Alzheimer ou surveillées pour leur déclin cognitif. L’agence régionale de santé dénombrait, au 31 décembre 2022, 2 938 personnes touchées, tandis que la Fondation France Alzheimer évalue ce chiffre à 9 000. Dans l’ensemble du pays, 900 000 personnes reçoivent un diagnostic de maladie d’Alzheimer ou d’une autre maladie apparentée.
Principale cause de la démence, cette affection neurologique résulte d’une lente dégénérescence des neurones. Cela commence dans l’hippocampe et se propage ensuite au reste du cerveau. Elle se caractérise par des troubles de la mémoire récente, des fonctions exécutives et de l’orientation dans le temps et dans l’espace.
Une pathologie qui a déjà évolué dans le cas de Laetitia. “Ma femme s’appelait l’ordinateur, ce n’est plus le cas. Elle était infirmière privée donc elle se souvenait qu’elle avait 50 rendez-vous dans la journée», confie son mari.
-“Pour l’amour», Marc Frant accompagne sa femme qui vit toujours avec lui à Alata. “J’avais une vie normale, maintenant je suis infirmière à domicile jour, nuit et week-end. Elle a parcouru le monde et maintenant elle ne veut plus quitter sa maison. C’est un grand changement.»
S’il est soutenu par la Fondation France Alzheimer et participe à des ateliers dédiés aux soignants, il «savait[t] la suite». “Cela va empirer. Ce que je ne sais pas, c’est à quelle vitesse. Quand on vit avec quelqu’un depuis 60 ans, il faut faire avec.»
La maladie d’Alzheimer a également bouleversé la vie de Jo Nicoli. Le diagnostic est tombé pour son épouse, Isabelle, en 2020. Elle n’avait alors que 40 ans. “Ça va très très vite parce qu’elle est jeune, confie-t-il. À 54 ans, les choses se dégradent à une vitesse incroyable. Elle a été diagnostiquée en 2020. Jusqu’en 2022, ça allait plutôt bien, elle conduisait toujours, elle allait chez l’orthophoniste, chez le kiné. Et après 2022, ça a été une catastrophe, elle est devenue agressive alors qu’elle n’avait jamais été agressive de sa vie. Elle a dit beaucoup de gros mots, elle n’était plus la même personne. Actuellement, ma femme ne parle plus et ne reconnaît plus grand-chose.»
Si depuis le reportage, Isabelle a changé d’établissement pour se rapprocher du lieu de résidence de sa famille dans la Plaine de l’Est, elle a été confiée depuis quelques mois à l’unité d’hébergement renforcé (UHR) du centre hospitalier de Sartène.
L’établissement propose 12 places temporaires pour des patients atteints de troubles cognitifs sévères. Ces patients peuvent y être suivis au maximum deux mois par an. Dans cette structure, tout est adapté au rythme des résidents. L’ambiance est là »famille» et le personnel qui travaille est bénévole et spécialement formé aux maladies neurodégénératives.
“Il n’y a aucun obstacle ici, ils peuvent marcher. Ils errent beaucoup avec la maladie d’Alzheimer. Là, ils marchent toute la journée, poursuit Jo Nicoli. Je pense que de telles structures sont appelées à se développer. Je suis vraiment étonné de la qualité de tout. Il y a un médecin disponible 24h/24. Il y a des soins, des kinés, de l’ortho. C’est vraiment un soulagement, cela a été une bouée de sauvetage, même plus qu’une bouée de sauvetage.»
“Sauvetage», parce que l’homme, qui l’aidait, était épuisé. Bien qu’il se rende quotidiennement à l’UHR de Sartène, il affirme néanmoins qu’il «il faut avoir un peu d’égoïsme». “Cela peut choquer certaines personnes, mais il faut se dire : “J’ai des enfants, des petits-enfants, je suis vivant, j’ai toujours ma santé.” Il y a une vie derrière, c’est une seconde vie. Ce n’est pas pareil, mais cela n’enlève rien à celui que j’avais et que j’ai, mais c’est une seconde vie.»
Ces témoignages sont à retrouver, ce vendredi 24 janvier à 20h40, sur France 3 Corse ViaStella dans un nouveau numéro du magazine Sucetà consacré à la maladie d’Alzheimer.